Rav Pinhas Eliyahou SHADAY: Le futur président du Congo sera juif !

Dans la Vieille ville de Jérusalem où il a fondé sa Yeshiva, le Rav Pinhas Eliyahou enseigne les préceptes de la Torah, et c’est de cette même Torah qu’il puise ses ressources pour le conduire à la présidence de la république du Congo, où il pose sa candidature en vue des prochaines élections présidentielles. De son attachement au judaïsme, ses origines congolaises, sa montée en Israël et sa volonté d’une gouvernance nouvelle pour le Congo, Pinhas nous explique sa démarche dans le cadre d’une interview exclusive.

Je veux renouveler la classe politique sans orgueil ni arrogance !

Rabbin Pinhas Eliyahou, pouvez-vous vous présenter ?

J’ai 40 ans et je suis né au Congo, où j’ai grandi jusqu’à l’exil politique de ma famille en France. J’y ai fait mes études, un doctorat, et ma conversion au judaïsme que je vis comme un engagement de toute une vie. Puis j’ai fait mon Alya en 2014. J’ai d’abord étudié la Torah dans la Yeshiva de Beit- El du Rav Yehuda Meir Getz, ancien grand rabbin du Kotel, avant d’ouvrir ma propre Yeshiva. Mes origines et mon parcours me font me sentir un citoyen du monde, sur- tout basé sur trois pays

: le Congo, la France et Israël. Je suis un mélange d’universitaire et d’amoureux de la Yeshiva,  d’études Talmudiques, Thoranique, entre Israël et le conti-Zoharique, de tout ce qui permet de se rapprocher au plus près de la pensée de nos Sages, dans le judaïsme.

Pourquoi avez-vous fondé votre propre Yeshiva, au cœur de la Vieille ville de Jérusalem ?

L’ouverture de la Yeshiva Boutsina Kadisha a été un processus assez cohérent. Cette démarche est venue combler un manque. J’ai ressenti en effet un besoin de cohérence entre mon identité spirituelle et mes origines africaines. Je suis juif, mais je suis aussi congolais. J’ai eu la chance de grandir avec des juifs qui étaient fiers de leur origine tunisienne, fiers d’être juifs marocains, juifs russes, mais il n’y avait pas encore de place pour la « case » congolaise. Or, plus j’étudiais et plus j’approfondissais mes connaissances de la Torah que j’aime tant, plus je réalisais combien la connexion entre israël et le continent africain était importante. Beaucoup de sages, de politiciens et de penseurs ont considéré que l’union entre Israël et l’Afrique est essentielle.

Rappelons que la légitimité de l’Afrique est inscrite dans nos textes sacrés, et ce lors de diverses périodes de l’Histoire décrites dans la Guemara et le Zohar, comme celle où Moshé a établi sa royauté dans les terres de Coush pendant quarante ans, ou encore l’époque des dix tribus qui ont été exilées notamment vers les terres d’Afrique nommées « Afriki ».

« Boutsina Kadisha » signifie « étincelle divine », et c’est l’un des noms de Rabbi Shimon Bar Yo’hai, l’auteur du Zohar. J’ai voulu par ce nom signifier que l’on étudiait tous les aspects de notre Torah, que ce soit le ‘Houmash, la Guemara, les Michnaïot, les Mi- drashim et la Kabbala, tout cela à un niveau très sérieux et toujours dans le but d’accom- plir ce que nous étudions.

En m’appuyant sur les écrits des « Guedolei Hador » (les Grands de notre génération), j’ai publié une Responsa intitulée « Niflaot BeEretz Cham » (Des merveilles sur la terre de ‘Ham), qui est devenue la référence du judaïsme africain en Afrique. Depuis ses quatre ans d’existence, la Yeshiva attire beaucoup de personnes, certes majoritairement des Africains, des convertis Noirs américains, mais c’est un lieu ouvert à tous. De plus, notre enseignement est suivi par 300 000 personnes sur le continent africain, grâce à quatorze Yeshivot, dont une dizaine sont au Nigéria, une au Zimbabwe, une au Cameroun, une au Gabon et une au Congo.

