La question du Djihad, des migrants et du trafic d’êtres humains au Sinaï ; le prix Albert-Londres audiovisuel ne pouvait être plus en prise avec l’actualité. Il récompense cette année le documentaire poignant de Delphine Deloget et Cécile Allegra. A voir d’urgence sur Télérama.fr jusqu’au mardi 3 juin, 10h00.

 

Le jury du prix Albert Londres n’a pas failli à sa réputation en récompensant ce samedi 30 mai à Bruxelles des reportages et un documentaire en prise directe avec l’actualité la plus chaude de ces derniers mois. Le prix de la presse écrite est allé à juste titre à Luc Mathieu, journaliste à Libération pour ses articles sur le djihad ; un ensemble de reportages et de portraits traitant à la fois de ceux qui sont victimes du djihad, de ceux qui le combattent et de ceux qui le mènent. Le prix de l’audiovisuel a lui été décerné à un documentaire poignant Voyage en Barbarie réalisé par Delphine Deloget et Cécile Allegra. Produit par Mémento, ce film n’aurait pu voir le jour sans l’aide de deux petites chaînes françaises aux moyens limités (Public Sénat et France Ô), mais dont les choix souvent courageux permettent à ce type de film d’exister. Voyage en Barbarie sera rediffusé lundi 2 juin à 12h30 sur Public Sénat et le sera prochainement sur France Ô.

Albert Londres qui, en son temps, avait dénoncé le fléau de l’esclavage aurait sans doute apprécié à sa juste valeur le travail d’enquête des deux réalisatrices qui révèlent le traitement inhumain dont sont victimes les Erythréens au Sinaï. A l’heure où tous les regards sont focalisés sur le sort des migrants qui tentent de rejoindre l’Europe à partir de la Libye, Delphine Deloget et Cécile Allegra pointent leur caméra plus loin, dans la péninsule égyptienne du Sinaï devenue en cinq ans le théâtre d’un trafic d’être humains à l’ampleur insoupçonnée. Sur plus de trois cent mile Erythréens ayant fui la dictature militaire de leur pays pour trouver refuge en Europe, en Libye ou en Israël, cinquante mille auraient été enlevés, torturés et rançonnés par des Bédouins. Plus de dix mille n’en seraient pas revenus (1). Entre la frontière érythréenne et la première ville soudanaise, Kassala, un tiers des fugitifs sont enlevés par des trafiquants qui les monnayent, étape par étape, jusque dans le désert du Sinaï où ils sont parqués dans des maisons de torture (il en existerait 40 et autant en Libye et au Yémen) avant d’être libéré si leur famille est capable de réunir des rançons allant de 30 à 50 000 dollars. Un trafic humain juteux puisque selon une ONG hollandaise, les trafiquants auraient déjà gagnés 600 millions grâce à lui.

Avec Voyage en barbarie, Delphine Deloget, auteur de films sur la question de l’exil, et Cécile Allegra, spécialiste des mafias européennes, signent sur ce sujet douloureux une oeuvre puissante mais pudique, en s’effaçant derrière un narrateur : Robel, jeune rescapé de 24 ans parti vivre en colocation dans un chalet au nord de la Suède, avec deux autres compagnons d’infortune. Entre Stockholm et Le Caire, le documentaire adopte un mouvement pendulaire hypnotique et troublant. Où qu’il ait trouvé refuge, chaque survivant fait l’expérience cauchemardesque d’un exil mental que le film restitue parfaitement.

 

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