Qui était Ovadia de Bertinoro (vidéos)?

Rabbi Obadia de Bertinoro, de Cesena à Jérusalem

De 1267 à 1483, la population juive est passée à cinq cents personnes pour une population globale estimée à trois mille habitants. La communauté juive comprend désormais des exilés espagnols et des immigrants d’Europe centrale. Elle prospère jusqu’à la fin du XVème siècle, malgré les frictions avec les autorités ottomanes sur les taxes de péage, la capitation et l’usage des synagogues. (1)

Pendant cette période Jérusalem est le théâtre de violences récurrentes, liées des conflits portant sur l’attribution de tel ou tel site à telle ou telle religion. Félix Fabri, frère dominicain allemand et pèlerin à Jérusalem, explique ainsi à la fin du XVe siècle que les différends portent bien davantage sur les espaces consacrés – le site du Temple et le Saint-Sépulcre, notamment – que sur la question de la souveraineté sur la ville.

Un Rabbin qui vient d’Italie

Le rabbin Obadia ben Abraham de Bertinoro, en Italie, populairement connu sous le nom de «Bartenura», est né en 1455. Il était un élève du célèbre rabbin Yossef Colon et a agi en tant que rabbin de sa ville, Bertinoro, dans la province de Cesena.
Son nom est mentionné dans un document papal officiel du , à la tête des banquiers autorisés à accorder des prêts à intérêt pour les résidents chrétiens de la ville, où figure entre autres l’exemption pour tous les banquiers juifs de négocier aux jours fériés juifs.
Dès son plus jeune âge, son désir était de s’installer en Eretz Israël, et plus particulièrement à Jérusalem. Nous connaissons les détails infimes de son voyage en Israël car beaucoup de ses lettres décrivant le voyage ont été retrouvées récemment.
Il quitta sa ville natale à la fin de 1486, il quitta sa ville natale et se dirigea vers Rome. Il est arrivé à Naples et s’est installé à proximité à Salerne pendant quatre mois. En 1487, il arriva à Palerme, en Sicile, où il passa trois mois à prêcher chaque Shabbat dans la synagogue locale. En Sicile, la communauté a essayé de le convaincre de rester leur rabbin, mais il a refusé.
De Messine, il traversa Rhodes en direction d’Alexandrie, en Égypte, où il arriva au début de 1488. D’Alexandrie, il se rendit au Caire, où le rabbin Natan ha-Kohen Shoulal le reçut avec grand honneur. Le rabbin Shoulal lui a également proposé de rester au Caire, mais a de nouveau refusé à cause de son désir ardent de s’installer à Yerushalayim.
Il a continué son voyage à travers Gaza, Hébron et Bet Lehem en arrivant à Jérusalem juste avant Pessah de 1488.

