Israeli Prime Minister Benjamin Netanyahu (R) and Israeli Arab Knesset member Ayman Odeh in the Knesset in Jerusalem on Sepember 11, 2019. A rare clash erupted between Prime Minister Benjamin Netanyahu and Joint List Chairman Ayman Odeh on Wednesday at the Knesset during a discussion ahead of a vote on a controversial, Likud-sponspored bill to allow cameras in polling booths. AFP PHOTO / GIL COHEN-MAGEN

Pourim

Israël ne s’est pas suicidé.

(Deuxième  partie)

Jean-Pierre Lledo

Il ne me reste plus qu’à examiner votre dernier ‘’argument’’. Pourquoi ne pas s’allier aux Arabes ? Ne sont-ils pas une partie des élus de la Knesset ? Ne représentent-ils pas 20% de la population israélienne ? Les exclure n’est-ce pas du racisme (un racisme identifié à la droite, car seule la gauche détient évidemment le monopole de l’antiracisme et des plus hautes valeurs morales) ?

Ces objections qui dans le passé auraient été le fait du seul parti d’extrême-gauche Meretz, je les ai entendues de mes propres oreilles ou lu de mes propres yeux, de personnes qui se réclament toujours du sionisme. Ultime parade pour projeter sur la droite sa propre culpabilité d’avoir franchi le Rubicon pour la première fois depuis 1948 ? Ou, mais cela serait alors terrible, nouvelle conviction ? Je préfère m’en tenir pour l’instant à la première hypothèse.

Nos amis sionistes de gauche ne se seraient-ils pas aperçus que ce n’est pas la droite qui a exclu les Arabes, mais les Arabes qui se sont eux-mêmes progressivement exclu et continuent de s’exclure ? De 1948 aux années 90, ne se disaient-ils pas ‘’Arabes israéliens’’ alors qu’aujourd’hui à l’exception d’une minorité (10% ?) ils se présentent comme des ‘’Falestiniens’’ ? Ayant voté le 2 Mars à 86% en faveur des 4 partis de la Liste unifiée arabe, l’électorat arabe (musulman et chrétien) ne s’identifie-t-il pas de plus en plus aux autres Falestiniens vivant dans les territoires administrés par l’Autorité falestinienne, avec la conséquence inévitable d’un irrédentisme qui ressemble fort à un statut de 5ème colonne ?

Mêmes symboles nationaux (hymne, drapeau) exhibés dans chaque manifestation[1], et même dans les bureaux de chaque député arabe à la Knesset (!), même dates historiques commémorées (Naqba, Journée de la Terre, etc…), même stigmatisation du socle fondateur de l’Etat d’Israël, le sionisme, même condamnation de l’Etat d’Israël dans la gestion du conflit avec l’Autorité falestinienne et le Hamas, mêmes réjouissances pour les malheurs d’Israël (par exemple les incendies criminels de forêts[2]), mêmes soutiens à BDS en transgression de la loi israélienne anti-boycott, mêmes célébrations comme des résistants politiques[3] de ceux qui ne furent que de lâches terroristes. N’était-ce pas la même Heiba Yazbak (citée dans la 1ère partie), députée de la nouvelle Knesset, qui en mai 2015 brandit  une photo du ‘’guerrier martyr Samir Kuntar’’, mercenaire qui venait d’être liquidé quelque part en Syrie par un missile israélien? Et pour ceux qui l’ignoreraient rappelons que le haut fait de résistance de ce monstre consista à fracasser le crâne d’une petite fille après l’assassinat de son père en 1979 sur un rocher de la plage de Naharya. Rappelons aussi que la Cour Suprême refusa en 2015 d’invalider cette députée comme l’exigeait la Knesset et qu’en janvier 2020, le procureur général Avichai Mandelblit s’opposa à nouveau à la disqualification de cette députée.

En conformité avec la loi dialectique de la transformation de la quantité en qualité, les 4 partis arabes ne revendiquent-ils pas, chacun à sa manière, mais chaque année avec plus de véhémence, la remise en question de l’Etat d’Israël défini dans la Déclaration d’indépendance adoptée le 14 Mai 1948 comme Etat juif[4] ? Ne désignent-ils pas l’Etat d’Israël comme un Etat d’apartheid raciste ? N’invitent-ils pas Israël, de façon de plus en plus pressante, à se dépouiller de tous ses attributs nationaux, seule manière selon eux de devenir égalitaire et démocratique, ce que résume leur slogan qui les fédère tous aujourd’hui : Israël comme ‘’Etat de tous ses citoyens’’ ?

