On oublie la plupart du temps, que ce Proche Orient qui donne du fil à retordre au reste du monde a reçu ses frontières actuelles d’un Occident colonisateur, n’ayant qu’une estime très limitée pour les habitants de cette région, leur culture et leurs croyances.

L’évolution de la politique internationale, le jeu des grandes puissances et surtout la décolonisation et la renaissance de l’État d’Israël ont fini par changer de fond en comble, la donne. Au fur et à mesure que l’on avançait, les masses arabes de ces pays aux frontières imposées de l’extérieur, se sont rebellées contre les régimes en place qui étaient tous des dictatures militaires, anti-démocratiques et largement corrompues. On ne compte plus les coups d’État survenus en Syrie, en Irak, en Libye et même en Egypte. Incapables de se réformer politiquement, ces pays arabo-musulmans ont assisté à l’émergence d’un islam politique que l’on appelle tout simplement l’islamisme.

Récemment, les mouvements sociaux qui se firent jour, d’abord en Tunisie, ont reçu l’appellation de printemps arabe, une expression vite démentie par la suite : aucun de ces pays n’a réellement donné naissance à une structure politique répondant aux critères d’une démocratie crédible. Aucun. Et dans au moins deux pays arabes où les Islamistes ont accédé au pouvoir, l’expérience n’a pas été concluante : tant en Tunisie qu’en Égypte, les islamistes ont dû rétrocédé le pouvoir, soit par la violence armée, soit pacifiquement, comme en Tunisie. Mais dans les deux cas, cette expérience laisse derrière elle, des pays exsangues, à l’économie ruinée.

Toutefois, ces développements ne sont rien, comparés à ce qui passe en Syrie et en Irak, du fait de cet État islamique qui entend procéder, par la violence armée et des actions barbares, à un bouleversement total des frontières sur place : ce n’est pas un hasard si les djihadistes se sont emparés (près de 9 régions en Mésopotamie) de larges portions de territoire à cheval sur les deux pays limitrophes, la Syrie et l’Irak. Ce n’est pas un hasard s’ils ont attaqué l’armée libanaise en occupant une petite ville frontalière, habitée par des chrétiens. Ce n’est pas un hasard s’ils vont passer à l’action contre la petite Jordanie, elle aussi, fruit d’un découpage de l’ancienne puissance coloniale britannique… On dit les USA et Israël très préoccupés par ce qui risque de se passer tout près de la vallée du Jourdain. On le voit, Israël n’en a pas entièrement fini avec le Hamas, qu’il lui faut déjà se préparer à d’autres confrontations avec les islamistes.

Saddam Hussein avait déjà tenté de faire du Koweït la dix-huitième province irakienne. L’Iran a des vues sur certaines îles au large de Bahreïn. Quant à Israël, ce n’est un secret pour personne que le plus lourd contentieux du dossier palestinien porte justement sur les frontières et le statut de Jérusalem.

Que va-t-il se passer ? On paie les négligences et les omissions, volontaires ou involontaires des grandes puissances. L’attitude des islamistes est guidée par la volonté d’unir sous sa bannière tout un empire régi par une seule religion, la leur, et une loi confessionnelle, la charia.

Au lieu de réagir aujourd’hui dans le désordre et la précipitation, l’Occident chrétien aurait dû se manifester bien plus tôt et de façon concertée. Quand on voit ces populations chrétiennes en pleurs, le regard hagard, serrer contre leur cœur les combattants kurdes qui leur ont sauvé la vie et les ont accueillis chez eux. L’Occident a toujours minoré le danger islamiste. Personne, en Europe ou ailleurs n’a osé appeler les choses par leur nom et admettre que ces djihadistes entreprennent une reconquête religieuse qui a des dimensions mondiales. Leur plan est clair : d’abord avoir raison d’un monde musulman qu’ils veulent assainir et purifier selon leurs propres critères. Ensuite, s’en prendre au monde entier.

Et qui trouve-t-il en face de lui, ce monde djihadiste ? Des nations apeurées, tétanisées à l’idée de voir trépasser un seul de ses soldats, comme si les guerres étaient la guerre des boutons… Citons encore Clausewitz : les conflits ne naissent pas de la volonté des hommes, mais de la rupture d’équilibre…

Fallait-il attendre que les djihadistes soient aux portes d’Erbil pour que les USA qui y ont des intérêts, interviennent enfin ? Il a fallu que l’on ait le couteau presque sous la gorge pour que les USA, la Grande Bretagne et la France interviennent enfin …

Et même si les nations occidentales finissaient par avoir raison des djihadistes, ce qui est hautement vraisemblable, plus rien ne sera comme avant. Des secousses telluriques sont à redouter : que faire de pays comme le Liban, la Jordanie, les Emirats, Bahreïn et quelques autres, aux frontières si mal assurées et qui font l’objet des convoitises de pays limitrophes ?

La décennie qui vient nous donnera la réponse. Mais une chose est sûre, les choses ne seront plus jamais comme avant. Et le seul pays démocratique et fort militairement reste Israël.

Un Israël qui doit faire preuve d’une diplomatie très sublime pour faire face aux bouleversements qui se préparent dans sa région.

Maurice-Ruben HAYOUN

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o.icaros

« On oublie la plupart du temps, que ce Proche Orient qui donne du fil à retordre au reste du monde a reçu ses frontières actuelles d’un Occident colonisateur, n’ayant qu’une estime très limitée pour les habitants de cette région, leur culture et leurs croyances. », écrivez-vous.
Si les Turcs n’avaient pas colonisé, plus de 5 siècles, toute cette partie du monde, l’Occident n’aurait pas eu à se mêler des affaires du Proche Orient. Ces pays auraient fait comme les autres pays, par les guerres, ils auraient fixé leurs frontières, conclu des traités entre eux et acquis une maturité politique et démocratique. C’est ce qui leur manque. Plus de 5 siècles de souveraineté politique. Tous les problèmes au Proche Orient, c’est l’héritage des Turcs, comme, d’ailleurs, dans l’ancienne Yougoslavie… La Serbie avait eu pour maître détesté le Turc. La Croatie, l’Autriche.