L’avocat de proches des trois femmes Kurdes, assassinées il y a bientôt un an, Me Antoine Comte, a déclaré qu’il y a de « grandes avancées » dans ce dossier. Selon l’avocat des victimes, « les investigations pointent vers des responsabilités turques ».

Dans une interview accordée à l’ActuKurde, Me Antoine Comte souligne qu’il y a énormément éléments qui pointent vers une responsabilité étatique turque. Mais pour lui, il faut que la question devienne européenne pour qu’on oblige l’Etat turc à ne pas discuter simplement avec les autorités françaises, parce que ces dernières ont de bonnes relations avec la Turquie.

-Il y a nombreuses questions qui attendent toujours des réponses sur l’assassinat de trois femmes kurdes en plein Paris, le 9 janvier 2013. Où en est-on sur ce dossier? Y a-t-il vraiment des avancées?

Antoine Comte:Oui. Il faut savoir qu’en droit français l’avocat est tenu au secret pendant l’instruction. Donc, tous les avocats qui participent à une instruction, comme partie civile où comme avocat de l’accusé sont tenus au secret professionnel. Mais je peux dire très clairement qu’il y a de grandes avancées dans le dossier. Les investigations pointent vers des responsabilités turques. Ça, c’est important.

-Le caractère politique de ces assassinats est-il enfin reconnu par les autorités?

Je crois que si les investigations vont vers la Turquie, ce que le caractère politique va apparaitre. Il n’est pas contesté. Dans un premier temps, on a dit que c’était d’abord une affaire passionnelle. Maintenant, plus personne n’ose dire ça. Dans un deuxième temps, on a dit que c’est une affaire interne au PKK et aux nationalistes kurdes. Plus personne n’ose vraiment dire ça. Maintenant on sait que les liens avec la Turquie existent, entre l’assassin présumé et à travers des éléments téléphoniques, des éléments d’informations techniques. Il y a énormément d’élément qui pointent vers une responsabilité étatique turque. Je ne peux pas dire; est-ce qu’ils sont des groupes aussi d’extrême droite qui peuvent peut-être en partie liés, à un moment donné, avec l’Etat turc. Par exemple, nous savons qu’en Allemagne, il a vécu dix ans. Il avait très lié aux extrémistes turcs les plus radicaux. Très lié. C’est qu’il y a trois lunes sur la bague.

-Donc l’enquête se dirige vers la Turquie…

Voilà. La question après, c’est de savoir si les turcs vont nous aider. Ça, c’est vraiment la question importante. Comment on va faire pour que les turcs nous aident? C’est rare qu’un État donne des indications, si c’est le cas, sur un de ses agents ou sur quelqu’un qui travaille pour lui, c’est assez rare. On ne va pas vraiment attendre ça. Donc, il faut que la question devienne européenne pour qu’on oblige l’Etat turc à ne pas discuter simplement avec les autorités françaises, avec lesquelles ils sont des relations plutôt bonnes, mais avec l’ensemble de l’Europe sur cet assassinat.

-Pourquoi cette affaire concerne-t-elle d’autres pays européens?

Cet assassinat se passe dans l’espace Schengen. Certaines personnes qui ont été assassinées ont reçu leur statut en Allemagne. Fidan, elle était arrivée jeune fille en France et une partie de sa famille est française. Donc, c’est l’Europe qui est concernée, ce n’est pas simplement la France. Il faut que l’Europe se saisisse de l’assassinat et qu’elle exige globalement une réponse aux autorités turques.

-Vous aviez fait une demande auprès du juge afin de afin de savoir si l’assassin présumé Omer Guney avait fait l’objet d’une surveillance des services français. Mais on vous a répondu que cela n’avait pas de relation avec les faits. Cette réponse a-t-elle un sens ?

