Le destin de l’accord nucléaire est maintenant entre les mains de Macron

Analyse: Le président français est venu à la Maison Blanche pour convaincre son homologue américain de ne pas abandonner l’accord avec l’Iran. À l’approche de la date limite du 12 mai, Macron tentera de modifier l’accord de façon à satisfaire Trump ou à lui faire reporter sa date limite.

WASHINGTON – Lors de la visite du président français Emmanuel Macron à Washington, le président américain Donald Trump a parlé de l’accord nucléaire avec l’Iran à plusieurs voix contradictoires.

Les deux dirigeants ont réussi à créer une amitié et une alliance d’intérêts, malgré la différence d’âge (Trump a 71 ans, Macron a 40 ans). Macron l’a imputé à leur parcours, en disant qu’ils sont tous les deux des « non-conformistes » qui ont réussi à battre le système politique dans leurs pays.

Trump et Macron. Une réunion chaleureuse à la Maison Blanche (Photo: EPA)

Trump et Macron. Une réunion chaleureuse à la Maison Blanche (Photo: EPA)

 

Mais Macron n’est pas venu à Washington simplement pour faire un câlin à Trump devant les caméras, un acte qui va lui coûter cher parmi ses électeurs en France, qui méprisent le président américain. Il est arrivé en mission pour convaincre Trump de ne pas abandonner l’accord nucléaire avec l’Iran.

Le moment de vérité approche. Le 12 mai, Trump devra décider s’il faut signer une nouvelle dérogation pour suspendre les sanctions américaines contre l’Iran. S’il ne signe pas, cela indiquera que les États-Unis se retirent de l’accord. Si les États-Unis ne font plus partie de l’accord, l’Iran ne se sentira pas obligé de s’y conformer, non plus. L’Iran a déjà annoncé que c’était «tout ou rien». Et c’est le but de la visite de Macron à Washington – pour arrêter Trump.

Trump et Macron se rencontrent pour discuter de l’accord nucléaire iranien

On ne sait pas si Macron sera en mesure d’accomplir sa mission, mais après le premier jour de réunions entre les deux dirigeants, il était évident que Macron avait réussi à séduire Trump. Le président américain, qui n’hésite pas à flatter qui que ce soit, les amis et les dirigeants, a fait l’éloge de son homologue français.

Tout au long de la journée, Trump a parlé sur plusieurs tons différents, ce qui pourrait signifier que sa position ferme en faveur du retrait de l’accord à ce moment-là a été légèrement bousculée.

Il a commencé par définir l’accord comme «fou» et «ridicule» en disant qu’il «n’aurait jamais dû être signé».

 (Photo: AP)

(Photo: AP)

 

Quelques heures plus tard, il semblait plus apaisé, suggérant qu’il était prêt à « faire quelque chose » sur l’accord iranien et il a déclaré à Macron devant les caméras : « Nous pourrions avoir au moins un accord entre nous très rapidement. » Quand un journaliste lui a demandé ce que serait cet accord, il a refusé d’élaborer en disant: «Vous le saurez ».

C’était avant la conférence de presse officielle avec Macron, dans laquelle il a transmis un message direct à l’Iran. « Si l’Iran nous menace d’une manière ou d’une autre, il paiera un prix que peu de pays ont jamais acquitté », a-t-il averti.

Macron se tenait à côté de Trump et a déclaré qu’il était prêt à discuter « d’un nouvel accord avec l’Iran », mais qu’il n’a pas l’intention de se retirer de l’accord actuel. Macron veut rentrer chez lui, en France, avec un gage de réussite entre les mains, une réussite que Trump peut lui octroyer : si Macron est capable de dire qu’il a influencé la position du président, cela l’aidera face à ses électeurs. Trump, pour sa part, sera en mesure de dire que les menaces ont réussi à changer la nature de l’accord.

 (Photo: Reuters)

(Photo: Reuters)

 

Pendant ce temps, Macron ne prévoit pas d’annuler l’accord actuel, mais d’y ajouter des conditions. En d’autres termes, l’honorer jusqu’en 2025, tout en ajoutant des clauses traitant de la présence iranienne en Syrie et de son programme de missiles balistiques. M. Macron poursuivra sa visite aux États-Unis dans cet esprit lorsqu’il s’adressera aux deux chambres du Congrès.

