Des activistes appartenant à des groupes islamistes faisant partie du mouvement djihadiste salafiste ont récemment lancé une série d’attaques de sabotage dans la bande de Gaza, notamment contre des installations du Hamas. Ces groupes qui, contrairement au mouvement salafiste non-violent “Da’wah”, soutiennent le terrorisme violent, ne constituent pas pour l’instant une menace au régime du Hamas à Gaza. Ils ont néanmoins acquis un pouvoir de nuisance conséquent et perturbent l’ordre et l’État de droit dans la bande.

Ces activistes musulmans ont une vision du monde semblable à celle des terroristes dans la péninsule du Sinaï et appartiennent à des organisations militantes, comme Ansar Baït al-Maqdis (« Partisans de Jérusalem ») et Jundallah (« Soldats de Dieu »), qui sont affiliées au groupe État islamique (EI).

Ils ont jusqu’ici mené à Gaza des opérations telles que poser des engins explosifs près des installations de protection sociale et d’emploi du Hamas et de l’UNRWA. Ils ont aussi placé des bombes près de la maison de Fathi Hamad, ancien ministre de l’Intérieur du Hamas, et dans l’ancienne villa du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas. Ils ont également menacé d’élargir leurs opérations et d’attaquer les responsables du Hamas à Gaza, qu’ils considèrent comme des traîtres et des hérétiques. On croit que les missiles récemment lancés sur Israël faisaient aussi partie de leurs opérations.

Les services de sécurité du Hamas ont riposté avec force. L’un des leaders des activistes, l’imam salafiste radical Adnan Khader Maya du camp de réfugiés al-Bureij, a été arrêté par le Hamas après avoir attaqué le régime et s’être affilié à l’EI. Trente autres activistes ont été arrêtés avec lui et une trentain d’autres sont recherchés par les services de sécurité intérieure. Le Hamas a également détruit une mosquée utilisée par les activistes.

Les radicaux opèrent dans le sillage d’un différend qui a commencé il y a plus de sept ans, lorsque le Hamas a pris le pouvoir à Gaza. Les activistes salafistes djihadistes de Gaza avaient alors aidé le Hamas à chasser les hommes du Fatah de la bande de Gaza et forcé des centaines de partisans de l’Autorité palestinienne à s’échapper à Ramallah. En échange de leur aide, ils avaient exigé que la charia devienne l’unique source de droit dans la constitution officielle du régime à Gaza, comme c’est le cas aujourd’hui dans les parties de l’Irak et de la Syrie contrôlées par l’EI.

Le Hamas a refusé. Il y a trois ans, lors de violents affrontements, Hisham Al Saedni, également connu sous le nom de guerre Abou Walid al-Maqdissi, un activiste militaire et leader musulman, a été tué. La tension entre le Hamas et les radicaux salafistes n’a dès lors cessé de croître.

Quelle est donc la différence entre le Hamas, une organisation terroriste composée de fidèles musulmans pratiquants, et les terroristes djihadistes salafistes qui sont fidèles à l’EI? Pourquoi se battent-ils si violemment les uns contre les autres dans la bande de Gaza?

Leur première et principale différence idéologique est que le Hamas est aussi une organisation nationale palestinienne. Son but est uniquement de lutter contre Israël à l’intérieur des frontières de la patrie palestinienne. Le chef du Hamas, Khaled Mechaal, a déclaré à de nombreuses reprises que le Hamas n’ambitionne pas de mener des opérations en dehors de la Palestine. Ces déclarations ont valu au groupe le droit de participer à l’élection de 2006 et subséquemment au gouvernement d’union avec le Fatah.

Ce n’est pas le cas des groupes salafistes affiliés à l’EI. Leur idéologie est transnationale, anti-nationale. Ils ont attaqué les dirigeants des Frères musulmans, comme le fondateur du Hamas, le cheikh Ahmed Ismail Hassan Yassin, le leader le plus important de la Fraternité sur le plan mondial et leader spirituel du mouvement, le cheikh Youssef Al-Qaradhawi, le leader des Frères en Tunisie, Rached Ghannouchi, et même l’ancien président égyptien, Mohammed Morsi, qui tous intègrent une composante nationale dans leur idéologie.

Il n’est pas étonnant que ces fervents groupes musulmans contre le principe de l’État nation soient en plein essor dans les endroits où les dirigeants arabes nationaux ont échoué. La nation arabe est répartie dans des Etats dont les frontières ont été définies par les impérialistes; quand ces pays se sont désintégrés, un État islamique sans frontières nationales où il est possible de se déplacer en toute liberté a vu le jour. Nous voyons ce qui se passe en Irak, en Syrie et aussi, dans une certaine mesure, en Libye et au Yémen. Est-ce le sort des Palestiniens, qui n’ont pas encore réussi à établir leur propre Etat nation? Peu probable, mais en attendant la violence fait rage.

Danny Rubinstein est conférencier sur les questions arabes à l’Université Ben Gourion de Beersheva ainsi qu’à l’Université hébraïque de Jérusalem. Il est également spécialiste des questions économiques palestiniennes et tient une chronique dans le journal israélien “Calcalist”.

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