L’islam et la France vus par Crémieux et De Gaulle

 

Le 24 Octobre 1870, voilà donc 150 ans, un décret promulgué à Tours donne la nationalité française à 37 000 juifs d’Algérie, mais un autre décret prévoyait que les musulmans d’Algérie soient ravalés au statut d’indigènes. Il s’agit de l’une des premières décisions prises par le gouvernement de la IIIème République. C’est le début d’une fracture douloureuse de plusieurs décennies entre les français, les juifs et les musulmans.

 

Cette distinction entre Juifs et musulmans reposait sur la possibilité d’assimilation des Juifs et des musulmans. À cette époque déjà, il était apparu que l’assimilation et non l’intégration des musulmans était chose impossible. Les évènements actuels justifient cette position et le rejet des lois de la république par une partie importante des musulmans le démontre.

 

Les jeunes musulmans français se disent plus radicaux que leurs aînés : c’est l’un des enseignements du sondage Ifop publié le 2 septembre 2020, pour Charlie Hebdo et la Fondation Jean-Jaurès. À la question : « Faites-vous passer vos convictions religieuses avant les valeurs de la République ? », 74 % des Français musulmans de moins de 25 ans affirment mettre l’islam avant la République, alors qu’ils sont 25 % pour les 35 ans et plus. 74 % des Français musulmans de moins de 25 ans affirment mettre l’islam avant la République, alors qu’ils sont 25 % parmi les 35 ans et plus selon un sondage Ifop. Les droitdelhommistes et les islamo-gauchistes parleront de racisme des Français à l’égard des musulmans, voire d’islamophobie. Les centaines d’attentats dans le monde perpétrés par des musulmans, s’ajoutant aux discours de haine, à l’encontre des Juifs et de l’Occident sont ignorés. Seules sont prises en compte les différentes formes de  « victimisation » fictionnelles que la société française par ses contingences sociales et économiques infligerait à l’encontre des seuls musulmans de France épargnant les autres communautés.

 

Isaac Adolphe Crémieux est l’un des leaders républicains de l’époque et est un farouche opposant à Napoléon III. Il est le fils d’un commerçant juif de Nîmes et est l’un des rares personnages de son époque issu d’une classe populaire qui parvint à accéder dans les hautes sphères de l’État. Devenu juriste, il entra rapidement dans la franc-maçonnerie qui l’aida à accéder dans le monde politique. En 1860, il participa à la création de l’Alliance Israélite Universelle dont il fut également le dirigeant, et qui avait pour objectif de protéger les Juifs à travers le monde, tout en créant un réseau d’écoles francophones afin de favoriser leur ascension sociale. A l’aube de la IIIème République, il parvint au poste de ministre de la justice et fut à l’initiative de la loi qui porte son nom.

L’Algérie : du royaume à la colonie. 

 

Les années 1860 marquent la fin de la conquête par la France de ce qu’on appelle aujourd’hui l’Algérie. L’empereur Napoléon III, au pouvoir à cette époque, préconise l’instauration d’un royaume arabe sous protectorat français, un peu comme il en ira plus tard avec le royaume du Maroc. Lui-même aurait eu le titre de «roi des Arabes». Par ailleurs, il souhaite stabiliser cette région, qui n’est pas catholique comme la France, mais qui s’avère musulman.

Par le senatus-consulte (décret impérial) du 14 juillet 1865, les trois musulmans d’Algérie peuvent demander à « jouir des droits de citoyen français » et à bénéficier de la « qualité de citoyen français », sans qu’il leur soit nécessaire de renoncer à la loi coranique : «L’indigène musulman est Français, néanmoins il continuera d’être régi par la loi musulmane. Il peut sur sa demande être admis à jouir des droits du citoyen ; dans ce cas il est régi par les lois civiles et politiques de la France».

Ce décret fut très apprécié des locaux d’Algérie qui étaient désormais considérés comme des Français à part entière, et Napoléon III jouissait alors d’une grande popularité sur le territoire Nord-Africain. Et par l’intermédiaire de ce même décret, les 250 000 étrangers résidents en Algérie depuis plus de 3 ans ainsi que les 30 000 juifs algériens pouvaient aussi obtenir la nationalité française. Mais ce décret subit deux oppositions: l’Eglise Catholique qui refusait que des musulmans puissent devenir français, au même titre que les membres de leur confession; et les Républicains en particulier ceux de gauche, qui sont les plus ardents opposants à Napoléon III et qui n’acceptaient généralement pas la politique de l’empereur au sein du monde arabe.

Le début d’une clairvoyance.

 

 

La IIIème République qui succède au Second Empire va supprimer les articles principaux au sénatus-consulte du 14 juillet 1865 qui octroyait la citoyenneté aux musulmans. Désormais, ceux-ci n’étaient plus considérés comme français. La loi mentionne les musulmans comme des indigènes qui ne pouvaient plus accéder à la citoyenneté, sauf en réunissant les conditions ci-dessous. Cependant, ces conditions étaient particulièrement difficiles à obtenir puisqu’il ne faut pas oublier qu’à cette époque, la grande majorité de ces « indigènes » n’avaient pas de papiers et vivaient en tribus. Par ailleurs, le peu de chanceux qui parvinrent à accéder à la naturalisation faisaient l’objet d’un casier judiciaire, à l’égal des délinquants et des criminels.

