De Baalbeck-Hermel au caza de Jbeil, la même contestation chiite

MUNICIPALES 2016Les deux premiers rounds des municipales ont mis à jour les difficultés du Hezbollah au sein de sa propre communauté. Qu’en sera-t-il au Liban-Sud ?

Au lendemain des municipales au Mont-Liban, et notamment dans le caza de Jbeil où une série d’incidents se sont produits principalement dans les villages chiites du jurd, nombre d’observateurs se sont arrêtés sur les transformations qui semblent s’opérer au sein de la communauté chiite, au niveau de la base.
Au premier round des municipales, le dimanche 8 mai à Baalbeck-Hermel, le Hezbollah est apparu pour la première fois en difficulté. Sa popularité semblait entamée. La formation de Hassan Nasrallah a dû mettre tout son poids dans la balance pour mobiliser ses partisans et remporter les élections, à Baalbeck, Brital et dans d’autres villages, où elle était engagée dans des batailles contre des listes formées sous le signe du développement et du recouvrement du pouvoir de décision. Des slogans éloquents, mais surtout révélateurs au sein de la communauté chiite d’un nouvel état d’esprit qui, une semaine plus tard, a montré qu’il s’étend de la Békaa jusqu’au jurd de Jbeil où le Hezbollah a dû croiser le fer avec des listes rivales dans la plupart des 18 localités chiites du caza : Mghayri, Mazraet el-Siyyad, Afka, Lassa, Almat, Ras Kasta, etc.

Ces listes étaient composées de représentants des familles, des tribus et… d’Amal. La bataille a été féroce. Le Hezb a perdu des conseils municipaux, réussi à percer quelques listes rivales, gagné à Hajoula et peut-être dans quelques autres villages (on attend toujours les chiffres officiels), mais le fait est qu’il était, pour le deuxième dimanche consécutif, en perte de vitesse. Pourquoi a-t-il été lâché par son allié de toujours, Amal ? Pourquoi les tribus et les familles sont-elles montées contre lui ?

D’aucuns n’hésitent pas à établir un lien entre le vote de contestation chiite et tout le contexte politique lié à l’engagement militaire du Hezb en Syrie : les jeunes morts pour assurer la survie du régime d’un pays voisin, les sanctions américaines, les vexations auxquelles les chiites sont parfois confrontés dans les pays arabes… Mais il n’y a pas que cela. « Nous avons voulu leur tirer les oreilles », lance, en allusion au Hezbollah, Talal Mokdad, un des notables de Lassa, dont le nom avait été avancé parmi les ministrables sous le régime de président Michel Sleiman.

Proche de l’ancien président, M. Mokdad ne mâche pas ses mots et à travers son discours, c’est tout le ras-le-bol d’une partie de la communauté chiite, laissée pour compte par le Hezbollah, qui est exprimé. La liste qu’il soutient, présidée par un de ses cousins, un orthopédiste, représente les familles, notamment les Chams, Mokdad, Zeayter, Hajj Hassan, également bien implantées à Baalbeck-Hermel. Elle est composée de personnes qui peuvent mettre à profit leurs carrières pour le développement du village au moment où la liste adverse, explique-t-il, englobe des gens de métiers représentant principalement le Hezb. Selon lui, le vote de contestation chiite est le fruit de griefs accumulés au fil des années. « Nous sommes restés pendant des années sans école publique dans la région. C’est sous Michel Sleiman qu’un établissement scolaire a fini par être construit à Lassa. Au sein de l’administration, lorsque des concours étaient organisés, la part du lion allait toujours aux gens du Sud. Ceux de Baalbeck-Hermel et de Jbeil étaient ignorés. Les tribus ont fini par se révolter », raconte-t-il.

La bataille a été âpre et comme pour les municipales de la Békaa, le Hezbollah n’a pas lésiné sur les moyens pour remporter les élections. Il a perdu la bataille des moukhtars à Lassa mais a réussi à remporter 14 des 15 sièges municipaux. La tête de la liste adverse a réussi à percer la sienne.

Dans un autre registre, si le CPL n’a pas réussi à s’imposer face au très populaire Ziad Hawat dans la ville de Jbeil, il est parvenu à remporter l’ensemble des sièges municipaux à Akoura, mais en court-circuitant les efforts de conciliation qui étaient entre-temps menés par Rafic Abi Younès. Ce dernier essayait de mettre fin à une querelle vieille de plusieurs dizaines d’années entre les Hachem et le reste des familles des villages.

Mansour Wehbé, frère d’un conseiller du ministre des AE, Gebran Bassil, a surpris tout le monde en formant une liste comptant parmi ses membres quatre représentants de la famille Hachem. Considérant que les quatre n’étaient pas représentatifs, la famille a décidé de boycotter les élections avant de revenir sur sa décision suite à des conseils ecclésiastiques locaux. Fait éloquent : les deux moukhtars soutenus par les familles obtiennent l’un 970 voix et l’autre 950. Mansour Wehbé en a obtenu 520, selon les chiffres non officiels et les représentants des Hachem 599.

17/05/2016

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