Lutte contre l’antisémitisme : en Angleterre, agiter un drapeau du Hamas sera passible de prison

Coup double

La ministre de l’intérieur britannique, Priti Patel, a placé en milieu de semaine, le parti islamiste palestinien Hamas sur la liste des organisations reconnues comme terroristes par le gouvernement britannique. Jusqu’à présent, seule sa branche armée était classée comme telle.

Priti Patel a donc décidé de clarifier les choses : « La liste actuelle du Hamas crée une distinction artificielle entre les différentes parties de l’organisation », a-t-elle expliqué lors d’un discours prononcé le 19 novembre. Pour se justifier, la redoutable ministre a indiqué que « le Hamas disposait d’importantes capacités terroristes, y compris l’accès à des armes étendues et sophistiquées, ainsi qu’à des installations d’entraînement… »

Mais son argument le plus percutant et le plus étonnant est ailleurs : Prita Patel estime également que cette décision permettra de lutter contre l’antisémitisme qui renaît de ses cendres au Royaume-Uni. « Le Hamas est fondamentalement et farouchement antisémite, » a-t-elle rappelé. « Et l’antisémitisme est un mal persistant que je ne tolérerai jamais. Les Juifs se sentent régulièrement en danger – à l’école, dans les rues, lorsqu’ils prient, chez eux et en ligne. Cette mesure renforcera les arguments contre quiconque agite un drapeau du Hamas au Royaume-Uni, un acte qui ne manque pas de créer un sentiment de danger dans la communauté juive. »

HAUSSE DES AGRESSIONS ANTISÉMITES

Agiter un drapeau du Hamas sera désormais considéré en Grande-Bretagne comme un acte criminel et punissable de quatorze années de prison. Une prise de position sévère mais guère étonnante de la part d’une femme réputée pour son soutien politique fort à Israël. La ministre d’origine indienne avait été forcée de démissionner d’un précédent poste de ministre en 2017 après avoir séjourné en Israël et y avoir eu des rencontres officielles sans l’accord de la Première ministre Theresa May.

L’initiative survient alors que les actes antisémites ont atteint un niveau record. Selon le rapport récemment publié par le Community Security Trust (CST), une association en charge de la protection de la communauté juive, le nombre d’incidents répertoriés lors des six premiers mois de l’année 2021 a atteint un niveau jamais égalé depuis l’entame des décomptes en 1984. Même si la police estime que 60 % des victimes ne se rendent jamais auprès des autorités, 1308 incidents ont été répertoriés et classés comme antisémites, soit 49 % de plus que lors du premier semestre 2020.

Parmi les incidents, l’association comptabilise les agressions physiques (87 cas, en hausse de 67 %), dont deux qualifiées d’« extrême violence » et verbales (1073 cas, +45 %), ainsi que le vandalisme et les menaces. Ils comprennent aussi bien les actes portés pour des motifs religieux, « la haine du juif », et politiques, « le rejet violent de la stratégie menée par Israël dans les territoires palestiniens ». Pour les rapporteurs, « l’escalade de la violence en Israël et en Palestine » entre mai et août, a été le principal facteur contribuant à la hausse des actes antisémites. Le CST a enregistré 639 incidents en mai, le plus grand nombre jamais atteint en un seul mois.

LE PROFIL DES AGRESSEURS

Le rapport précise également la description physique des assaillants dans 455 incidents. Ainsi, les Européens blancs, qui représentent 87 % de la population nationale, ont commis 37 % de ces crimes ; des personnes qualifiées d’Arabes ou d’Africains du Nord 35 % ; des Noirs 11 % ; des Sud asiatiques (notamment les Bangladeshis, les Pakistanais et les Afghans) 1 %. Mais les rapporteurs précisent que cet équilibre est lié à l’embrasement du conflit israélo-palestinien. Lors du premier semestre 2020, une période beaucoup plus calme, 69 % des incidents avaient été réalisés par des blancs.

Journaliste spécialisé sur la question, Daniel Trilling, n’est guère surpris par ces chiffres pusiqu’« il existe un antisémitisme latent et historique dans la société britannique ». Il rappelle ainsi que « des émeutes antisémites ont eu lieu en 1947 dans dix villes du pays suite à l’assassinat de soldats britanniques en Palestine. Il y avait eu des blessés, des vitrines de magasins tenus par des juifs avaient été brisées et des gens avaient clamé « Hitler avait raison, exterminons tous les Juifs ! », alors que nous étions moins de deux ans après la guerre. »

L’establishment britannique n’est pas non plus au-dessus de tout soupçon. En septembre 2013, le tabloïd Daily Mail avait été accusé d’antisémitisme après un article consacré au leader de l’opposition travailliste Ed Miliband et à son père, d’origine juive.

Enfin, preuve de la méconnaissance du public sur ces questions, une enquête d’opinion publiée il y a deux semaines a révélé que 52 % des Britanniques ne savaient pas que la Shoah avait abouti à la mort de 6 millions de juifs !

Par Tristan de Bourbon Publié le 26/11/2021 www.marianne.net

Manifestation pro-palestinienne devant le domicile de Priti Patel. AFP

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