Voici l’extrait du décret n° 137 qui correspond au sujet :

« N°137. – DÉCRET sur la Naturalisation des Indigènes musulmans et des Étrangers résidant en Algérie du 24 Octobre 1870. LE GOUVERNEMENT DE LA DÉFENSE NATIONALE DÉCRÈTE :

 

ART. 1er. La qualité de citoyen français, réclamée en conformité des articles 1er et 3 du sénatus-consulte du 14 juillet 1865, ne peut être obtenue qu’à l’âge de vingt et un ans accomplis. Les indigènes musulmans et les étrangers résidant en Algérie qui réclament cette qualité doivent justifier de cette condition par un acte de naissance; à défaut, par un acte de notoriété dressé sur l’attestation de quatre témoins, par le juge de paix ou le cadi du lieu de résidence, s’il s’agit d’un indigène, et par le juge de paix, s’il s’agit d’un étranger. 

 

ART.2. L’article 10, paragraphe 1er du titre III, l’article 11 et l’article 14, paragraphe 2 du titre IV du décret du 21 avril 1866, portant règlement d’administration publique sont modifiés comme il suit :

 

« Titre III, article 10, paragraphe 1er : L’indigène musulman, s’il réunit les conditions d’âge et d’aptitude déterminées par les règlements français spéciaux à chaque service, peut être appelé, en Algérie, aux fonctions et emplois de l’ordre civil désigné au tableau annexé au présent décret. 

 

« Titre III, article 11 : L’indigène musulman qui veut être admis à jouir des droits de citoyen français doit se présenter en personne devant le chef du bureau arabe de la circonscription dans laquelle il réside, à l’effet de former sa demande et de déclarer qu’il entend être régi par les lois civiles et politiques de la France.

 

En clair, il refuse la suprématie du Coran sur les lois de la République, ce qui est en cause de nos jours. Et ce que les islamo-gauchistes appellent racisme.

 

« Il est dressé procès-verbal de la demande et de la déclaration.

 

« Article 14, paragraphe 2 : Les pièces sont adressées par l’administration du territoire militaire du département au gouverneur général »

ART.3. Le gouverneur général civil prononce sur les demandes en naturalisation, sur l’avis du comité consultatif.

ART.4. Il sera dressé un bulletin de chaque naturalisation en la forme des casiers judiciaires. Ce bulletin sera déposé à la préfecture du département où réside l’indigène ou l’étranger naturalisé, même si l’individu naturalisé réside sur le territoire dit Territoire militaire.

 

ART.5. Sont abrogés les articles 2, 4, 5 du sénatus-consulte du 14 juillet 1865, les articles 13, titre IV, et 19, titre VI, intitulé : Dispositions générales, du décret du 21 avril 1866. Les autres dispositions desdits sénatus-consulte et décret sont maintenues.

 

Fait à Tours, en Conseil de Gouvernement, le 24 octobre 1870.

 

Signé AD. CRÉMIEUX, L. GAMBETTA, AI. GLAIS-BIZOIN, L. FOURICHON. »

 

Voici ce qu’on peut retenir dans ce décret  :

– Pour l’ART. 1, les étrangers et indigènes musulmans doivent fournir un acte de naissance ou un acte notarié pour espérer obtenir la citoyenneté (le verbe employé est « réclamer  » et non « recevoir »). Or il faut se mettre dans le contexte de l’époque. En 1870, les indigènes musulmans vivaient, pour la plupart, encore à l’intérieur de différentes tribus. Peu d’habitants de ces tribus ne possédaient d’acte de naissance. Quant à l’acte de notoriété, il est difficile à obtenir car c’est un document par lequel un officier public recueille des témoignages en vue de d’établir une circonstance ou un fait matériel qu’un nombre de personnes ont pu constater, dont ils ont pu avoir connaissance ou qui leur ont semblé avérés. Autrement dit, c’est un officier public qui se base d’après des témoignages, sachant qu’ils peuvent être vrai ou faux.

NDLR – La crainte était bien que le don de cette nationalité était porteur d’un double danger. Le premier portait sur les risques démographiques, le second sur la sincérité de l’engagement à privilégier les lois de la République

Par conséquent, l’officier public émet son avis sur la possibilité d’un demandeur à obtenir la citoyenneté. Si la demande est acceptée, l’indigène musulman majeur ne devient pas pour autant français, car il doit émettre d’autres conditions.

Mais en ce qui concerne le Titre III, article 11, il doit ensuite effectuer une demande auprès du chef du bureau arabe de la circonscription dans laquelle il réside, tout en jurant de vouloir être régi par la législation française. Par conséquent, il devait reléguer la loi coranique au second plan.

Il était donc très difficile pour un indigène musulman d’obtenir la citoyenneté, alors que les autres avaient moins de condition à remplir. Par ailleurs, les Républicains au pouvoir, surtout ceux de gauche tels que Jules Ferry, souhaitaient peupler l’Algérie de colons afin de « civiliser » la région. Par conséquent, une naturalisation massive et automatique portant sur les étrangers d’Algérie est promulguée le 26 juin 1889.

