En septembre 2013, une prise d’otages dans un centre commercial de Nairobi (Kenya) avait causé la mort de 67 personnes. Les shebab, groupe terroriste somalien affilié à Al-Qaida, avaient revendiqué l’attaque. Dimanche, ils sont revenus sur le devant de la scène, dans une vidéo, appelant à des actions terroristes similaires aux USA, en Grande-Bretagne, au Canada mais aussi au Forum des Halles à Paris et aux Quatre Temps à la Défense. Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques), spécialiste du continent africain, analyse la pertinence de ces menaces.

Dans cette vidéo, les shebab citent des centres commerciaux aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne notamment. Pour la France, deux noms apparaissent en incrustation, sans être cités. Jugez-vous ces menaces crédibles?

Je suis dubitatif sur la pertinence de cette vidéo. Les Shebab sont affiliés à Al-Qaida, un groupe terroriste qui a perdu un poids considérable face à la montée en puissance de Daesh. Les shebab se livrent donc à une guerre médiatique, et cette vidéo est un acte de propagande.

Dimanche,  le ministre américain de la Sécurité intérieure Jeh Johnson a appelé les consommateurs à la prudence. Pourquoi l’Etat français est-il resté silencieux?

Sauf preuve du contraire, j’ai l’impression que le gouvernement n’a pas pris cette menace très au sérieux, sans pour autant dire que ce n’est pas grave. Dans une guerre contre le terrorisme, il faut tout faire pour ne pas diffuser la peur, et donc éviter de parler de ces menaces pour leur donner du crédit. Pour autant, l’Etat ne peut pas minimiser cette vidéo car si un attentat devait arriver sur le sol français, il perdrait toute crédibilité. Selon moi, les services de renseignements réagiront s’ils jugent cette menace réelle.

Pourquoi viser les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne?

Aux Etats-Unis, la diaspora somalienne est très présente (notamment dans la ville de Minneapolis, Etat du Minnesota). La communauté somalienne est aussi représentée en Italie, dans les pays scandinaves et en Grande-Bretagne. Les shebab peuvent s’appuyer sur ces groupes locaux car des personnes peuvent s’infiltrer ou se regrouper en cellules dormantes pour commettre des actes terroristes. En revanche, à ma connaissance, il n’existe pas de diaspora somalienne très importante en France.

Dans ce cas, pourquoi citer ce pays?

Avec ses interventions au Mali, en Centrafrique et plus récemment contre Daesh, la France est devenue l’une des premières puissances européennes qui s’est engagée dans la lutte contre le terrorisme. Pour Al-Qaida, elle est donc une cible à combattre.

Quelle est la force de frappe des shebab? 

Ces dernières années, ce groupe a perdu de l’influence mais il contrôle encore l’essentiel du territoire et quelques bastions en Somalie. Financièrement, les Shebab disposent de plusieurs ressources financières à commencer par les trafics qui sévissent dans le pays (drogue, armes…). Ils peuvent aussi compter sur les pirates qui, grâce aux prises d’otages et aux demandes de rançon, reversent une partie de cet argent au groupe terroriste. Mais sincèrement, je ne pense pas que les Shebab aient un poids à l’extérieur de leur frontière, excepté en Ouganda et au Kenya, et avec l’aide d’une diaspora locale. 

Propos recueillis par Nolwenn Leboyer – 20 MINUTES

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