Les choses bougent, vous savez. Et elles bougeront encore. J’ai effectivement demandé puisque les services français soient en charge de savoir quels sont les agents agissant étrangers, agissant sur leur territoire, puisque c’est ça leur métier, j’ai demandé on vérifie s’il y avait des informations sur l’assassin présumé Omer Guner. On m’a répondu dans un premier temps, ce n’est pas important, ce n’est pas le sujet, ce n’est pas la peine. D’abord, on a un appel en cours. On va poser la question devant la cour d’appel de Paris et d’autre part, on a de toute manière des choses qui peuvent évoluer. Maintenant, avec les nouveaux éléments, peut-être que cette question sera plus facilement susceptible d’être posée.

Quels sont ces nouveaux éléments dont vous parlez ?

Les nouveaux éléments pointent vers la Turquie. Je ne peux en dire plus. C’est, de mon point de vue, assez clair.

-Croyez-vous qu’il a un rapport entre le cambriolage du 23 septembre chez le juge d’instruction du pôle antiterroriste du tribunal de grande instance de Paris, Jeanne Duyé, et le dossier de l’assassinat des militantes kurdes ?

Je suis incapable de le dire. Il a été dit qu’il y a eu un cambriolage. C’est vrai que c’est toujours intriguant quand on cambriole un juge, mais je suis incapable de dire si ça a un rapport certain. C’est aux services de police de répondre ou au juge de répondre. On peut être étonné au moment où les autorités françaises reçoivent les services secrets turcs et en même temps cette épisode…c’est toujours étonnant.

-Y a-t-il d’autres enquêtes sur cette affaire dans les autres pays européens comme en Allemagne et au Pays-Bas ?

Oui oui, il y a des enquêtes en Hollande, il y a des enquêtes en Allemagne sur la partie de la jeunesse d’Omer Guney qu’il a passé en Allemagne.

-Avez-vous des nouveaux éléments dans ces enquêtes ?

On sait pleine de choses mais je vous rappelle que je suis tenu au secret professionnel.

-Jusqu’à quand peut-il être maintenu ce secret professionnel dans cette affaire ?

Ça va durer le temps de l’investigation. Si l’investigation est terminée en six mois, c’est fini.

– A combien de temps estimez-vous ?

Je pense que d’ici à peu-près un an, on devrait avoir les éléments complets d’enquête.

-Peut-on aujourd’hui clairement dire que les enquêteurs ont abandonné la piste du crime « passionnel » ?

Je pense qu’il y a deux services de police qui se comportent très différemment dans ce dossier: le service qui fait un vrai travail de recherches criminels et un autre service qui a plutôt une vision de mettre à jour ses archives sur les Kurdes. Mais honnêtement, la piste passionnelle est complètement abandonnée aujourd’hui de la part de tous les gens sérieux qui travaillent sur ce dossier.

-Est-ce qu’il y a des éléments sur une deuxième personne ayant impliquée dans l’assassinat des femmes kurdes ?

Honnêtement, je n’ai aucun élément sur une autre personne ayant participée au crime que la personne qui est accusée aujourd’hui.

-Au début de l’enquête, le procureur avait relevé qu’une empreinte génétique partielle découverte sur une douille n’était pas celle du suspect. Que doit-on comprendre de cette empreinte ?

-Il y a une empreinte génétique sur une cartouche. Mais, vous savez, une empreinte génétique, ça ne veut rien dire. Si vous touchez quelqu’un, vous avez l’empreinte génétique, vous n’êtes personne. Donc, il faut faire attention, à ce qu’on dit sur une empreinte génétique. Le fait qu’une empreinte génétique qu’on ne connait pas ne signifie pas qu’il y a une deuxième personne sur le lieu. Il y a une manipulation de l’arme. Elle a été passée d’une main à une autre. Et ce n’est même pas sur l’arme puisqu’on n’a pas trouvé l’arme, mais sur une douille. Pour moi, ça ne veut pas dire grande chose.

-Omer Guney n’a-t-il toujours pas fait des aveux ?

Il est bien trop professionnel pour faire des aveux. Ça c’est mon point de vue.

propos recueillis par Maxime Azadi

2013-12-15 10:04:12

actukurde.fr Article original

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