De plus, Isaac Adolphe Crémieux voulait que les juifs puissent avoir la nationalité française et va réaliser son souhait par l’intermédiaire du décret n°136 de la loi du 24 octobre 1870 : « B. n°8 – 109 – RÉPUBLIQUE FRANÇAISE N° 136. – DÉCRET qui déclare citoyens français les Israélites indigènes de l’Algérie. Du 24 Octobre 1870

 

LE GOUVERNEMENT DE LA DÉFENSE NATIONALE DÈCRÈTE:

Les Israélites indigènes des départements de l’Algérie sont déclarés citoyens français; en conséquence, leur statut réel et leur statut personnel seront, à compter de la promulgation du présent décret, réglés par la loi française, tous droits acquis jusqu’à ce jour restant inviolables. Toute disposition législative, tout sénatus-consulte, décret, règlement ou ordonnances contraires, sont abolis. 

 

Fait à Tours, le 24 Octobre 1870. 

 

Signé AD. CRÉMIEUX, L. GAMBETTA, AI. GLAIS-BIZOIN, L. FOURICHON. » 

 

Ce décret était unique en Europe puisque aucune autre puissance de l’époque n’avait établi ce type de loi. Quant aux juifs d’Algérie, la tradition raconte qu’une partie d’entre-eux y étaient présents depuis le VIème siècle et la première diaspora. Ils étaient d’ailleurs à l’origine d’une langue aujourd’hui disparue, le judéo-berbère. D’autres viennent d’Espagne et ont été chassés de ce pays au XVème siècle, au moment de l’Inquisition. D’ailleurs, les Juifs d’Afrique du Nord prirent le nom de sépharades après cette période (d’après le nom de l’Espagne en langue hébraïque). Cependant, après le décret Crémieux, les colonisés musulmans, les « indigènes », vont assimiler les Juifs avec les colons européens, ce qui va engendrer un motif de rupture entre les peuples de confessions différentes.

 

Une loi lourde de conséquences

 

Dès l’année suivante, encouragé par la défaite de la France face à la Prusse, un notable musulman, le bachagha El Mokrani, va provoquer un grand soulèvement de 250 tribus contre le gouvernement de la République Française. Cette révolte conduit le 8 avril 1871 à la proclamation de la guerre sainte par le grand maître d’une confrérie musulmane d’Algérie, Cheikh El-Haddad. Ce dernier annonça sa volonté d’obtenir une « extermination des français » au cours d’une prière. C’est un tiers de la population musulmane qui va alors entrer en rébellion contre le gouvernement. Effrayé par la situation en Algérie, le chef du gouvernement provisoire, Adolphe Thiers, dépose le 21 juillet 1871 un projet d’abrogation du décret Crémieux. Cependant, celui-ci est repoussé sous la pression du richissime banquier juif Alphonse de Rothschild. La révolte va se terminer avec la répression de l’État Français contre des mouvements armées locaux. Les instigateurs de la révolte sont jugés entre le 10 mars et le 21  avril 1873 et plusieurs partisans furent déportés ou emprisonnés.

NDLR – Sous une autre législation, ils n’auraient pas survécu

Vis-à-vis de cette loi, les français sont divisés.  Mais parmi ces divisés, deux formes de racisme vont alors émergés : l’anti-musulman et l’anti-juif. Ces deux sentiments vont se renforcer durant toute la IIIème République, essentiellement à cause de divers scandales tels que le Scandale de Panama, l’Affaire Dreyfus et l’Affaire Stavisky. Entre temps, le Code de l’indigénat établie en Algérie le 28 juin 1881 détériore un peu plus les conditions de vie des indigènes musulmans. De manière générale, ce code les assujettissait aux travaux forcés, aux réquisitions (notamment des terres), à des impôts spéciaux ou à l’interdiction de circuler la nuit. Les colons européens étaient divisés sur les conditions discriminatoires à l’encontre des musulmans et le statut favorable accordé aux juifs. Ils vont même élire, en 1898, Edouard Drumont, éditeur du journal antisémite La Libre Parole, comme député d’Alger.

Après la loi Crémieux.

 

Jusque dans les années 1930, les tensions vont s’atténuer entre les musulmans et les juifs, mais elles perdurent malgré tout en Algérie. Afin d’y mettre à terme, le maréchal Pétain va abroger la loi de 1870 par l’intermédiaire de Marcel Peyrouton. Ainsi, un certain nombre de juifs qui ont obtenu la nationalité française selon la loi Crémieux se l’ont vu retirés. Cette décision s’avère antisémite, même si certains Juifs qui avaient reçu la croix de guerre, suite à leur participation dans la Première Guerre Mondiale, durant la Guerre du Rif ou (et) dans la guerre 1939-40, avaient gardé la citoyenneté (loi du 7 octobre 1940).

Par ailleurs, en supprimant la loi Crémieux, les musulmans ne sont plus considérés comme des indigènes, même s’ils ne récupèrent pas non plus la nationalité française accordée en 1865.

