Comment la Chine tente de résoudre le plus gros problème de ses avions de chasse

De tous les chasseurs qui composent l’aviation chinoise, aucun n’est aussi important que le J-20. Ce chasseur de cinquième génération, également connu sous le nom de « Mighty Dragon », est plus qu’un simple avion de combat furtif. Il est la preuve que la Chine, comme les États-Unis, peut développer certaines des meilleures technologies militaires de la planète.

L’aéronef est devenu un symbole du parti communiste chinois, exhibé fièrement lors des parades militaires et mentionné à plusieurs reprises dans les publications de défense chinoises. Après une flambée de violence avec les troupes indiennes à la frontière contestée entre les deux pays l’année dernière, la Chine a envoyé deux J-20 dans des bases aériennes du Xinjiang.

Ce déploiement était trop modeste pour avoir une réelle importance stratégique, mais le fait que la Chine a déployé son meilleur avion de combat dans une région reculée de l’Himalaya témoigne de son sérieux. Le déploiement du J-20 au sein du commandement du théâtre oriental de la Chine vise à envoyer un message similaire à Taïwan, au Japon et aux États-Unis.

Mais le J-20, comme tous les avions chinois, a été handicapé par le manque de moteurs à réaction de haute-performance, efficaces et durables. Ce problème affecte depuis longtemps l’industrie de la défense chinoise, et Pékin se démène pour le résoudre.

Un problème de longue date

Une avion de combat furtif J-20. Reuters

Les difficultés rencontrées par la Chine en matière de moteurs à réaction peuvent surprendre, compte tenu du développement militaire massif et réussi du pays. Ce n’est pas non plus un secret que la Chine est douée pour la rétro-ingénierie de technologies étrangères pour en faire des copies nationales. Pratiquement tous les avions de chasse chinois sont basés sur des modèles volés ou issus de la rétro-ingénierie.

Il existe un précédent en matière de rétroconception de moteurs d’avion, mais si la Chine a largement accès aux moteurs d’avion russes, les tentatives de Pékin pour produire ses propres modèles nationaux ont été largement infructueuses.

L’une de ses premières versions d’un moteur de conception nationale, le WS-10A, tombait régulièrement en panne après seulement 30 heures d’utilisation. Les raisons de ces échecs sont multiples. Tout d’abord, la Russie sait que la Chine a déjà volé sa propriété intellectuelle par le passé et est réticente à vendre à Pékin ses meilleurs moteurs. Moscou ne vend pas non plus de moteurs seuls, mais les intègre à des jets existants, ce qui rend leur copie difficile.

Deuxièmement, les compétences en matière de rétro-ingénierie ne se traduisent pas facilement par des compétences en matière de développement de nouveaux moteurs à réaction à partir de zéro. Cela exige un savoir-faire technologique dont le développement nécessite des années d’apprentissage intensif et des générations pour le perfectionnement.

‘L’apogée’ de la fabrication technologique

L’avion de chasse furtif J-20 photographié de profil. Reuters

Le plus important est peut-être que la fabrication des moteurs à réaction est tout simplement extrêmement complexe. « Il y a quelques technologies qui sont vraiment à l’apogée de la fabrication technologique », et les moteurs à réaction en font partie, explique à Insider Timothy Heath, chercheur en matière d’affaires internationales et de défense au think tank Rand Corporation.

« Ces technologies haut de gamme sont si difficiles à maîtriser que très peu de pays y parviennent. Beaucoup ont échoué », ajoute-t-il. La principale difficulté réside dans la métallurgie et l’usinage. Un seul moteur d’un avion de ligne civil Boeing 747, par exemple, comporte au moins 40 000 pièces. Les températures dans ce moteur peuvent atteindre 1 370°C, et ses pales de ventilateur peuvent tourner plus de 3 000 fois par minute pendant un vol de plusieurs heures.

Les plans d’un tel moteur peuvent être copiés, mais les secrets de la production et de la mise en forme de pièces métalliques capables de résister à ces températures et de tourner à des vitesses aussi élevées pendant des milliers d’heures — sans parler des facteurs externes comme la résistance au vent et la corrosion — sans se briser ne sont pas faciles à trouver.