Ce discours ‘’logique’’ auquel s’est déjà rallié une partie de la ‘’gauche’’ israélienne n’est-il pas en fait le refus de considérer les Juifs comme un peuple ayant eu une longue histoire de 3500 ans sur cette terre et par conséquent ayant le droit à s’autodéterminer, puisque selon cette ‘’logique’’ les Juifs ne sont que les adeptes d’une religion, argumentaire fondamental de toutes les Chartes de l’OLP ?

Le besoin pour le peuple juif de réitérer qu’il existait bien, en adoptant en 2018 la Loi sur la Nation, simple rafraichissement de la Déclaration d’Indépendance, ne pouvait être du goût ni des 4 partis arabes ni d’une partie de la gauche israélienne, ni de l’Europe qui depuis sa constitution a pris fait et cause pour les Falestiniens, mais au moins a-t-elle eu le mérite de mettre en évidence plusieurs contradictions.

Pourquoi exiger d’Israël qu’elle se dépouille de ses attributs juifs (son histoire, sa culture, sa civilisation, et sa religion) sans jamais rechigner aux propos maintes fois répétés de Mahmoud Abbas annonçant que le futur Etat palestinien sera ‘’Judenrein’’: « nous ne verrons pas la présence d’un seul Juif israélien, civil ou soldat sur nos terres.» [5] ?

Pourquoi alors ne pas exiger de l’Autorité falestinienne et des 57 pays musulmans qu’ils dépouillent aussi leurs Constitutions de leurs attributs identitaires ? Et ce alors que contrairement à tous ces pays, le judaïsme n’a le statut ni d’une religion, ni encore moins d’une religion d’Etat, et qu’en Israël l’athéisme n’est pas passible de prison, pas plus que de mort le blasphème ou l’apostasie…

Pourquoi alors, comme le fait chacun des 4 partis arabes selon sa sensibilité plus ou moins islamisante ou nationalisante, refuser à Israël d’être l’Etat du peuple juif et en même temps revendiquer pour soi une identité nationale bien distincte ?

N’est-ce pas  Raed Saleh le chef de la mouvance islamique en Israël qui a bâti sa popularité en transformant le lieu de prière d’El Aqsa en symbole du combat national de tous les Falestiniens, et même plus en espérant que ‘’Jérusalem, devienne le cœur d’un futur califat islamique’’ ?

N’est-ce pas  Jamal Zahalka alors président de Balad, qui a dit en février 2019 : « Balad fait partie du mouvement national palestinien. Nous ne sommes pas la gauche israélienne[6] .

N’est-ce pas  Ahmed Tibi qui, à la question du rédacteur en chef d’I24NEWS Jean-Charles Banoun[7] (‘’Si on vous présente comme un député israélien, est ce que ça vous dérange ?’’), répondait ainsi le 5 sept. 2019 : ‘Je suis député arabe qui représente la population arabe palestinienne en Israël. C’est un statut particulier de représentant d’une minorité nationale en Israël.’’ ?

N’est-ce pas  le même Ahmed Tibi qui, quelques jours plus tard (le 23), après l’adoption de la Loi sur la Nation, s’emportait ainsi : ‘’Nous sommes les propriétaires de cette terre !‘’ ?

N’est-ce pas  le député Yousef Jabareen qui déclinait son identité dans cet ordre : « Je suis Arabe, je suis Palestinien et je suis également citoyen de l’Etat d’Israël » ?

N’est-ce pas enfin Ayman Odeh, président de Hadash et de la Liste unifiée arabe qui en veillant à ménager le public juif de Tel Aviv venu s’associer à la protestation contre la Loi de la Nation (août 2018) se définissait ainsi, face à d’innombrables drapeaux falestiniens agités : « Je suis membre du peuple arabe palestinien et citoyen israélien en même temps ... » ?

Si donc l’on devait faire la synthèse des revendications actuelles des ‘’Falestiniens d’Israël’’, cela consisterait en même temps  à gommer les attributs nationaux juifs de l’Etat d’Israël (‘’l’Etat de tous ses citoyens’’)  et à constituer les Falestiniens d’Israël en minorité nationale distincte du peuple juif et ce, à quelques kilomètres d’une entité falestinienne où les Juifs ne seraient jamais admis eux aussi comme ‘’minorité nationale’’!