Après la libération, le gouvernement provisoire de Charles de Gaulle redonne la nationalité à tous les juifs d’Algérie. De plus, les naturalisations sont accordées à des étrangers qui ont participé à la résistance et à la libération. Puis, grâce au député sénégalais Lamine Gueye, la loi du 7 mai 1946 donne la nationalité française à tous les ressortissants d’outre-mer, y compris d’Algérie. Cependant, de Gaulle s’opposa à cette loi. Il était soucieux de la préservation de la culture chrétienne. La directive du 12 Juin 1945, envoyée par de Gaulle au garde des sceaux, en est la preuve: « Sur le plan ethnique, il convient de limiter l’afflux des Méditerranéens et des Orientaux, qui ont depuis un demi-siècle profondément modifié les compositions de la population française. Sans aller jusqu’à utiliser, comme aux Etats-Unis, le système rigide des quotas, il est souhaitable que la priorité soit accordée aux naturalisations nordiques (Belges, Luxembourgeois, Suisses, Hollandais, Danois, Anglais, Allemands, etc.). » (Cité dans Plein Droit, n° 29-30, novembre 1995).

Le racisme de De Gaulle..

Si l’antisémitisme semblait avoir diminué après la guerre, la discrimination envers les musulmans perdure et le conflit civilisationnel sera l’élément principal qui fera éclater la Guerre d’Algérie, en 1954. La politique de naturalisation souhaitée par de Gaulle sera conservée jusqu’en 1958 … et son retour au pouvoir. Une fois au pouvoir, il expliqua souhaiter que tous les musulmans puissent accéder à la nationalité française, action déjà initiée depuis la loi du 7 mai 1946 (à laquelle il était auparavant opposé) et annonce à Alger une phrase qui est encore célèbre aujourd’hui : « En Algérie, il n’y a qu’une catégorie d’habitants, il n’y a que des français à part entière. » Malgré tout, les confidences de de Gaulle vont prouver que celui-ci ne souhaitait pas que la communauté islamique d’Algérie obtienne la nationalité française. L’avocat du maréchal Pétain, Jacques Isorni, avait déjà repéré une vision nationale chez de Gaulle puisque celui-ci aurait dit : « Ils vous intéressent, vous, ces Mohammed et ces Fernandez ? » (cité par Jacques Isorni, Lui qui les juge, Flammarion, 1961). Par ailleurs, celui que beaucoup considèrent comme un héros va déclarer le 5 mars 1959 : « C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. […] Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés avec leurs turbans et leur djellabas, vous voyez bien que ce ne sont pas des Français ! Ceux qui prônent l’intégration ont une cervelle de colibri, même s’ils sont très intelligents. Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se séparent de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront peut-être vingt millions et après-demain quarante ? Si nous faisions l’intégration, si tous les Arabes et les Berbères d’Algérie étaient considérés comme français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Eglises mais Colombey-les-Deux-Mosquées ! » (cité par le ministre Alain Peyrefitte dans C’était de Gaulle, Editions de Fallois, 1994, Tome 1, p. 52, et par Benjamin Storfa, Le transfert d’une mémoire, Editions de La découverte, 1999).

En réalité, dans cette citation, le chiffre de dix millions annoncé par le général n’est pas le nombre de musulmans, mais le nombre d’Algériens. Cela signifie qu’il faisait un amalgame entre les Algériens et les musulmans d’Algérie qui étaient, certes majoritaires, mais pas unanimes. Quoi qu’il en soit, le président français refuse l’intégration des musulmans, mais également n’envisageait pas l’assimilation.

NDLR Près de 70 ans plus tard la vision du Générale de Gaulle est en partie vraie. Ni intégration, encore moins assimilation n’ont été possibles, même souhaitables par les parties.

Le fils de Charles de Gaulle, Philippe, tentera de justifier les pensées de son père dans son oeuvre De Gaulle, mon père (Plon, 2003, p. 433) : « Si une communauté n’est pas acceptée, c’est qu’elle ne donne pas de bons produits, sinon elle est admise sans problème. Si elle se plaint de racisme à son égard, c’est parce qu’elle est porteuse de désordre. Quand elle ne fournit que du bien, tout le monde lui ouvre les bras. Mais il ne faut pas qu’elle vienne chez nous imposer ses moeurs. »

 

Philippe De Gaulle n’avait pas oublié les mises en garde contenus dans le décret de la loi Crémieux à l’encontre les musulmans, au point d’affirmer que ce sont ces derniers qui n’avaient pas voulu s’intégrer. Cependant, cette pensée illustre l’opinion générale des Français qui croyaient que les habitants d’Algérie n’avaient jamais souhaité s’intégrer, et que c’est cette raison qui les avaient incité à se révolter.

Son père, Charles, ira jusqu’à dire : « L’intégration, c’est une entourloupe pour permettre que les musulmans qui sont majoritaires en Algérie à dix contre un, se retrouvent minoritaires dans la République française à un contre cinq. C’est un tour de passe-passe puéril ! On s’imagine qu’on pourra prendre les Algériens avec cet attrape-couillons ? Avez-vous songé que les Arabes se multiplieront par cinq, puis par dix, pendant que la population française restera presque stationnaire ? Il Y aurait deux cents, puis quatre cents députés arabes à Paris ? Vous voyez un président arabe à l’Élysée ? » (Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, Fallois, 1994, Tome 1, page 56).

