«Taïwan pourra-t-elle tenir tête à la Chine?»

L’éditorial du Figaro, par Patrick Saint-Paul.

Taïwan sera-t-elle l’Ukraine de l’Asie? C’est le scénario redouté par les États-Unis. Alors que la guerre fait rage aux portes de l’Europe, ils appellent leurs alliés occidentaux à les suivre dans leur pivot asiatique pour contrer les appétits territoriaux de la Chine. La démonstration de force de Pékin dans le détroit de Formose, ce week-end, a relancé les craintes d’une reconquête par la force de l’«île rebelle». Équipée et entraînée pour une invasion de Taïwan, l’Armée populaire de libération (APL) aurait reçu l’ordre d’être prête en 2027, selon le Pentagone. Une date qui coïncide avec la fin du troisième mandat de Xi Jinping.

Ce territoire échappe au contrôle de la République populaire depuis que les troupes de Tchang Kaï-chek y ont trouvé refuge, en 1949. L’«empereur rouge» a placé la «réunification» au cœur de son projet de renaissance chinoise. Dirigeant le plus autoritaire et le plus puissant depuis Mao, Xi espère laisser une trace dans l’histoire et a juré de faire mieux que le Grand Timonier en reprenant «par tous les moyens» l’ex-Formose pendant son règne.

Surtout, Taïwan commence à faire tache dans l’horizon totalitaire du dictateur, qui a donné un nouveau tour de vis autoritaire lors du dernier congrès du PCC. Le petit dragon asiatique s’est hissé au rang de 15e puissance économique et s’est imposé comme une démocratie modèle depuis ses réformes politiques des années 1980. Il contredit ainsi la thèse de Xi selon laquelle les sociétés confucéennes sont inadaptées à la démocratie. Aura-t-il assez de souffle pour tenir tête à la Chine? Il s’inspire des Ukrainiens, qui défient les pronostics face à l’armée russe, et se prépare à affronter seul le rouleau compresseur chinois… Mais avec une aide militaire massive de Washington, mieux ciblée grâce aux leçons de la guerre en Ukraine: moins de navires et d’équipements lourds, plus de missiles pour tenir à distance l’APL. Le dragon n’est pas près de renoncer: comme pour Kiev, il y va de sa survie.

Patrick Saint-Paul. Le Figaro

 

 

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