Plutôt donc que de se comporter comme si nous étions aux temps messianiques, quand le loup et l’agneau se mettront en ménage, ne serait-il pas temps que mes amis de la ‘’gauche’’ israélienne affrontent avant qu’il ne soit trop tard la plus grande pandémie de la bien-pensance post-moderne : le déni ? Je ne peux imaginer qu’ils aient déjà oublié les innombrables propos de dirigeants falestiniens qui expliquaient tranquillement aux leurs et en arabe que les Accords d’Oslo n’étaient que l’application d’une ‘’stratégie’’ : « La Palestine, selon notre plus haute stratégie, va de la rivière à la mer. La Palestine dans sa totalité est une terre arabe, la terre de la Nation arabe…… Si les Etats Unis et Israël avaient réalisé, avant Oslo, que le mouvement national palestinien et le mouvement panarabe était un Cheval de Troie nommé Arafat ou OLP, ils n’auraient jamais ouvert leurs portes fortifiées pour le laisser entrer à l’intérieur… » (Faycal Husseini, ministre en charge de Jérusalem jusqu’en 2001)[8].

Dans le cadre d’une répartition des tâches qui ne s’avoue pas comme telle, ’’L’Etat de tous ses citoyens’’ n’est-ce pas la contribution des Falestiniens de l’intérieur d’Israël‘’ à la stratégie’’ des Falestiniens de l’extérieur visant à « libérer notre Patrie par étapes »… (Nabil Shaath[9], négociateur des ‘’Accords d’Oslo’’) ?

Et d’ailleurs, chers amis de la ‘’gauche’’ israélienne, comment comprendre votre brusque volte-face ? Hier ‘’pour sauvegarder Israël comme Etat juif ’’  ne préconisiez-vous pas de se séparer des Falestiniens de l’extérieur ? Alors qu’aujourd’hui vous voulez inclure ceux de l‘intérieur qui ne cessent de vous dire qu’ils font partie d’un même ‘’mouvement national falestinien’’ dont le but est de s’emparer de toute la Palestine, ‘’de la rivière à la mer’’…

Plutôt que d’offenser la logique, ne pourriez-vous pas commencer à réfléchir à ce qu’Israël devrait faire pour parer à ces deux offensives coordonnées à Ramallah, appuyées par l’Europe et favorisées par le système démocratique israélien ? Et vous qui vous réclamez de l’héritage de Ben Gourion, ne gagneriez-vous pas à relire son journal consacré pour l’essentiel aux négociations qu’il entreprit durant les années 30 avec des émissaires du Mufti Amin el Husseini et à qui il ne cessait de répéter ce qui pour lui n’était justement pas négociable : « Le peuple juif veut être libre sur sa terre et ne dépendre de personne. Il veut un Etat juif……  L’indépendance du peuple juif n’est concevable que si la Palestine constitue une unité politique indépendante, c’est-à-dire un Etat juif. »[10] ?

Ce qui est sûr, c’est que les dernières déclarations des députés et des chefs des 4 partis de la Liste unifiée arabe, appellent en urgence une remise à l’heure de tous les compteurs. La Déclaration d’Indépendance de 1948 a correspondu à un équilibre entre Juifs et Arabes d’Israël durant plus de 40 ans. Cet équilibre fragile a été rompu. De facto, Israël est devenu un Etat bi-national, source de frustration, d’irritation et de violence pour les deux peuples. Pour que le côtoiement soit source d’émulation, de coopération et de paix, il doit le plus tôt possible cesser de l’être. Il est donc temps pour Israël de trouver une nouvelle formule où Juifs et Arabes pourront, sans interférence, assumer leurs destins singuliers en accord avec leurs histoires, leurs cultures, leurs langues, leurs religions et leurs symboles. Formule qui tiendrait compte des minorités arabes et non arabes désireuses de rester fidèles à l’Etat juif.

Hormis le combat prioritaire contre la pandémie, le nouveau gouvernement d’union nationale sera-t-il à la hauteur de ce challenge ?

Qui vivra verra.

 

1er Avril 2020

Jean-Pierre Lledo, cinéaste.