Plus tard, il ajoutera « Et puis, Delbecque, vous nous voyez mélangés avec des Musulmans ? Ce sont des gens différents de nous. Vous nous voyez mariant nos filles avec des Arabes ? » (cité par Jean-Raymond Tournoux, La tragédie du Général, Plon, 1967). Au député UNR Raymond Dronne, ancien combattant de la libération de Paris, il déclara « Voulez-vous être bougnoulisés ? Voyons, Dronne ! Donneriez-vous votre fille à marier à un bougnoule ? » (Jean-Raymond Tournoux, La tragédie du Général, Plon, 1967 et cité dans Le Petit de Gaulle illustré, Editions le Crapouillot, 1967). Il se plaira même à falsifier l’histoire : « Qu’est-ce que les Arabes ? Les Arabes sont un peuple qui, depuis les jours de Mahomet, n’ont jamais réussi à constituer un État […] Avez-vous vu une digue construite par les Arabes ? Nulle part. Cela n’existe pas. Les Arabes disent qu’ils ont inventé l’algèbre et construit d’énormes mosquées. Mais ce fut entièrement l’œuvre des esclaves chrétiens qu’ils avaient capturés […] Ce ne furent pas les Arabes eux-mêmes […] Ils ne peuvent rien faire seuls. » (Cité par Cyrus Sulzberger, Les derniers des géants, Éditions Albin Michel, 1972). Il reprendra le même type de discours : « Les Arabes, ce n’est rien. Jamais on n’a vu des Arabes construire des routes, des barrages, des usines… Ce sont d’habiles politiques. Ils sont habiles comme des mendiants. » (Cité par Jean-Raymond Tournoux, La tragédie du Général, Plon 1967).

Il faut savoir que plusieurs de ces propos racistes sont répétés un certain nombre de fois par divers témoins et auteurs. Ainsi, Pierre Laffont, député d’Oran, rapporte les propos du proclamé Général tenus le 29 avril 1959, qui illustre sa conception raciale bien au-delà de la question de l’intégration : « L’intégration, c’est une foutaise, une fumisterie, et ceux qui la préconisent sont des jean-foutre! Les Musulmans ne sont que des clochards dont la France n’a pas à s’embarrasser! Mais enfin, vous n’imaginez pas qu’un jour, un Arabe, un Musulman puisse être l’égal d’un Français! Voyons, c’est impensable! Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre! Agitez la bouteille! Au bout d’un moment, ils se séparent de nouveau! Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français! Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de Musulmans, qui demain seront vingt millions et après- demain quarante? Si tous les Arabes, tous les Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en Métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé? Mon village ne s’appellerait plus Colombey les Deux Églises, mais Colombey les Deux Mosquées! Avez-vous songé que les Arabes se multiplieront par cinq, puis par dix, pendant que la population française restera stationnaire? Il y aurait deux cents, puis quatre cents députés Arabes à Paris? Vous voyez un président Arabe à l’Élysée? […] Et quand aux autres territoires! On a prétendu faire des Nègres de bons Français! C’est beau l’égalité, mais ce n’est pas à notre portée. Vouloir que toutes les populations d’outre-mer jouissent des mêmes droits sociaux que les Métropolitains, d’un niveau de vie égal, ça voudrait dire que le nôtre serait abaissé de moitié! Qui y est prêt? Alors, puisque nous ne pouvons pas leur offrir l’égalité, il vaut mieux leur donner la liberté: Bye-bye, vous nous coûtez trop cher! »  (Alain Peyrefitte, C’était De Gaulle, Fallois, 1994, Tome 1, p. 55 ; Pierre Laffont, Missions et actions secrètes en Algérie, Editions Trésor du Patrimoine, 1999, p. 7). Plus tard, au cours d’un entretien avec Jacques Foccart, il dira à propos des noirs : « Vous savez, cela suffit comme cela avec vos nègres. Vous me gagnez à la main, alors on ne voit plus qu’eux : il y a des nègres à l’Élysée tous les jours, vous me les faites recevoir, vous me les faites inviter à déjeuner. Je suis entouré de nègres, ici. […] Et puis tout cela n’a aucune espèce d’intérêt ! Foutez-moi la paix avec vos nègres ; je ne veux plus en voir d’ici deux mois, vous entendez ? Plus une audience avant deux mois. Ce n’est pas tellement en raison du temps que cela me prend, bien que ce soit déjà fort ennuyeux, mais cela fait très mauvais effet à l’extérieur : on ne voit que des nègres, tous les jours, à l’Élysée. Et puis je vous assure que c’est sans intérêt. «  (Entretiens avec Jacques Foccart, 8 novembre 1968, Journal de l’Élysée, Tome 2 : Le Général en mai (1968-1969), Fayard-Jeune Afrique, 1998). Celui-ci se montre même nostalgique d’une Europe de Blancs. Voici ce qu’il a dit au général Koening : « Evidemment, lorsque la monarchie ou l’empire réunissait à la France l’Alsace, la Lorraine, la Franche-Comté, le Roussillon, la Savoie, le pays de Gex ou le Comté de Nice, on restait entre Blancs, entre Européens, entre chrétiens… Si vous allez dans un douar, vous rencontrerez tout juste un ancien sergent de tirailleurs, parlant mal le français. » (Cité par Jean-Raymond Tournoux, La tragédie du Général, Plon, 1967).