Un autre inconvénient pour la Chine est que les entités chargées de développer ces machines complexes sont des entreprises d’État. Historiquement, les entreprises publiques ont du mal à innover et à développer des technologies de pointe. La dépendance à l’égard de la rétro-ingénierie montre que c’est le cas de la Chine, même s’il existe certainement des exceptions.

« Elles sont plus aptes à faire de la rétro-ingénierie de composants plus simples et à construire des choses plus simples », estime Timothy Heath. « Tout cela exige un niveau d’expertise et de compétence que les entreprises d’État ne maîtrisent pas toujours. Il faut reconnaître les limites des entreprises d’État chinoises en matière d’innovation. »

‘Une technologie cruciale ne s’achète pas’

Un avion de combat furtif J-20, photographié lors d’un salon aéronautique en 2016. REUTERS/Stringer

La Chine est plus que consciente de ses problèmes de moteurs. Liu Daxiang, directeur adjoint du comité scientifique et technologique de la société d’État Aviation Industry Corporation of China, a qualifié l’année dernière le développement des moteurs à réaction nationaux de « tâche politique sérieuse et urgente » et a affirmé que la Chine était confrontée à un « défi sans précédent. »

« Les pays établis dans le domaine de l’aviation sont devenus plus stricts avec nous en ce qui concerne l’accès à la technologie « , avait déclaré Liu Daxiang, ajoutant que les récents efforts des États-Unis pour restreindre les opportunités de l’entreprise de télécommunications chinoise Huawei « nous indiquent que la technologie cruciale ne peut pas être achetée, même si vous dépensez beaucoup « .

Pour tenter d’obtenir un accès direct aux secrets de fabrication des jets, l’entreprise d’aviation publique chinoise Skyrizon, qui figure sur la liste noire du gouvernement américain, a essayé d’acquérir une participation majoritaire dans Motor Sich, une entreprise ukrainienne qui est l’un des plus grands producteurs de moteurs pour hélicoptères, jets et missiles.

Mais le gouvernement ukrainien a mis fin à l’opération cette année, très probablement en raison de la pression exercée par les États-Unis. Malgré ces revers, la Chine a fait quelques progrès. Les variants modernes du WS-10 ont suffisamment progressé pour que certains avions à réaction chinois en soient équipés, notamment de nombreux J-20.

Des sources chinoises ont déclaré à Insider que le WS-15, un moteur conçu spécifiquement pour le J-20, « pourrait être terminé d’ici un ou deux ans » et qu’une fois ces moteurs installés, le J-20 sera « à égalité » avec le F-22 Raptor américain de cinquième génération.

Stylos à bille, puces électroniques et moteurs à réaction

Un couple de J-20. Reuters

Mais de nombreux défis subsistent. La complexité des matériaux et du processus métallurgique, les coûts d’acquisition et de maintien de l’expertise scientifique et d’usinage, ainsi que la réticence des autres pays à aider la Chine par crainte d’un vol de propriété intellectuelle n’en sont que quelques-uns.

La Chine est confrontée à une situation similaire pour la fabrication de micropuces et de semi-conducteurs haut de gamme. Malgré des centaines de millions de dollars investis et des efforts importants de la part des entreprises d’État, la Chine n’a pas été en mesure de créer ses propres puces informatiques.

« Certaines de ces technologies sont extrêmement difficiles à mettre en œuvre, et peu importe la somme d’argent investie, si l’on ne dispose pas de la bonne combinaison de personnes, de technologies et de compétences, les choses ne se feront pas si facilement », explique Timothy Heath.

Mais la Chine n’abandonne pas facilement. En 2017, une entreprise d’État chinoise a annoncé son intention de produire en masse des pointes de stylos à bille pour la première fois. La Chine fabriquait déjà des milliards de stylos, mais ce n’est qu’après un effort de cinq ans et de plusieurs millions de dollars dépensés qu’elle a développé la technologie permettant de fabriquer des pointes pour ces stylos au niveau national.

« Tous ces éléments ne peuvent être atteints que grâce à des investissements à long terme et à un développement progressif », affirmait à l’époque un chercheur chinois.

Business Insider Mis à jour le 10/06/2021 à 9h54

Version originale : Benjamin Brimelow/Insider

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madredios

La Chine ne fait que copier ce qui existe ailleurs.