Il faut savoir qu’au Nigéria, les Juifs sont reliés à la communauté Igbo, qui provient de l’émigration hébraïque et ultérieurement juive d’Afrique du Nord et d’Égypte en Afrique de l’Ouest. Le Rav Haïm Kanievski Zal a écrit un « Psak » (décret rabbinique) à leur sujet, décrétant qu’il s’agissait de juifs d’origine qui ne nécessitaient que d’une conversion « Gerout Le’Houmra » (conversion au judaïsme d’une personne issue d’une ascendance juive, et donc qui revient au judaïsme).

Avez-vous toujours tenu à conserver ce lien avec l’Afrique ?

A dire vrai, au début, on essaie de s’en défaire. On se dit qu’on est juif, et que c’est cela qui importe. Mais pour des raisons de couleur de peau, on comprend aisément combien il est difficile de s’en défaire…On est toujours rappelé à nos origines. Ce déni donne parfois des crises identitaires très fortes, où l’on se trouve à dénigrer ce qui nous avait été transmis par nos parents. Or, même si on appartient à la famille du judaïsme, nous nous devons de conserver un respect et un lien particulier avec ceux qui nous ont donné la vie. Si je suis ce que je suis, c’est aussi parce qu’un jour, il y a eu une mère non juive qui a donné la vie, sur sa table de naissance, à une âme juive. Je ne veux pas que mes parents me reprochent un jour ce déni de mon identité congolaise et de toutes les valeurs qu’ils m’ont transmises. J’ai donc été chercher comment voir  l’Afrique dans cette Torah, et j’ai trouvé des éléments, en étant totalement juif et en élevant ce que j’avais de plus « congolais » en moi, pour faire de cette culture congolaise quelque chose de « Kadosh et de Cacher » !

C’est mon travail au quotidien, et je publie prochainement un recueil de lois (en hébreu Choul’han Arou’h) basé sur le travail du Ben Ishraï appliqué aux traditions africaines, pour permettre à chaque personne africaine de pouvoir maintenir sa tradition dans le cadre d’un livre de lois qui la « canonise ».

Pourquoi cet intérêt pour la politique et comment liez-vous votre étude et pratique de la Torah à ce choix d’une vie politique ?

Nos sages disent dans la Guemara que « tout bon étudiant de Torah doit être obsédé par l’envie de ressembler à son maître », et notre maitre ultime s’appelle Moshé (Moïse). Après avoir fui l’Egypte suite au meurtre commis sur l’égyptien (référence Yalkout Shimoni, Sefer Shemot), Moshé devient le Guide et le maître spirituel, puis le roi des populations de la terre de Coush après la mort du Roi Kinkos. Moshé était donc quelqu’un qui a fait de la po- litique, qui s’est soucié du quotidien de chaque citoyen, et l’étude de ce passage a réveillé un écho au fond de moi qui justifiait l’attraction et le désir que j’avais en moi pour la politique. J’ai toujours en effet été convaincu qu’il y avait possibilité de faire de la politique autrement, en dépit de ceux qui pensent qu’il est impossible de changer le système. Moi, je pense qu’avec l’âge, avec l’expérience de la direction d’une Yeshiva, les échecs et les réussites, je suis parvenu à la conclusion que cela est possible.

C’est possible d’imiter nos maîtres, à l’instar de Moshé ou même Yossef, qui était aussi vice-roi d’Egypte, ou encore du roi David, qui ont élevé à un haut niveau la position de roi, ou encore Shmoel et Hotniel qui ont élevé la position de juge. Ils nous donnent le droit d’ambitionner de diriger la cité.

Mais il faut le faire avec des prérogatives qui sont liées à la Torah. Il y a pour cela des écrits très précis d’un de nos maîtres Ary Hakadosh, l’élève de Rabbi Haïm Vital, selon lequel il faut affiner son éthique, sa moralité et ses valeurs pour éviter « la gouvernance ». Je me base sur ces trois éléments, combinés au fait que je ne supporte pas l’injustice. Je veux construire et amener une nouvelle vision de la politique, vision que j’ai eu grâce à l’étude, à l’inves- tissement personnel et au travail de mes « midot » (traits de caractère). Je souhaite Inspirer autre chose que de la corruption, du clientélisme, de l’ambition démesurée, et réussir à incarner la dimension de responsabilité. J’ai l’in- tention d’agir avec modestie, ce qui implique se contenter de ce dont on a besoin sans convoiter davantage, comme l’enseigne notre Torah. Ce n’est à mon sens, que de cette façon que la politique peut être compatible avec la Torah. Si, à un moment, un politicien est capable de s’endormir alors qu’une partie de sa population meure ou n’a pas à manger, notre Torah dit que c’est un mauvais dirigeant. Je n’enlève pas ma veste de rabbin pour devenir président. Cette veste va avec ce rôle de référent est c’est la combi- naison des deux qui va me permettre d’être un politicien stable, équilibré, et qui inspire à l’équilibre.