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A travers ces discours, Charles De Gaulle explique sa vision personnelle et raciste. C’est sans doute cette pensée qui l’incita à retirer l’Algérie de la France. Selon lui, les natifs d’Algérie ne doivent pas être français, et cela sans prendre en compte que de nombreux musulmans avaient versé leur sang pour le drapeau français lors de différents conflits. Par ailleurs, il se révéla très méprisant envers les élus d’Algérie qu’il recevra le 20 janvier 1960. Il leur sort : « l’intégration est une connerie, d’ailleurs l’armée ne fait que des conneries […]. Les magistrats des tribunaux militaires sont des incapables et des médiocres, ils font une répression sans nuances. »  La répression en Algérie n’est donc pas assez grande selon lui. Au député Laradji, il lui déclara : « Les musulmans ne seront jamais des français ». Puis à Lauriol: « Voyons, ce ne sont pas des français ces gens là ». Laradji, qui a eu dix membres de sa famille assassinés par le FLN insiste et déclare que sa politique va faire souffrir les algériens pro-français. De Gaulle réplique : « Hé bien, vous souffrirez ». Les élus sont dépités et cet entretien qui fit le tour d’Alger, engendrant une immense colère au sein de la population, notamment chez les pieds noirs et les harkis. Au soir des Accords d’Evian en mars 1962, il sortira à son ministre Louis Joxe : « Alors, Joxe, vous avez bientôt fini avec vos bicots ? » (Cité dans Le Petit de Gaulle illustré, Le Crapouillot, 1967-68). Il disait également :« Tous ces bicots se chamaillent. Ils aiment les fusils, ils aiment s’en servir. Ils ont la manie de la  fantasia » (Cité par Jean Rémond Tournoux, La tragédie du Général, Plon 1967). De plus, le 7 mai 1963, lors d’un conseil des ministres, De Gaulle explique à ses proches la situation sur l’immigration : « J’attire votre attention sur un problème qui pourrait devenir sérieux. Il y a eu 40 000 immigrants d’Algérie en avril. C’est presque égal au nombre de bébés nés en France pendant le même mois. J’aimerais qu’il naisse plus de bébés en France et qu’il y vienne moins d’immigrés. Vraiment, point n’en faut ! Il devient urgent d’y mettre bon ordre! » (Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, Tome 1, Fallois, 1994). Par ailleurs, n’oublions pas que dans le budget de 1959, De Gaulle fera diminuer les pensions accordées aux anciens combattants d’Afrique du Nord et des colonies. Ensuite, il promulguera la loi dîte de «cristallisation» le 26 décembre 1959. Pour information, les anciens combattants du Maghreb, d’Afrique noire, de Madagascar et d’Asie toucheront une pension parfois huit fois inférieure à celles des nationaux français. Actuellement, il est de 80 euros par mois pour un ancien goumier marocain ou algérien, 150 euros pour un ex-tirailleur sénégalais, contre environ 600 euros pour un Français.

 

La Vème République française, complice du massacre des harkis ?

Il est temps de mettre fin à une ignorance d’Etat dont les politiciens français font preuves. Il ne fait absolument aucun doute que les gouvernements français sous De Gaulle étaient complices du génocide à l’encontre des harkis mené par le Front de Libération Nationale en Algérie. Premièrement, le président de la République ordonna lui-même de « se débarasser » des Harkis en des termes insultans. Le 3 avril 1962, lors d’une conférence du comité des affaires algériennes, de Gaulle déclara : « il faut se débarrasser sans délai de ce magma d’auxiliaires qui n’ont jamais servi à rien ».

