Qui fait partie du « comité de surveillance » du cessez-le-feu et que fait-il ?
L’organisme de surveillance est dirigé par les États-Unis, qui ont placé un général de l’armée américaine et Amos Hochstein aux postes de coprésidents.
Guerres à Gaza et au Liban
La différence entre 2006, lorsque la résolution 1701 de l’ONU n’a pas été respectée, et le succès potentiel de l’accord de cessez-le-feu de la semaine dernière entre le Hezbollah et Israël réside dans la création d’un comité de surveillance international, a déclaré Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale du président américain Joe Biden.
« Ce qui rend cette fois-ci différente, c’est que les États-Unis en premier lieu, la France et d’autres alliés travaillent ensemble avec l’armée libanaise à travers un mécanisme pour s’assurer qu’il soit mis en œuvre efficacement », a déclaré Sullivan lorsqu’on lui a demandé sa confiance dans le succès du cessez-le-feu lors d’une interview sur NBC, en particulier le retrait des armes du Hezbollah au nord du fleuve Litani, stipulé dans la résolution 1701 et jamais concrétisé.
Selon le haut responsable américain, l’objectif des États-Unis est de « traverser ces premiers jours critiques, lorsque le cessez-le-feu est le plus fragile, de le faire s’imposer pleinement et, à terme, de le développer pour qu’il devienne le cessez-le-feu permanent qu’il est censé être ».
Un cessez-le-feu accompagné de davantage de violence
L’armée israélienne a poursuivi ce week-end son action contre les tentatives de violation de l’accord par le Hezbollah au sud du Liban, tandis que le comité chargé de superviser le cessez-le-feu, évoqué par Sullivan, aurait été mis en action, notamment avec l’arrivée de son coprésident, le général de division américain Jasper Jeffers.
Jeffers a rencontré vendredi le chef de l’armée libanaise, le général Joseph Aoun. Selon Nida al-Watan, ce dernier a mis en place une équipe de 12 hommes pour surveiller le cessez-le-feu entre le Hezbollah et Israël.
Le coprésident du comité de cessez-le-feu a servi lors de l’invasion américaine de l’Irak en 2003, ainsi qu’en Afghanistan et en Syrie, et travaillera aux côtés de l’envoyé américain Amos Hochstein, un ancien soldat de l’armée israélienne, jusqu’à ce que ce dernier soit remplacé par un coprésident civil permanent, selon un communiqué du CENTCOM publié samedi.
« Ce groupe aidera à la surveillance et à la mise en œuvre de la cessation des hostilités entre Israël et le Liban », explique le bref communiqué.
Le comité, composé de représentants de l’armée libanaise, de l’armée israélienne, de la France, des États-Unis et de la FINUL – qui avec la France a été inexistant – est chargé de déterminer si l’une ou l’autre des parties au conflit est autorisée à riposter à une violation, qui doit d’abord être signalée au comité, selon une source de l’armée libanaise.
Mais Israël s’est réservé le droit d’agir immédiatement dès l’apparition d’une violation par le Hezbollah de l’accord, pour ne pas se perdre dans un dialogue de sourd notamment avec la France. C’est en vertu de ce droit qu’Israël agit à chaque violation comme cela a été le cas.
« Lorsque le cessez-le-feu est violé, le comité prend des mesures immédiates », ont-ils déclaré à L’Orient Today. « Si l’armée libanaise choisit de ne pas réagir, le comité agira quand même », a précisé la source, sans préciser la nature de ces actions. C’est justement pour éviter ces tergiversations qu’Israël agira de son plein grée.
L’un des 13 points
La création de ce comité est l’un des 13 points qui composent les détails de la trêve convenue entre le Hezbollah et Israël et entrée en vigueur mercredi. Le cessez-le-feu se base sur la résolution 1701, adoptée pour mettre fin à la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël et qui stipule que seules l’armée libanaise et la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) dont on connait l’innéfficacité dans les deux cas, peuvent opérer au sud du fleuve Litani.
Comme l’avait indiqué le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou en déclarant que la durée du cessez-le-feu dépendrait « de ce qui se passera au Liban ». « Nous maintenons une totale liberté d’action militaire », a-t-il ajouté : « Si le Hezbollah viole l’accord et tente de se réarmer, nous attaquerons ». L’armée israélienne agira en conséquence » de l’accord dans le sud du Liban, se disant toutefois « en état de préparation défensive élevé », en cas de « violation de l’accord de cessez-le-feu ».
La trêve de mercredi, négociée par les États-Unis et la France, a débuté à 4 heures du matin, heure locale, quelques heures après que le cabinet israélien l’a approuvée par 10 voix contre une.
