L’enjeu essentiel de la réforme judiciaire : rétablir les droits de la majorité, Pierre Lurçat

L’enjeu essentiel de la réforme judiciaire : rétablir les droits de la majorité, Pierre Lurçat

Au vu du pouvoir hégémonique sans précédent que la Cour suprême israélienne a acquis au cours des trois dernières décennies, il est difficile de faire revenir les choses en arrière, au statu quo ante. Les juges de la Cour suprême israélienne ont acquis un pouvoir auquel ils ne semblent pas prêts de renoncer. C’est pourquoi le changement ne peut pas venir de l’intérieur du système judiciaire. Il ne peut venir que de la Knesset et du gouvernement. La vox populi a montré son impuissance lors des grandes manifestations du public ultra-orthodoxe dans les années 1990, qui n’ont amené aucun changement, pas plus que les différentes initiatives venant d’autres milieux (comme le projet de Constitution par consensus de Ruth Gabizon et de Yaakov Madan).

Comme je l’écrivais en 2020, « pour rétablir les droits du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif, ce sont le gouvernement et la Knesset qui doivent eux-mêmes se faire l’instrument d’une contre-révolution démocratique. C’est ce qu’avait commencé à faire Ayelet Shaked lors de son mandat au ministère de la Justice. Il est indispensable qu’un grand parti politique adopte pour cheval de bataille le rétablissement de l’équilibre des pouvoirs et des prérogatives de la Knesset ».

Ce qui est en jeu dans la réforme judiciaire actuelle en Israël est emblématique du débat politique dans de nombreux autres pays occidentaux, comme la France ou les USA. Ici comme là-bas, des “minorités tyranniques” ont réussi à imposer leurs vues, sur bien des sujets très divers, contre les conceptions majoritaires de leurs concitoyens. Sur des thèmes comme l’immigration ou l’identité nationale en France comme en Israël, mais aussi sur le droit de la famille, etc., ces minorités actives se sont servies du pouvoir judiciaire pour imposer leurs vues.

Ce n’est pas un hasard si la Cour suprême israélienne, autrefois considérée comme le fleuron de la démocratie israélienne, est aujourd’hui devenue une institution hyper politisée, qui a perdu son aura et sa réputation d’impartialité. Dans le sillage de la Révolution constitutionnelle, la Cour suprême israélienne est en fait devenue le principal obstacle au jeu des institutions démocratiques. En réalité, comme nous avons tenté de le montrer, le juge Aharon Barak, tout comme ses élèves et successeurs, est tout le contraire d’un démocrate.

 Le juge Aharon Barak contre la démocratie, Pierre Lurçat

En bon élève de Lénine, il a utilisé les institutions démocratiques et le langage du droit pour asseoir son pouvoir. En Israël comme ailleurs dans le monde occidental, les deux pouvoirs qui se sont érigés en “maîtres du jeu” démocratique sont précisément les deux pouvoirs non élus, qui ne rendent de compte à personne : le pouvoir judiciaire (expression dont nous avons montré le caractère problématique) et le pouvoir médiatique.

En vidant de son sens la notion d’État juif et démocratique, la Cour suprême israélienne, depuis Aharon Barak, a porté atteinte au fragile équilibre sur lequel repose la société israélienne, constituée de secteurs multiples, porteurs de valeurs diverses et souvent contradictoires. Il importe aujourd’hui de rétablir cet équilibre, en restaurant un indispensable consensus national et en renforçant le caractère juif de l’État. Contrairement aux conceptions radicales d’Aharon Barak, le caractère juif de l’État ne menace pas la démocratie israélienne, il en est le ciment. C’est le vide engendré par le rejet du projet de droit israélien fondé sur les sources hébraïques qui a ouvert la voie à la situation actuelle.

Le but du sionisme politique a en effet toujours été de créer un État juif (avec certes des divergences quant au contenu de cette notion). Le caractère démocratique de cet État allait de soi, mais n’a jamais été un objectif en soi. Paradoxalement, c’est l’atteinte au caractère juif de l’État qui a affaibli de manière dangereuse le jeu démocratique des institutions, en imposant au peuple israélien des valeurs étrangères. Réaffirmer le caractère juif de l’État permettra de préserver la démocratie israélienne. La contre-révolution constitutionnelle a commencé, mais est loin d’être achevée. L’enjeu, en Israël comme ailleurs, dépasse de loin le seul problème institutionnel et politique. Il s’agit aussi et surtout de préserver l’idéal démocratique et de rendre au peuple le droit de choisir son destin.

