Nous célébrons aujourd’hui les 60 ans de la Constitution de notre Ve République, promulguée le 4 octobre 1958 et proclamée dès le lendemain.

Ce moment est également l’occasion de célébrer la méthode démocratique qui fut à l’origine de la révolution institutionnelle qu’elle permit à l’époque : le référendum.

Seulement dix référendums

Si ce mode d’expression populaire existe depuis la Révolution française, il n’a été soumis aux Français qu’à dix reprises soit tout juste autant que le nombre d’élections présidentielles depuis les débuts de la Ve République.

Placé au cœur de nos institutions, il n’a été que trop peu employé alors que son champ d’application a été élargi. Cette situation participe sans doute à la fracture démocratique sévère qui a conquis nos scrutins électoraux depuis plusieurs années, l’essor des votes contestataires et l’engouement croissant de nos concitoyens pour l’abstention (dont une part croissante de votes blancs ou nuls). Il devient alors urgent de rendre à ce mode d’expression toute sa place et avec lui une nouvelle perspective pour l’avenir de notre vie politique.

La grande peur des élus

Car il est manifeste que la seule évocation du référendum soulève une levée de bouclier de nos élus « egocrates » qui cèdent à la panique face aux écueils d’un référendum réduit à un scrutin plébiscitaire dont le résultat pèserait sur leur légitimité démocratique.

Ses promoteurs sont rarement bien accueillis par leurs pairs. Rappelons-nous du candidat Nicolas Sarkozy, lors de la primaire de la droite et du centre en 2017, qui promettait l’organisation de deux référendums : l’un sur l’immigration, l’autre sur la lutte contre le terrorisme. Sa proposition fut l’occasion d’entendre un certain Edouard Philippe, soutien d’Alain Juppé, brandir l’argument de l’inconstitutionnalité.

Priver les Français du référendum pour des motifs institutionnels sous la Vème République est sans doute le comble pour celles et ceux qui ont reçus des mêmes Français les pouvoirs que leur accordent nos institutions. Par le passé, l’absence de référendum a davantage divisé notre pays qu’il ne l’aurait été en posant une question claire qui appelle une réponse décisive. A titre d’exemple, la loi sur le mariage « pour tous » a laissé pourrir un clivage manichéen au détriment du fond du débat. Ce n’est certainement pas l’esprit que doit entretenir une démocratie moderne parmi ses citoyens.

Ce désamour de nos élus pour le référendum est également local. Rappelons-nous la loi Marcellin de 1971 qui prévoyait une consultation obligatoire des électeurs sous forme de référendum en cas de fusion de leur commune avec une ou plusieurs autres. Pour encourager à la simplification de notre organisation territoriale, cette condition a disparu car elle décourageait les élus locaux à s’engager dans la création d’une commune nouvelle au motif (inavoué ?) qu’elle était suspendue à la décision de leurs administrés. Céder à ce type de réflexes quasi féodal est ubuesque.

Plus de référendums pour plus de démocratie

L’ombre de la défiance des élus plane sur le sort des décisions qui mériteraient manifestement que les Français soient convoqués pour s’exprimer directement. Et la réciproque n’est que justifiée. Une déviance républicaine a mené à travestir les scrutins nationaux ou locaux qui sont désormais l’occasion de soutenir ou plébisciter une situation nationale plutôt que d’aborder les enjeux de l’élection en question.

C’est pourquoi il est indispensable de multiplier les référendums entre scrutins locaux ou nationaux afin de rendre à ces derniers leurs vocations et régler par le référendum les questions qui biaisent les véritables enjeux lors des élections locales ou nationales.

Nos exécutifs nationaux comme locaux ont tout intérêt à recourir au référendum pour présenter aux Français l’approbation d’une loi ou d’une délibération, et en particulier lorsqu’il s’agit d’enjeux majeurs qui transcendent les divisions partisanes inutiles.

Il y a 60 ans, les Français, en incorrigibles gaulois, ont largement adhéré au « big bang » institutionnel qui leur était proposé. Plus de référendum pour plus de démocratie. Voilà sans doute l’avenir pour des institutions au plus près des citoyens. L’ancien monde a manifestement encore beaucoup à enseigner au nouveau.

par Alexandre Grevet

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