L’heure tourne, et Trump doit prendre une décision avant le 12 mai. Ses proches associés disent que le président est déterminé à se retirer de l’accord, à moins que ne lui soit présenté une meilleure alternative qui réponde à ses exigences. Des messages dans cet esprit ont également été transmis à Israël, qui applaudit Trump pour sa décision de se retirer de l’accord.

Toutefois, une telle décision aggraverait la crise entre les États-Unis et l’Union européenne. Des experts de l’administration américaine ont également mis en garde Trump contre la libération de l’Iran de ses obligations. Si cela se produit, disent-ils, l’Iran se précipitera pour reprendre son programme nucléaire, qui a été suspendu après la signature de l’accord.

Donald et Melania Trump accueillent Emmanuel et Brigitte Macron (Photo: AP)

Donald et Melania Trump accueillent Emmanuel et Brigitte Macron (Photo: AP)

 

Il n’y a absolument aucune chance que Trump annonce qu’il renie sa décision de se retirer. Cela n’arrivera pas. Ce qui pourrait arriver, c’est qu’il reportera la date limite. En d’autres termes, il signera une dérogation suspendant les sanctions contre l’Iran et laissera Macron travailler pour parvenir à des ententes autour de son idée d’élargir l’accord dans les prochains mois.

Pour que cela se produise, Macron devra convaincre toutes les parties qui ont signé l’accord – y compris l’Iran – qu’il est dans leur intérêt de le faire. Trump acceptera de reporter la date limite seulement s’il reçoit une preuve concluante qu’il existe une volonté d’élargir l’accord. Macron, avec toute sa bonne volonté, sera probablement incapable d’apporter une telle preuve.

Trump est convaincu que s’il se retire de l’accord, l’Iran commettra des erreurs dramatiques et réactivera pleinement ses installations nucléaires, ce qui lui donnera un motif légitime pour frapper en Iran. Son nouveau conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, est un partisan enthousiaste de l’option militaire contre Téhéran.

Il ne serait pas exagéré de dire que le destin de l’accord nucléaire est maintenant entre les mains de Macron. Il ne serait pas exagéré de dire que sa chance d’accomplir sa mission de maintenir Trump dans le cadre de l’accord actuel (sans aucun amendement) est très mince, et cela a été renforcé par les déclarations de Trump contre l’Iran mardi.

Mais il y a un autre élément qui peut faire basculer ce jeu : la personnalité de Trump. Le président américain a acquis la réputation de quelqu’un qui est capable de faire des commentaires contradictoires et de faire exactement le contraire de ce qu’il a promis de faire.

Photo: AP
Le Président américain Donald Trump (D) et le Président français Emmanuel Macron à la Maison Blanche mardi, Photo: AP
Orly Azoulay

Orly Azoulay | Publié le: 25.25.18, 23:53

Première publication le 25/04/18, 23h53

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Réal Bergeron

J’aime bien la lucidité du commentaire initial de Maurice.

Donald John Trump, en fin stratège pour gagner du temps, laisse au Président de la République Française tout le jeu pour tenter de le convaincre de ne pas abandonner le présent accord avec l’Iran.

Le temps pour Donald John Trump de consolider ses appuis contre l’Iran.

Maurice

Renégocier l’accord via Macron, c’est aussi pour Trump gagner du temps pour consolider son alliance USA/Arabie-Egypte/Israel qui est en cours de constitution au niveau des dirigeants, avec des progrès incroyables il y a encore quelques années, mais encore très très loin d’être acceptée par les populations (en particulier sunnites) et les medias Européens.
Pendant ce temps, Trump consolide aussi son équipe interne avec des vrais faucons prêts à se lancer dans une bataille contre l’Iran (Bolton, Pompeo…).
Tout ca me semble avisé de sa part

Guidon

Modifier l’accord pour y rajouter des elements non inclus et le rendre acceptable par Trump ou le maintenir et y ajoute par Macron des éléments complémentaires pour le rendre acceptable par Trump. A part, la sémantique, le fond est le même. Macron, comme d’habitude, joue sur les mots pour s’attribuer une supposée réussite, que le politiquement correct reprend également.

Charles Martel

Non Macron se conduit en manipulateur, une marionnette pour les muzz et il n’abusera personne
Quant à Trump il joue très bien au couillon manipulé mais qui manipule qui?