Pourquoi présenter votre candidature à la prési- dence du Congo plutôt que d’entrer dans la poli- tique israélienne ?

J’ai beaucoup d’amour pour Israël. Je reçois beaucoup de ce pays et je donne beaucoup, et je continuerai ainsi. Mais je ne pense pas que la société israélienne soit prête à avoir une direction autant connectée à l’Afrique. Tant que l’on n’aura pas vu un Sépharade Premier ministre, il sera diffi- cile d’envisager autre chose par la suite ! J’ai été dernièrement au Congo, et je ressens aussi une connexion avec cette terre, qui ressemble, en beaucoup de points, à notre terre d’Israël. Et je sens que je suis arrivé aujourd’hui au meilleur moment pour rendre au mieux ce que mes parents, ma culture, ma terre congolaise ont pu me donner, et j’éprouve le besoin d’agir maintenant. Etablir une di- rection, renouveler la pensée politique, ouvrir des portes à une autre politique, former les jeunes à cette politique d’une manière différente, et donner à ce pays, qui est le poumon de l’Afrique, des outils qui pourront, de façon certaine, influencer toute l’Afrique dans son quotidien.

Votre engagement politique se fait donc avec votre parti IMPERIUM et son programme, nommé « les 10 forces ».

Pouvez-vous nous expliquer sa signification et nous les détailler ?

Mon parti se nomme IMPERIUM.

En effet, avant les différentes invasions, le Congo était un empire qui a influé le monde de différentes manières et durant plusieurs siècles-par la culture, la médecine, la spiritualité-, et qui a été à cette époque un phare pour l’humanité.

Nos sages disent: « Sache d’où tu viens pour pouvoir construire où tu vas ». Il est donc important de rappeler aux Congolais et à toute la diaspora congolaise la richesse et la noblesse de leurs origines. On a été un empire, on doit pouvoir redonner les mêmes forces à notre popula- tion et à notre pays.

La deuxième signification de ce terme est « centraliser». Le Congo est un pays très riche dans son sous-sol, qui a énormément de forces dans ce qu’il peut produire. Et paradoxalement, la gestion politique de ce pays se passe dans d’autres capitales, et pas à Kinshasa. La vie du Congolais se décide à Washington, à Paris, à Bruxelles, à l’ONU, mais pas dans sa capitale, et je veux restituer le pouvoir où il doit être. Nous devons avoir la maitrise de notre desti- née, le droit et le choix de pouvoir choisir une démocratie qui respecte nos traditions. Quand je parle de tradition congolaise, je n’évoque pas D.ieu nous en préserve de culte idolâtre. Je parle de valeurs qui sont beaucoup plus proches de la Torah qu’on ne le pense, comme le respect, l’éthique, la moralité, la sauvegarde de la terre et le vivre ensemble en paix. C’est cela aussi, Imperium.

Enfin, le dernier point est de réussir à contrôler et administrer de manière équilibrée tout ce vaste territoire qui est huit fois la France. Dans un pays tel que le Congo, il existe des « territoires perdus », où on a l’impression que l’on n’a pas le droit aux services régaliens de l’Etat car n’étant pas la capitale. On ne veut plus cela. On veut amener le centre à tous, que chaque territoire, aussi éloigné soit-il, puisse avoir accès au même service équitable que l’Etat a à of- frir, à savoir une justice, une sécurité, une protection. C’est cela, Impérium.

