Une guerre chimique difficile à cerner par les faits – à Douma comme à Salisbury

Les gens meurent, mais la provenance des instruments chimiques de cette guerre est devenue plus une question de politique que de faits vérifiés.

La portée et la nature exactes de la catastrophe qui a rattrapé la zone de guerre conflictuelle de Douma à l’est de la Ghouta, à l’extérieur de Damas, deviennent de plus en plus insaisissables à mesure que les allégations circulent. Le Jaysh al-Islam, le groupe rebelle qui détient Douma, a été le premier à accuser l’armée syrienne, samedi 7 avril, d’avoir attaqué le peuple de Douma avec du gaz toxique, faisant 500 victimes. Dimanche, le bilan des décès oscillait entre 150 et 500 morts.

Le Département d’Etat américain citait le chiffre d’au moins 43 à 48 morts. Les premiers intervenants ont signalé que des familles entières avaient étouffé dans leurs maisons et leurs refuges en régurgitant de l’écume baveuse (ou mousse) de leur bouche. Puis, le président Donald Trump a désigné Poutine et l’Iran comme les principaux soutiens de « l’Animal Assad », dont les hélicoptères de la force aérienne sont accusés par les forces rebelles d’avoir largué des barils de bombes remplis de sarin sur les civils de Douma. Trump ajoute qu’Assad devra payer le prix de sa sauvagerie. Les ministres Israéliens des affaires stratégiques et de la sécurité publique, Gilad Erdan et de la construction, Yoav Galant, appuient cette position de fermeté face à « l’ange de la Mort » Assad (dixit Galant) et contre « l’hypocrisie » internationale (dixit Erdan).

Damas et Moscou réfutent cette accusation, accusant les rebelles syriens de montages. La Russie a publié dimanche une déclaration dans laquelle elle avertit que toute intervention militaire étrangère sous des « prétextes fallacieux et montés de toute pièce » dans des régions de Syrie où des militaires russes sont déployés « pourrait avoir des conséquences très graves ».

Malgré cette rhétorique enflammée, les sources de DEBKAfile au Moyen-Orient ne perçoivent aucun changement immédiat dans la situation actuelle. La Russie n’est pas sur le point de changer sa politique en Syrie et les Américains ne semblent pas prêts à se précipiter dans d’autres actions, et certainement pas danz une répétition des frappes de missiles de 2017 sur une base aérienne syrienne (Al-Shayhat) en réponse à une attaque chimique syrienne. Certaines sources à Washington soupçonnent certains groupes d’opposition syriens de faire monter la pression dans l’espoir de provoquer un sursaut (Surge) militaire américain en Syrie, en inversant l’intention annoncée par le président Trump de ramener les troupes américaines à la maison.

Si des armes chimiques ont effectivement été utilisées contre les civils de Douma, cela peut ne jamais être définitivement prouvé, d’une manière ou d’une autre – et même dans ce cas, il ne sera peut-être pas possible de clouer au pilori la responsabilité de telle ou telle partie. La même opacité recouvre les causes de l’empoisonnement de l’ancien agent russe Sergei Skripal et de sa fille Yulia, qui était en visite à Moscou lorsqu’ils ont été frappés par un agent neurotoxique à Salisbury, au Royaume-Uni, le 4 mars. Tous les deux récupèrent peu à peu, dans un hôpital local. Les Britanniques accusent le président russe Vladimir Poutine et ses services d’espionnage de la tentative d’assassinat, alors que Moscou pointe du doigt les services secrets britanniques comme étant les véritables coupables. Les Russes ont convoqué l’organisation de surveillance pour l’interdiction des armes chimiques en lui réclamant une enquête sur la source de l’agent toxique et ont exigé un rôle dans cette enquête. Londres a refusé à Moscou l’accès à sa propre investigation.

Le bilan de l’OIAC, censé faire toute la lumière sur les allégations de guerre chimique reste sommaire. L’organisation a obtenu pleine autorité pour mener une enquête à grande échelle une seule fois, dans les années 2014-2015, lorsque les États-Unis et la Russie ont accepté de liquider les stocks de produits chimiques syriens. Le gouvernement d’Assad a prétendu avoir détruit ces stocks, mais il s’est avéré par la suite avoir jeté de la poudre aux yeux des observateurs de l’OIAC. Depuis lors, les produits chimiques toxiques sont de plus en plus répandus dans la guerre syrienne et le public, bien que loin d’accepter ce crime de guerre, s’est habitué et n’est plus aussi horrifié que par le passé. En effet, la désinformation sur l’utilisation de produits chimiques illégaux dans la guerre est devenue un outil pratique de propagande dans les conflits internationaux.

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Adaptation : Marc Brzustowski

Chemical warfare hard to pin down by facts – in Douma as in Salisbury

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