Par Pierre Lurçat
(Extrait adapté de mon article “Comment la Cour suprême est devenue le premier pouvoir en Israël, revue Pardès no. 67 2021)

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Elias

Très bonne analyse mais je pense que vous oubliez des éléments qui ont fragilisé Israël sans que ma Cour suprême intervienne
La gauche travailliste dans les dernières décennies sous Rabine et Pères ont commis la plus grande erreur :les accords d’Oslo
Déjà Dayan travailiste ce héros a cru en donnant la gestion des cultes à chacune avait commencé les erreurs politiques
Résultat aucun juif ne peut aller prier sur le Mont du Temple et le wakf détruit toute trace juive
C’est Pères qui a été la cheville ouvrière de cet accord dramatique pour Israël en convainquant Rabine que ces accords mèneraient à la paix
Pauvres naïfs qui ne connaissent pas la mentalité arabe de simulateur comme les sepharades et pour qui un accord signé est un torchon dans valeur
On revient toujours vers cette gauche qui commet erreur sur erreur bien qu’ils furent les pionniers de la restauration d’Israel
Une entité arabe donnée en pleine Judee Samarie mais c’était un cadeau aux terroristes sur place pour commettre attentat et intifadas et un cadeau pour designer cette entité Palestine
Je n’ai pas compris encore comment la Gauche avide de paix a pu mener ces négociations sans que la droite ait son mot à dire
Begin a signé la paix avec l’Égypte en restituant le Sinaï mais pas en donnant des terres juives
Les retraits de gaza par Sharon et du Liban par Ehud Barak ont achevé la fragilisation d’Israël sur le plan militaire et politique extérieure
C’est au moment de ces désordres que Ahron Barak et la Cour suprême ont pris le pouvoir en ôtant toute défense d’Israël et en privilégiant les arabes dits israéliens et les arabes de Judee
Cette Cour n’a rien dit sur l’installation de maisons arabes en zone C et la le validation des 29 villages du Negev envahi par des bédouins d’egypte ou d’ailleurs et de même pour les territoires maritimes donnés au Liban et tout cela parle traître Lapid et son ministre arabe Abbas informateur des débats et commissions à Erdoğan et Mahmoud Abbas
Elle a toujours condamné les pionniers des implantations de Judee Samarie qui voulaient s’agrandir et ce pour donner raison à l’UE et aux USA financiers des installations arabes en zone C
Cette cour suprême israélienne est devenue une cour tyrannique légiférant en fonction de l’idéologie gauchiste dont la majorité des écrivains qui critiquaient sans répit toute initiative d’extension voire de récupérer la Judee Samarie continuant de rêver à une paix avec les arabes quelque soit le prix y compris la disparition d’Israël progressivement avec le soutien de la cour suprême
Cette Cour suprême est devenue un danger et ilfaut à tout prix la dissoudre et ne pas tenir compte des pays occidentaux et des manifestations manipulés par des extrémistes gauchistes d’ONG financés par l’UE et faire comprendre aux USA qu’au. contraire la démocratie véritable sera restaurée

yves FELIX

Merci Monsieur Lurçat . Votre article m’aide à comprendre ce qui se passe. Oui un courant destructeur sévit dans nos pays démocratiques par le biais des institutions non elues.

Charles DALGER

Bonjour Pierre,
tu dis, et c’est vrai, que des minorités ont imposé leurs lois.
Mais si cela a été possible, en occident et surtout en Israël, c’est seulement avec la complicité passive des dirigeants. De tous les dirigeants.
Je ne t’apprends pas qu’en Israël, la séparation des pouvoirs n’existe plus depuis plus vingt cinq ans, au moins.
Ca a commencé, quand les dirigeants et avec eux la population, ont accepté la mise au ban du Gadol Hador, Meir KAHANA H.y.d. et de son parti, le Kach.
Depuis plusieurs éminents juristes, dont des Havré Knesset, ont dénoncé cette dérive des rats du bagats. En vain. Aujourd’hui, il ne faut même pas discuter avec les opposants à la réforme. Il faut les ignorer et les virer dès que possible des postes qu’ils occupent. Ces pourritures ne sont pas irremplaçables, quelques aient été leurs vrais mérites passés.
Aujourd’hui, ces tordus sont soutenus par la vermine antijuive, pro nazislamiste et « woke » du monde entier. Ce combat dépasse largement Israël.

Pierre, c’est très amicalement que je te le dis : je trouve le ton de ton papier beaucoup trop réservé, face à cette clique de « Korah de notre temps ».

Vérité

La gauche est démocratique seulement quand on est absolument d accord avec elle, et, la voix du peuple ne compte Qu à ce moment la sinon non…

La gauche bobo facilite l ingérence étrangère par sa haine de soi …

Très Bon article
Merci