Le président Mahmoud Abbas est accusé de mégalomanie. Des voix s’élèvent contre le chantier géant d’un nouveau palais s’étendant sur 2,7 hectares et doté de deux héliports

Un vent mauvais souffle sur Ramallah. Cette fois, ce n’est pas à cause de l’occupation israélienne, mais d’un projet grandiose développé par le Pecdar, le Conseil économique pour la reconstruction de l’Autorité palestinienne (AP). Un chantier géant grâce auquel un nouveau palais s’étendant sur 2,7 hectares et doté de deux héliports devrait être achevé d’ici à deux ans.

Dérive autoritaire

Censé remplacer le «Moukhata», le siège historique de l’AP dans lequel Yasser Arafat s’était retranché durant la deuxième intifada, le bâtiment est d’ores et déjà en construction sur une colline de Surda, une banlieue excentrée de Ramallah. Son coût? Treize millions de dollars au bas mot. Et c’est précisément ce montant qui alimente les conversations dans les territoires palestiniens car l’AP peine à équilibrer son budget depuis que les traditionnels pays donateurs sont frappés par la crise économique. Malgré son déficit de deux milliards de dollars, elle proclame en tout cas que les travaux seront financés sans aide extérieure.

Officiellement, la seule vocation du «palais de Surda» sera d’accueillir les chefs d’Etat étrangers dans un cadre moins étriqué que celui du «Moukhata». Sur le site internet du Pecdar qui présente une image informatisée du projet, le bâtiment est d’ailleurs présenté comme une résidence réservée aux hôtes de marque de l’AP.

Mais le Hamas et les autres ennemis politiques de Mahmoud Abbas (80 ans) n’y croient guère. Ils accusent ce dernier de vouloir installer sa résidence dans le nouveau bâtiment «au frais de nos frères de Gaza dont les habitations n’ont toujours pas été reconstruites depuis la fin de l’opération «Bordure protectrice» de l’été 2014».

L’«affaire du palais» éclate dans la foulée d’une série de scandales politico-financiers qui ont éclaboussé l’AP et le Fatah (le parti d’Abbas) et choqué l’opinion palestinienne. Les arguments des opposants au projet trouvent donc des oreilles attentives. Et pas seulement au sein de l’AP. En Israël, où les médias relaient largement les prises de position des uns et des autres, le «Yecha» (le lobby des colons) en profite pour se gausser de la «mégalomanie» du président palestinien.

Dans les rues de Ramallah, c’est surtout la «dérive autoritaire» de Mahmoud Abbas qu’un nombre grandissant de Palestiniens commence à dénoncer à voix basse. Car, ces derniers mois, les services de sécurité de l’AP ont menacé, arrêté sans mandat ou fait poursuivre en justice les journalistes jugés «trop critiques» à l’égard de la politique présidentielle.

Mahmoud Abbas ne se contente pas de faire taire les voix dissidentes. Bien qu’il évoque régulièrement l’éventualité d’un départ à la retraite, il fait le vide autour de lui en écartant ceux qu’il estime susceptibles de vouloir lui succéder ou qui dénoncent ses méthodes de gouvernement. Son vieil ennemi Mohammed ­Dahlan, ancien chef de la sécurité préventive de la bande de Gaza, est évidemment le premier sur la liste. Mais il n’est pas le seul puisque l’ex-premier ministre Salam Fayyad et l’ex-conseiller présidentiel Yasser Abed Rabbo sont également dans sa ligne de mire.

Poursuites judiciaires

A l’instar de Mohammed Dahlan, qui a été blanchi par la justice locale, Salam Fayyad est menacé de poursuites judiciaires pour «fraude et corruption». Quant à Abed Rabbo, le président de l’AP, qui est aussi celui de l’OLP, l’a limogé le 2 juillet dernier de sa fonction de secrétaire général (numéro deux) de cette organisation. Parce qu’il avait, parmi de nombreuses autres critiques d’ordre politique, dénoncé l’«inutilité» du palais de Surda.

Le Temps

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