Voici un télégramme prouvant que des officiers voulant sauver des harkis ont été sanctionnés, c’est-à-dire la note de service n° 1334/MA/CAB/DIR du 12 mai 1962 signée par Pierre Messmer et envoyée par lui-même au commandant supérieur à Réghaia en Algérie : « Il me revient que plusieurs groupes d’anciens harkis seraient récemment arrivés en métropole. Stop. Je vous communiquerai dès qu’ils seront en ma possession renseignements précis sur l’importance et origine ces groupes ainsi que, si possible, sur responsable leur mise en route. Stop. […} Dès maintenant toutefois je vous prie : Primo- d’effectuer sans délai enquête en vue déterminer conditions départ d’Algérie de ces groupes incontrôlés et sanctionner officiers qui pourraient en être à l’origine. Stop. Informer vos subordonnés que, à compter du 20 mai, seront refoulés en Algérie tous anciens supplétifs qui arriveraient en métropole sans autorisation de ma part, accordée après consultation départements ministériels intéressés ». Le document est notamment visible sur ce lien http://pagesperso-orange.fr/jean-francois.buigues/Auteur.htm) et présent dans l’ouvrage de Florian Meyer, (Pour l’honneur… avec les harkis, de 1958 à nos jours, CLD Editions, p. 156). Et le même jour, le ministre des Affaires algériennes du 22 novembre 1960 au 28 novembre 1962, Louis Joxe, annonce le renvoi en Algérie des « supplétifs débarqués en métropole en dehors du plan général de rapatriement » tout en demandant « d’éviter de donner la moindre publicité à cette mesure », dans une note ( n°1676 du 12 mai 1962) : « Les renseignements qui me parviennent sur les rapatriements prématurés de supplétifs indiquent l’existence de véritables réseaux tissés sur l’Algérie et la métropole dont la partie algérienne a souvent pour origine un chef de SAS […]. Vous voudrez bien faire rechercher, tant dans l’armée que dans l’administration, les promoteurs  et les complices de ces entreprises et faire prendre les sanctions appropriées. Les supplétifs débarqués en métropole en dehors du plan global de rapatriement seront en principe renvoyés en Algérie […]. Je n’ignore pas que ce renvoi peut être interprété par les propagandistes de la sédition comme un refus d’assurer l’avenir de ceux qui nous sont restés fidèles. Il conviendra donc d’éviter de donner la moindre publicité à cette mesure mais ce qu’il faut  surtout obtenir, c’est que le gouvernement ne soit plus amené à prendre une telle décision » (Florian Meyer (Pour l’honneur… avec les harkis, de 1958 à nos jours, p. 155). Par ailleurs, un télégramme numéroté 125/IGAA du 16 mai 1962 signé par Louis Joxe montre très bien la politique anti-musulmane du gouvernment français : « Le ministre d’Etat demande au Haut commissaire de rappeler que toutes les initiatives individuelles tendant à l’installation en métropole des Français musulmans sont interdîtes. » En clair, des harkis voulant se réfugier en France ont même été déportés en Algérie. En effet, une directive du 15 juillet 1962 signée encore par Joxe indique que « les supplétifs débarqués en métropole en dehors du plan général seront renvoyés en Algérie », spécifiant : « Je vous renvoie, au fur et à mesure, à la documentation que je reçois au sujet des supplétifs. Vous voudrez bien faire rechercher, tant dans l’armée que dans l’administration, les promoteurs et les complices de ces entreprises de rapatriement, et faire prendre les sanctions appropriées. Les supplétifs débarqués en métropole, en dehors du plan général, seront renvoyés en Algérie. Je n’ignore pas que ce renvoi peut-être interprété par les propagandistes de l’OAS, comme un refus d’assurer l’avenir de ceux qui nous sont restés fidèles. Il conviendra donc d’éviter de donner la moindre publicité à cette mesure. »

Il est important de dire qu’une plainte pour crime contre l’humanité a été déposée à l’encontre de Pierre Messmer, l’ancien ministre des armées sous la présidence de Charles de Gaulle. On parle souvent des 76 000 juifs déportés sous l’Occupation, avec la France qui avait aidé l’Allemagne sous la pression. En revanche, on ne parle jamais des 150 000 harkis massacrés par le F.L.N avec la complicité de la France sous de Gaulle. En effet, 150 000 est bien le nombre approximatif le plus proche de la réalité.  Il a été dévoilé notamment par Mohand Hamoumou (Et ils sont devenus harkis, Fayard, 1993), par Abd-El-Azziz Meliani (La France honteuse. Le drame des harkis, Perrin, 2001) ou encore par Anne Heinis (L’insertion des français-musulmans, Montpellier III thèse de troisième cycle, 1977). Il est très facile de le confirmer.

Le 4 avril 1977, le ministre de la défense Yves Bourges avait demandé des informations sur ce sujet au service historique du ministère de la défense. Voici la réponse du général Forret, chef du service historique, dâté du 21 avril 1977 :

« Note pour le cabinet du ministre 

OBJET : Supplétifs incorporés en Algérie

REFERENCE : Note n° 15088/DEF/C.4.B en date du 4 avril 1977

En réponse à la lettre de référence, le Service Historique de l’Armée de Terre a l’honneur de faire connaître qu’il ne possède aucune archives sur les sujets évoqués.
Toutefois, un document établi par le « Bureau d’aide aux musulmans français » Hôtel National des Invalides – 75007 PARIS – avec le numéro 270 en date du 27 mai 1975, fait état des chiffres suivants : 

 

Effectif des supplétifs (harkis, moghaznis) incorporés en Algérie

-environ 200 000 

Supplétifs emprisonnés par le F.L.N après l’indépendance 

-environ 2 500

Supplétifs disparus ou exécutés par le F.L.N.

-environ 150 000 

 

Le général FORRET, Chef du Service Historique » Le document original est présent sur le lien http://pagesperso-orange.fr/guerredalgerie/images/note%20harkis.jpg. Un constat important sur ces chiffres, c’est qu’il y a très peu de prisonniers comparés aux victimes du F.L.N. Il y a donc bien eu une volonté d’extermination à l’encontre des harkis de la part du F.L.N et avec l’assistance de la France. Par ailleurs, l’armée française savait pertinemment que le génocide se déroulait puisqu’elle fut présente en Algérie jusqu’à la fin des années 1960. Pourtant, durant la Guerre d’Algérie, les politiciens français n’étaient soumis à aucune pression extérieure et agissaient en pleine possession de ses moyens, contrairement durant l’occupation. La France a donc une responsabilité plus grande vis-à-vis du massacre des harkis,mais peu de personnes oserai nuire à la légende du « grand » de Gaulle. Enfin avant de conclure, il faut savoir que, grace à diverses sources, nous savons aujourd’hui que de Gaulle était directement impliqué dans le massacre des harkis.