Rabbi Obadia de Bertinoro arrive à Jérusalem en 1488

Son arrivée a été une grande bénédiction pour la ville sainte. Jérusalem était au bord de la ruine. Les riches avaient fui la ville à cause des taxes exorbitantes exigées par le gouvernement musulman local.
La communauté juive de Yerushalayim était dans l’un de ses pires moments. Il y avait environ 70 familles juives dans la ville, toutes très pauvres et personne pour les aider. Le rabbin Obadia écrit: «dans la ville, il y a beaucoup de veuves et beaucoup de vieillards ashkénazes, séfarades et d’autres pays abandonnés… ceux qui ont du pain pendant une semaine sont considérés comme riches…»« Mais que dois-je vous dire sur ce pays ? Grande est la solitude et grandes sont les pertes et, pour décrire cela brièvement, plus les lieux sont sacrés, plus grande est leur désolation ! Jérusalem est plus désolée que le reste du pays[1]. »
Dans une de ses lettres à sa famille, le rabbin Obadia écrit qu’à son arrivée à Jérusalem, il a été reçu par un rabbin italien, Ya’aqob Colombano, le principal rabbin de la ville. Le rabbin Obadia écrit que ce rabbin était si pauvre qu’il ne pouvait se permettre de manger un morceau de pain que pendant le Shabbat, et pendant la semaine, il ne mangeait que des caroubes sèches, c’est-à-dire, les restes d’une caroube une fois son jus extrait.
Au début, le rabbin Obadia devait s’occuper tout seul de tous les besoins de la communauté. Il a même dû creuser les tombes et enterrer les morts, car personne d’autre n’était disposé à assumer ce devoir religieux.
Le rabbin s’est chargé de collecter des fonds pour aider les habitants de Yerushalayim. Ses relations en Italie l’ont aidé à aider les nécessiteux. Peu de temps après, il créa des associations caritatives pour les pauvres et une assistance médicale pour les malades.
Emanuel Hai Camerino, de Florence, l’homme que Rabbi Obadia avait confié pour gérer ses propriétés à Cesena, lui a envoyé 100 ducats par an, auxquels il a ajouté 25 autres ducats à la charité. Le frère du rabbin Obadia et d’autres familles riches d’Italie ont également envoyé leurs généreuses contributions.
En quelques années, en raison de sa grande réputation dans la ville, même des citoyens musulmans sont venus le voir pour résoudre des affaires judiciaires.
Le rabbin Obadia a obtenu la suppression de la taxe annuelle de 400 ducats que la communauté juive devait payer aux autorités musulmanes locales. Au lieu de cela, une taxe plus raisonnable a été instituée.
En 1492, lorsque les Juifs ont été expulsés d’Espagne, de nombreux réfugiés se sont installés à Jérusalem. Le rabbin Obadia est devenu leur chef spirituel et il les a soutenus matériellement pendant un certain temps, car ces réfugiés espagnols (= séfarades) sont arrivés sans aucun moyen.
Mais bientôt, grâce à l’arrivée de ces juifs très éduqués et formés au commerce et au commerce international, la communauté a commencé à se développer. En signe de leur immense gratitude, les réfugiés d’Espagne ont offert à Rav Bertinoro le meilleur cadeau qu’il aurait pu demander: créer une  Yeshiva (académie rabbinique) à Yerushalayim. Ce fut un événement historique.
Rabbi Obadia a été déclaré comme «abi hayshub» de Yerushalayim, l’équivalent du protecteur ou bienfaiteur maximum de la ville. Il mourut en 1515 et fut enterré sur le mont des Oliviers (Har haZetim).
Des milliers de fidèles sur la tombe du Rav Ovadia de Bartenoura – chiourim

Ses livres

Le rabbin Obadia de Bertinoro est connu pour ses commentaires sur la Mishna. La Michna comprend les traditions orales rabbiniques, c’est-à-dire l’application et les détails de toutes les mitsvot de la Tora. La Mishna est étudiée généralement avec la Gemara, ce qui explique la Mishna et élabore ses détails.
Maïmonide avait été le premier rabbin qui avait écrit un commentaire indépendant sur la Mishna. Le rabbin Obadia a suivi cet exemple et a écrit ses commentaires, qui sont devenus les plus populaires pendant des siècles.
Contrairement au commentaire de Maïmonide, écrit à l’origine en arabe, celui de Rabbi Obadia a été écrit en hébreu. Le commentaire du rabbin Obadia est une excellente introduction à l’étude du Talmud.
Ses lettres de voyage, qui ont été publiées en français par Moïse Schwab (Lettres d’Obadiah, Paris, 1866), sont aussi du plus haut intérêt. Il y décrit la vie sociale et intellectuelle des Juifs de Grèce, d’Égypte et de Palestine Il s’est particulièrement intéressé aux Juifs karaïtes d’Alexandrie. Sa description des Samaritains vivant en Égypte est une des plus fidèles dont on dispose.
Commentaire de la Mishnah (sur les lois de l’agriculture et autres prières) par Bartenura, éd. de 1548 à Venise

Plaque rappelant les travaux du rabbi Ovadia à Bertinoro

Adaptation par Jforum

et https://halakhaoftheday.org/2015/08/19/rabbi-obadia-de-bertinoro-1455-1515-the-bartenura/

(1) Dans cette ville désormais majoritairement musulmane – sur dix mille habitants, on estime que Jérusalem compte au XVe siècle environ mille chrétiens et cinq cents Juifs – les persécutions et les vexations ne sont pas rares envers les non-musulmans, et les lieux de culte sont régulièrement saccagés. Tous les témoignages d’époque s’accordent sur l’aspect « désolé » qu’offre la Ville Sainte à l’époque mamelouke.

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires