Un documentaire néo-nazi fait le buzz sur Twitter

La modération de la plateforme est encore une fois à pointer du doigt.

Il s’appelle Europe The Last Battle (Europe, la dernière bataille). Vous ne le connaissez pas et c’est bien normal. Car c’est un film de propagande suédois néo nazi, très connu chez les suprémacistes et antisémites. Son contenu ne va donc pas vous étonner. C’est un documentaire révisionniste, qui prétend que les juifs ont commencé la première guerre mondiale, qui renie l’existence de l’holocauste et qui dit qu’Adolf Hitler se battait contre un complot organisé par les juifs.
Et c’est donc ce pseudo documentaire qui est en train d’être partagé sur Twitter, par des comptes de suprémacistes évidemment mais aussi des comptes certifiés. Et le problème, c’est que comme maintenant, tout le monde peut payer pour avoir son badge bleu, c’est la porte ouverte pour que n’importe qui poste n’importe quoi… et que ce n’importe quoi soit mis en avant grâce à l’algorithme. Eh oui, la magie du badge bleu ! Du coup, quand on tape Europe The Last Battle dans la barre de recherche de la plateforme, on tombe sur plusieurs liens pour regarder ce documentaire. Il y a même une personne qui l’a mis en ligne directement, autrement dit, la vidéo est hébergée par Twitter.
En plus, sous ces tweets qui propagent le documentaire néo-nazi… Il y a des pubs. Et des pubs de grandes marques. Une chercheuse universitaire sur les mouvements extrémistes a lancé un thread pour lister toutes les entreprises qui avaient des publicités associées au doc. Et il y a aussi bien Disney, que Microsoft et même le journal anglais The Telegraph. Alors je précise que ces marques en question ne sponsorisent pas les tweets. Elles n’ont pas mis d’argent spécifiquement pour le documentaire, imaginez le scandale.
Elles, leur but est de faire des campagnes de pub sur Twitter. Donc elles donnent une somme à la plateforme pour avoir des pubs un peu partout en retour et notamment les contenus qui attirent du monde. Mais elles ont quand même le choix de cibler ou non certaines catégories, et donc de filtrer. Manifestement, elles ont oublié de cocher la catégorie complotiste extrémiste. Pour l’instant aucune d’entre elles n’a réagi. Dans la liste, il y en a une cinquantaine.
Et ça pourrait bien se retourner contre Twitter si ces marques s‘aperçoivent à quoi leur nom est associé. D’autant plus que depuis l’arrivée d’Elon Musk à la tête du réseau, plus de la moitié des annonceurs se sont retirés. Et ça inclut des grandes marques comme Coca Cola ou Jeep. La cause ? Elles ne voulaient pas être affiliées à lui et à sa politique de liberté d’expression absolue sur le réseau.
Alors, il est évident que ni Disney, ni The Telegraph n’ont envie d’avoir leur nom associé à un film néo nazi. Là Musk joue clairement avec le feu. Il a tout de même licencié quasiment tous les modérateurs de la plateforme et annulé la suspension de comptes d’extrémistes notoires, donc forcément tous les débordements sont possibles. Et avec cette histoire, il pourrait encore perdre des annonceurs vu le signal qu’il envoie. Et ce qui est encore plus flippant, c’est que ce fameux documentaire soit toujours hébergé par la plateforme. En ce moment, n’importe qui peut le voir sans avoir besoin de passer par un service de vidéo. Si vous tombez dessus, n’hésitez pas à le signaler d’ailleurs.
Le documentaire est aussi sur des réseaux connus pour leur non modération comme Telegram ou sur la plateforme de vidéo Rumble, un sous Youtube interdit chez nous. Et puis en 2023, selon Wikipédia, le documentaire s’était aussi propagé sur Tiktok. Sauf que la plateforme l’a manifestement banni depuis. Quand on tape Europe The Last Battle dans le moteur de recherche, il est dit que cette phrase peut être associée à un comportement haineux. Les mesures sont plus drastiques sur la plateforme chinoise que sur Twitter.
Mais Musk sait aussi ce qu’il fait. Selon un rapport du Center of Countouring Digital Hate en réinstaurant des comptes d’extrémistes notoires, Twitter pourrait gagner des millions de dollars grâce à eux. Car malheureusement, ce sont des gens suivis, avec des grosses communautés qui poussent leurs contenus, et donc ces personnalités attirent aussi des annonceurs. En tout cas, vu les acclamations qu’Elon Musk a reçues vendredi dernier lors de sa venue à Paris, tel un gourou qui vient voir ses adeptes, l’ère Musk est bien loin d’être terminée.