Le Hezbollah et Israël sont engagés dans un conflit depuis plus de 13 mois en parallèle de la guerre à Gaza. Près de 4 000 terroristes ont été tuées et près de 16 000 blessées par les attaques israéliennes au Liban depuis octobre 2023, selon le ministère de la Santé.
La FINUL et l’ambassade des Etats-Unis n’ont pas répondu aux demandes de commentaires de L’Orient Today. L’ambassade de France a déclaré qu’elle n’était pas en mesure de fournir dans l’immédiat des « détails techniques ».
Le Hezbollah et Israël au lendemain de l’accord
Kassem Kassir, un analyste proche du Hezbollah, a déclaré à L’Orient Today que le parti « a accepté l’accord de cessez-le-feu, y compris le comité, et surveillera le travail du comité face aux agressions israéliennes ».
Selon la chaîne de télévision Al-Hurra, les Etats-Unis ont récemment déclaré à Israël que le comité « ne se limitera pas à recevoir les plaintes de l’une des parties, mais assurera un suivi actif par divers moyens, garantissant ainsi le respect de l’accord ».
Plusieurs violations de l’accord de cessez-le-feu ont eu lieu depuis son entrée en vigueur. Jeudi et vendredi, des bombardements d’artillerie israéliens ont ciblé des villages frontaliers libanais, quand des terroristes du Hezbollah sont entrés dans la zone, une frappe aérienne israélienne a visé le village de Tebna (district de Saida) lors d’un transfert d’armes, situé au nord du fleuve Litani, et des bulldozers israéliens ont rasé plusieurs bâtiments et arraché des oliviers servant d’abris aux terroristes.
Samedi soir, l’armée israélienne a tiré des obus d’artillerie sur Khiam (Marjayoun). Elle a également ciblé les villages d’Ebel al-Saqi, Arnoun et Yohmor, dans le sud du pays, et a bombardé Yaroun à deux reprises.
Dimanche, un char de l’armée israélienne a tiré depuis Khiam sur la vallée d’Ebel al-Saqi, a fait exploser un bâtiment à Khiam et a détruit au bulldozer une maison à Maroun al-Ras. On ignore encore si la commission prendra des mesures suite à ces actions de dissuasion du Hezbollah
Litiges autour de la composition des comités
Mardi, la chaîne de télévision locale Al-Jadeed a rapporté que la Grande-Bretagne et l’Allemagne avaient été exclues du comité après que le Liban eut refusé leur participation. Ces pays sont considérés par le Hezbollah comme favorables à Tel-Aviv.
Avant l’annonce du cessez-le-feu, Israël a tenté en vain d’exclure la France du comité, malgré le rôle crucial joué par Paris dans la négociation de l’accord. Cette demande israélienne est liée à la décision de la Cour pénale internationale (CPI) du 21 novembre d’émettre des mandats d’arrêt pour « crimes contre l’humanité et crimes de guerre » contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. Les tensions se sont intensifiées après que la France a souligné son « engagement en faveur du travail indépendant de la CPI » à la suite de cette décision.
Cependant, quelques heures après la signature de l’accord de cessez-le-feu au Liban, le ministère français des Affaires étrangères a publié un communiqué soulignant qu’il fallait tenir compte du fait qu’Israël n’est pas signataire du Statut de Rome, ce qui signifie que Netanyahu et Gallant ont droit à l’immunité contre les mandats d’arrêt émis par la CPI. Une source israélienne, citée par Haaretz, a déclaré que la nouvelle déclaration de la France concernant la décision de la CPI faisait partie des exigences israéliennes lors des négociations de cessez-le-feu entre le Hezbollah et Israël.
La France n’est pas indépendante dans cette affaire, elle reste sous l’autorité des Etats-Unis.
Pendant ce temps, le gouvernement libanais a tenté, sans succès, d’inclure un pays arabe dans le comité. Finalement, les deux parties ont fait des concessions pour parvenir à un accord, sans qu’aucun pays arabe, ni l’Allemagne ou le Royaume-Uni ne soient inclus.
Les pays occidentaux avaient déjà évoqué l’idée de déployer des forces internationales au Liban – en plus de la FINUL – dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu. Cependant, Kassir a déclaré que cela était peu probable, car la FINUL et ses conseillers peuvent être utilisés à la place. Le président américain Joe Biden a également affirmé catégoriquement que des soldats américains ne seraient pas déployés dans le sud du Liban lors d’un discours prononcé à la suite de l’approbation de l’accord. Ce point a été réitéré par Sullivan dans son interview sur NBC.
Plus le temps passe jusqu’à l’arrivée officielle de Donald Trump au pouvoir, moins le Hezbollah et ses alliés libanais auront de marges de manoeuvre.
JForum.fr & LOLJ
Comme d’habitude : à minima, rien et au mieux, il aide le hezb.h