Cancer du poumon: d’importants progrès qui bouleversent les perspectives.

L’espérance de vie s’améliore grâce aux nouvelles thérapies.

Le changement de paradigme est radical. D’un pronostic extrêmement sombre il y a encore quelques années, le cancer du poumon est passé à un entre-deux ouvrant la porte à de nombreux possibles. «Désormais, on ne dit plus à un patient présentant un cancer du poumon métastasé: “On ne peut pas vous guérir”», illustre le Pr Benjamin Besse, directeur de la recherche clinique de Gustave-Roussy. «Les termes “maladie chronique” ou “contrôle de la maladie” me semblent plus appropriés, car certains traitements peuvent très bien marcher, et longtemps.»

Certes, le cancer du poumon est à la fois l’un des plus fréquents en France (46.000 nouveaux cas par an en 2018 selon l’Inca), et le plus mortifère chez l’homme, le deuxième chez la femme (30.000 décès au total en 2018). «Mais entre les deux, il y a des gens qui vivent avec la maladie», rappelle Laure Guéroult Accolas, fondatrice de Patients en réseau. «Certains patients présentant un cancer de stade 4 (le plus grave, NDLR) peuvent, grâce à l’immunothérapie ou aux thérapies ciblées, avoir une maladie parfaitement contrôlée à 5-7 ans», remarquait, jeudi lors d’une table ronde organisée par un laboratoire pharmaceutique, le Pr Christos Chouaid, pneumologue au CHI de Créteil. Un progrès «fantastique» quand on sait que le pronostic était, il y a dix ans, de l’ordre de 8 mois.

Améliorer le dépistage

Ces progrès, nous les devons à deux vagues d’innovations thérapeutiques qui se sont succédé de façon assez rapprochée. Les thérapies ciblées ont commencé à être plus largement employées à la fin des années 2000. Elles sont efficaces pour traiter certains patients dont la tumeur présente un «talon d’Achille»: des mutations génétiques désormais recherchées systématiquement au diagnostic. «On est en mesure de trouver une cible pour ces thérapies dans 40% des cancers du poumon», évalue le Pr Besse. Dernier en date, le sotorasib, qui sera l’objet de l’une des principales présentations ce lundi au congrès de la Société européenne d’oncologie médicale (ESMO) à Paris, s’avère efficace sur 13% des patients avec un cancer du poumon portant la mutation KRAS p.G12C. Les chercheurs doivent présenter les résultats d’un essai de phase 3 conduit sur 343 patients chez qui la tumeur progressait de nouveau après une chimiothérapie et de l’immunothérapie. Le sotorasib a permis à 25% des patients d’atteindre une année sans progression de la maladie, contre 10% pour le groupe traité avec une chimiothérapie classique (docetaxel).

Deuxième innovation majeure, l’immunothérapie a commencé à être utilisée en 2015, après des résultats spectaculaires dans le mélanome. Son principe: stimuler le système immunitaire pour qu’il s’attaque aux cellules tumorales en levant une sorte de protection dont celles-ci disposent. «Elle a remplacé la chimiothérapie comme traitement standard dans le cancer métastasé, indique le Pr Nicolas Girard, oncologue, pneumologue à la tête de l’Institut du thorax Curie Montsouris. La proportion de ces patients en vie à 5 ans, en bonne forme et souvent sans traitement, est importante, de l’ordre de 30%.» L’immunothérapie devrait également bientôt bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché en complément de la chirurgie dans le cancer localisé, pour réduire le risque de récidive.

Contrairement au sein par exemple, on ne sent pas la tumeur se développer dans le poumon. Et quand on a des signes, que l’on crache du sang, il est déjà très tard –  Laure Guéroult Accolas, fondatrice de Patients en réseau

Quant à la chimiothérapie, elle ne perd pas son intérêt en cas d’échec d’une thérapie ciblée ou de l’immunothérapie, ou en complément de cette dernière. «La dernière molécule mise sur le marché remonte à 2003, souligne Benjamin Besse. Mais depuis 2020, la chimiothérapie est réinventée: on l’associe à un anticorps qui joue le rôle de vecteur en visant des protéines sur les cellules tumorales et permet ainsi de mieux cibler l’action de la chimiothérapie. Cela réduit la toxicité et décuple l’efficacité. Ce traitement est déjà accessible dans le cancer du sein et de la vessie, et l’on espère un accès à ces molécules d’ici 18 à 24 mois pour le cancer du poumon.»

Chirurgie ou radiothérapie restent la norme chez les patients diagnostiqués à un stade précoce, lorsque la tumeur reste localisée. Avec 60% de survie à 5 ans, c’est une incitation à améliorer le dépistage, car plus la maladie est prise en charge tôt meilleurs sont les résultats. «C’est pour cela que la perception du pronostic du cancer du poumon doit changer, estime Nicolas Girard. Si les gens sont informés des progrès thérapeutiques, ils seront davantage enclins à se faire dépister.» En France, un dépistage par scanner des patients à risques ayant fumé plus de 25 ans est en cours d’expérimentation dans certaines régions. «Il faut qu’on se bouge pour que cela se mette en place, il faut en parler, plaide Laure Guéroult Accolas. Contrairement au sein par exemple, on ne sent pas la tumeur se développer dans le poumon. Et quand on a des signes, que l’on crache du sang, il est déjà très tard.»

Le Figaro

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