Je veux renouveler la classe politique, sans orgueil ni arrogance. Nous avons eu des générations de politiciens qui ont montré leurs limites. Chacun a essayé, cinq présidents ont apporté une gestion, comme c’est le cas actuellement avec les présidents qui ne sont plus des visionnaires mais des gestionnaires. Ils arrivent dans un contexte économique et tentent de l’améliorer, sans avoir de vision pour leur pays. Selon la Torah, un bon président est celui qui va arriver à mener une vision et construire sur cette vision, en donnant à la population la possibilité de s’inscrire dans cette vision. Mon souhait est de mener une génération qui réussit à drainer et hisser la culture congolaise à un niveau mondial. De nos jours, on entend des gens par- ler lingala, des chanteurs chantent dans cette langue, il y a des footballers célèbres au niveau international, des prix Nobels, des ingénieurs. Il ne manque plus que la politique, menée par des politiciens exempts de tout re- proche, n’ayant trempé dans aucune magouille politique ni corrompus.

Mon programme, qui se nomme « Les dix forces » , consiste à établir des choses que l’on annonce, avec la ferme intention de les accomplir. Ces dix forces sont dix véritables contrats que nous nous engageons à accomplir avec le peuple congolais, et nous sommes le seul parti politique à pouvoir le faire, grâce à notre multiculturalisme et à notre multi-identité.

Comment allez-vous (et comment peut-on) vivre sa judaïté au Congo ? Sera-t-elle bien perçue pour un candidat à la présidence de l’Etat ?

Vivre sa judaïté au Congo est tout à fait possible, car le pays a su conserver l’authenticité et l’artisanat. Il est possible de manger cacher, les produits ont une traçabilité. On trouve du vrai poisson pêché devant nos yeux, on filtre l’eau soi- même, on peut se procurer du vin en Afrique du sud, le bétail est élevé sur place et la viande peut être abattue ri- tuellement et cachérisée sur place. Paradoxalement, il est même plus simple d’avoir une vie juive au Congo, selon les standards du Zohar, que parfois en Israël ! La communauté juive du Congo est une vieille communauté, composée de juifs originaires de Rhodes et du Portugal qui ont toujours vécu en symbiose avec les autochtones. Il existe un centre communautaire à Kinshasa depuis les années cinquante, et un premier Beit Habad a vu le jour en 1981.

Quant à mon acceptation en tant que président juif, je n’ai pas la moindre inquiétude. La population congolaise est bienveillante envers les juifs, elle sait que nous sommes le peuple élu, les enfants de D.ieu, elle respecte Jérusalem. Mon judaïsme ne sera pas un frein, à une condition : garder en tête que l’on porte une kippa et une barbe et que cela implique des exigences sur lesquelles on ne pourra pas passer. On doit faire attention à ce que l’on dit et comment on le dit, bien que ma religion entre dans le domaine per- sonnel. Ma présence à la présidence ne veut pas dire que le Congo devient juif demain ! Je suis juif et cette influence et forme de pensée, alliée à la tradition respectée du Congo, va diriger en apportant des solutions innovantes. S’il y a du respect, pas d’extrémisme, de la bienveillance, à manger dans les assiettes, du travail, c’est ce résultat qui va comp- ter, plus que mon judaïsme. Et je reste Congolais à leurs yeux. Là où je suis parti (NDLR Israël), mes choix de vie et de religion n’ont pas changé mon amour et la connexion que j’ai à cette terre, et c’est cela que les Congolais veulent entendre.

Quand les élections présidentielles ont-elles lieu ?

Les élections auront lieu au printemps 2023. En attendant, je prépare le terrain.

Source : imperiumrdc.org

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Merci

C’est bien , plus le nombre de juifs est conséquent mieux c’est pour tous dans le monde, il est bien dit que les juifs doivent être les prêtres pour représenter D sur terre tel est l’objectif voulu pour appliquer ses lois , je lui souhaite la réussite pour la présidence de son pays en 2023

Alain

Bravo à ce rabbin !
Il a raison. Notre identité est faite d’appartenances multiples. Et c’est valable pour tous, y compris les non juifs.
Je suis juif alsacien et français. Je fréquente une communauté sépharade consistoriale dont le rabbin est un Habbad d’origine tunisienne. Nous avons un couple d’origine togolaise qui s’est marié à la schule récemment. Grand moment d’émotion.