 

————–

[1] Le 3 janvier 2015, Ahmad Tibi brandit un drapeau falestinien sur le Mont du Temple, transformé depuis la conquête arabe en espace musulman, appelé aujourd’hui ‘’Haram Echchérif’’, et sur lequel les Juifs sont interdits de prière.

[2] En 2016, les coupables arrêtés étaient tous arabes, parmi lesquels même des étudiants du Technion de Haifa, (l’équivalent du Polytechnique français) !

[3] Ahmed Tibi : « Ce qu’Israël considère comme des organisations terroristes sont pour les Palestiniens des mouvements de libération nationale ». http://www.france-palestine.org/Ahmed-Tibi-le-trublion-de-la

[4] « EN CONSÉQUENCE, NOUS, MEMBRES DU CONSEIL REPRÉSENTANT LA COMMUNAUTÉ JUIVE DE PALESTINE ET LE MOUVEMENT SIONISTE, NOUS NOUS SOMMES RASSEMBLÉS ICI, EN CE JOUR OU PREND FIN LE MANDAT BRITANNIQUE ET EN VERTU DU DROIT NATUREL ET HISTORIQUE DU PEUPLE JUIF ET CONFORMÉMENT A LA RÉSOLUTION DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DES NATIONS-UNIES, NOUS PROCLAMONS LA CRÉATION D’UN ÉTAT JUIF EN TERRE D’ISRAËL QUI PORTERA LE NOM D’ÉTAT D’ISRAËL ».

[5] Ahmed Tibi en avril 2009, saluait une autre rengaine du président palestinien Mahmoud Abbas s’engageant à « ne jamais reconnaître Israël comme État juif ».

[6] https://fr.timesofisrael.com/balad-la-faction-renegate-de-la-liste-arabe-unie-qui-a-rejette-gantz/

[7] https://www.youtube.com/watch?v=Fv4J_40bUy4

[8] Faycal Husseini, Al Arabi, 24 Juin 2001. Ibid.

[9] Discours de Janvier 1996 à Naplouse. In ‘’Le livre noir de l’Autorite palestinienne’’. Catherine Leuchter. Editions Café Noir. Paris. 2004.

[10] Les Arabes, les Palestiniens, et moi’’, David Ben Gourion. Editions des Presses du Temps présent. Paris. 1974

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LUCCHINI PATRICE

Ces députés arabes à la Knesset, qui bénéficient de l’immunité tout en trahissant le pays qui leur a permis d’y siéger, qui appellent de leurs voeux la destruction de ce pays et de ses habitants Juifs montrent qu’il est impossible de trouver une solution politique à la volonté des Falestiniens/Palestiniens de détruire l’Etat d’Israël. Autour d’eux, pourtant, il n’y a que dictature, déni des droits de l’homme, persécution religieuse dans tous les pays dits arabes. Ce qu’ils veulent c’est rejoindre la Oumma et la « grande nation arabe » qui n’existe que dans leur imagination et leur fantasmes. Les chrétiens palestiniens leur servent d’otages et d’alibi. Mais cela la gauche ne veut pas le voir. La gauche israélienne, comme la gauche française sont gangrenés par la culpabilité, la trouille et leurs fariboles pseudo démocratiques. Réaffirmer la notion d’Etat juif, renforcer le sionisme, ne pas céder d’un pouce et punir les traîtres. Seule voie possible.

LACHKAR Norbert

SI LES ISRAELIENS N’ONT PAS TOUS COMPRIS QUE FAIRE ENTRER LES ARABES DANS UN GOUVERNEMENT ,C’EST FAIRE ENTRER LE TRES TRES MECHANT LOUP DANS LA BERGERIE,C’EST TRES GRAVE !!!!

Jankel

Contre un ennemi paranoïaque et donc convaincu, irréductible , il n’a jamais existé au monde de solution négociée, mais seulement la Victoire Totale sur l’ennemi paranoïaque.
Déjà Amalec, a posé ce problème… qui dure encore…..Le Mal et l’Ennemi sont permanents et changent seulement d’objet ou de vectorisations.
Nous sommes dans une guerre d’attrition sans attrition. Un millénaire difficile en perspective ou bien bénéficierons nous d’une Catastrophe Naturelle positive au moins un peu pour nous…qui change le braquet des fous…..? Ca m’étonnerait!
Rêvez! c’est gratos…