Raymond Aron le soupçonnait déjà dans ses mémoires : « les harkis, pour la plupart, furent livrés à la vengeance des vainqueurs sur l’ordre peut-être du général de Gaulle lui-même qui par, le verbe, transfigura la défaite et camoufla les horreurs. » (Raymond Aron, 50 ans de réflexion politique, Julliard, 1983, p. 388). Les preuves sont apportées par le Général Maurice Faivre à travers plusieurs ouvrages (Maurice Faivre, Un village de harkis, des Babors au pays Drouais, L’Harmattan, 1994 ; Les archives inédites de la politique algérienne : 1958-1962, L’Harmattan, 2000, Les combattants musulmans de la guerre d’Algérie, des soldats sacrifiés, L’Harmattan, 1995).

Pourquoi de Gaulle était-il responsable ?

Premièrement, le général Faivre avait  publié les ordres donnés par le président de la République à ses ministres qui se traduisirent par le fameux télégramme de Louis Joxe de mai 1962 ordonnant le rejet des musulmans français fuyant la guerre, et par les directives sur le terrain des généraux Charles Ailleret et Joseph Katz, ces derniers organisant plusieurs massacres.

Deuxièmement, le général a lui-même exprimé la volonté de laisser les habitants d’Algérie s’entre-tuer, et cela au conseil des ministres du 24 mai 1962 : « La France ne doit avoir aucune responsabilité dans le maintien de l’ordre après l’autodétermination. Elle aura le devoir d’assister les autorités algériennes, mais ce sera de l’assistance technique. Si les gens s’entre-massacrent, ce sera l’affaire des autorités algériennes » (Alain Peyrefitte, C’était De Gaulle, Fallois, 1994, Tome 1, p. 136). Par conséquent, il y a eu un abandon total des instances françaises, abandon souhaité et exigé par de Gaulle, laissant les harkis se faire massacrer. Cette action criminelle fut dénoncée au Parlement dès mai 1962 par le Bachaga Saïd Boualam, vice-président de l’Assemblée Nationale, et par le professeur Maurice Allais, Prix Nobel d’Economie, dans son ouvrage L’Algérie d’Evian (L’Esprit Nouveau, 1962 et Jeune Pieds Noirs, 1999).

Je tiens à ajouter que devant cette accumulation de preuves, les associations représentatives des Français d’outre-mer, réunies le 22 septembre 1995 au Sénat, ont adressé un message au président de la République Jacques Chirac en lui demandant de reconnaître officiellement la responsabilité de la Vème République dans les massacres ayant suivi le 19 mars 1962, que ce dernier n’a pas fait. Pourtant, ce message a été depuis co-signé par plus d’une centaine associations et par plus de 15 000 Français. Le 30 août 2001, les harkis déposaient une première plainte pour crime contre l’humanité. Les 13 mars et 5 juillet 2003, 40 familles de disparus pieds-noirs déposaient  deux nouvelles plaintes pour crime contre l’humanité. Depuis de nombreuses personnalités demandent la reconnaissance de ce crime dans lequel la France a une grande part de responsabilité.

De la loi Crémieux jusqu’à l’indépendance de l’Algérie, les musulmans de ce pays subirent fréquemment la politique raciste des différents gouvernements français. Le décret de 1870 avait de plus déterminé une politique de discrimination raciale qui dura 70 ans. Mais malgré sa disparition, après son abrogation par le maréchal Pétain, la loi Crémieux garda un impact important dans la société française qui resta longtemps anti-musulmane. Une politique de hiérarchie raciale perdurera au début de la Vème République, principalement sous le règne d’un de Gaulle profondément raciste, et les maghrébins toujours assimilés à des musulmans en furent victimes.

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

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LUCCHINI PATRICE

Le racisme et l’aversion des musulmans de De Gaulle n’a pas été suivi d’effet après son départ. La main-d’oeuvre algérienne et maghrébine est entrée en France massivement jusqu’au regroupement familial promulgué par Giscard d’Estaing et poursuivi ensuite. Les gouvernements français successifs ont préféré des Algériens anti-français dont on a facilité la venue en France au détriment des Français-musulmans loyaux à la France – Harkis et fonctionnaires notamment. Et cela n’a fait que s’accentuer. La France est aujourd’hui à la croisée des chemins avec près de 10% de sa population musulmane et la jeunesse musulmane est anti-française et fanatiquement religieuse. Les erreurs de De Gaulle qui n’a pas voulu continuer la guerre jusqu’à l’écrasement du FLN, qui a refusé d’accepter la reddition de certains chefs du FLN en 1959 et refusé l’intégration ou à la création d’une fédération avec une Algérie modernisée ces erreurs nous ont conduit là où nous sommes aujourd’hui, le dos au mur.

BARANOUX

Qui est l’auteur de cet article au demeurant fort instructif ?

Pied-Noir

Oui De Gaulle est aussi responsable de l’islamisation de la France: en signant les Accords d’Evian il a autorisé les Algériens nés avant juillet 1962 a obtenir la nationalité française en signant tout simplement un papier: résultat au moins 7 millions d’Algériens (ou Franco) actuellement en France.