Lire Unité 8200, c’est bondir. Bondir entre une base militaire à Tel-Aviv, un parking à Roissy, le hall du Grand Hôtel à Paris, l’immeuble gouvernemental à Jérusalem, un appartement de mannequins russes à Saint-Germain-des-Prés, un supermarché chinois du 13e, une piscine du 16e, Macao, Créteil…

La liste, non exhaustive, suffit à illustrer l’intention de l’écrivain Dov Alfon, qui confie : « Je voulais un roman qu’on ne peut pas lâcher, c’est peut-être le manque de confiance en lui du nouvel auteur. »

Toile sans frontière

Correspondant à Paris de Haaretz, quotidien israélien de gauche et de référence, le journaliste devenu auteur peut désormais travailler serein : le kidnapping du lecteur d’Unité 8200 a réussi – contrairement à celui, dès l’incipit, de l’impatient « startuper » débarquant de Tel-Aviv à Roissy – un choix narratif et le nœud même de l’intrigue.

En Israël, le roman a fait partie des meilleures ventes de 2016 et 2017. Sorti en France il y a quelques jours et conjointement en Allemagne, en Bulgarie… il va faire l’objet d’une adaptation en série télévisée, déjà signée, et Dov Alfon travaille déjà à une suite.

L’efficacité de son polar – un genre jugé mineur en Israël, où la tradition du récit biblique impose de toutes autres exigences à la littérature – tient peut-être à son séquençage.

Dov Alfon l’a découpé en autant de chapitres que de lieux et a démultiplié ces derniers, tissant une toile sans frontière où, durant les vingt-huit heures que dure l’intrigue, il nous promène avec une quasi-ubiquité. « Je trouve dommage que, ces dernières années, le polar soit devenu hyper local, l’intrigue se nouant dans un petit village de Suède et se tenant dans ces quatre mètres carrés, explique-t-il. J’avais la volonté profonde d’écrire un polar global. »

Fascinant fonctionnement de l’unité 8200

Mission accomplie. En choisissant deux enquêteurs de l’unité 8200 pour personnages principaux, Dov Alfon a assuré un cadre illimité à son intrigue : aucun continent n’échappe au spectre de la « 8-200 » (il faut dire ainsi afin de passer pour initié), prestigieuse section du renseignement militaire israélien qui intercepte les communications sous toutes leurs formes – ondes, satellites, courriels…

L’auteur, qui y a fait son service militaire comme officier, en montre le fascinant fonctionnement – tout comme les risibles rivalités avec d’autres divisions du renseignement – à travers la jeune lieutenante Oriana Talmor et le colonel Zeev Abadi, son aîné.

Leur duo, qui bien sûr s’écharpe, peine à percer le mystère de la disparition liminaire. Sa tâche se complique d’autant plus qu’il doit coopérer avec un commissaire français en fin de carrière, qui a la grâce de s’appeler « Léger » sans toujours l’être.

Dov Alfon n’a donc pas souscrit à la règle du commissaire solitaire, préférant scinder le point focal du récit pour le plus grand plaisir du lecteur et, parfois, son tournis.

« Il m’a semblé important de créer mon propre truc », avance-t-il, tout en déclarant un « profond respect pour le genre du polar et ses grands maîtres ».

Considérations sur la politique israélienne

Acides ou au goût du regret, les considérations sur la politique israélienne ne sont pas absentes. « Elle m’a semblé atteindre un tel point de non-retour que je me suis retrouvé avec un premier ministre dans mon roman », justifie Dov Alfon.

Un premier ministre qui n’a pas de nom mais ressemble fort au vainqueur des élections législatives israéliennes du 9 avril.

L’auteur l’entoure en effet de « consultants » et non de « conseillers », le rend sourd à l’« obsession » de certains compatriotes d’avoir un « pays normal » et lui fait traîner une épouse qui préfère payer son coiffeur avec la cassette de l’État qu’avec la sienne. I

l le dote, aussi, d’un goût prononcé pour la chose militaire, « le gilet pare-balles sur mesure, le trajet jusqu’au bunker du ministère de la défense, les motards et les armes dissimulées, la protection rapprochée ».

Rien ne dit explicitement que Benyamin Netanyahou est ce premier ministre, mais un exemplaire du roman aurait été demandé à l’éditeur par son cabinet.

Marianne Meunier

Source: lacroix.com

 

• Unité 8200 De Dov Alfon Traduit de l’anglais par Françoise Bouillot Liana Levi, 392 p., 21 €

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Chesnel

Haaretz quotidien de référence ?!? De qui vous moquez-vous ?
Cette « référence » n’est pas lue par plus de 4% des Israéliens.
C’est hélas la seule référence pour la presse occidentale qui se délecte de ce torchon anti-israélien.