La raison majeure pour laquelle le FN, en dépit de ses scores électoraux, se heurte à un ”plafond de verre” qui l’empêche d’être majoritaire, c’est son programme économique étatiste, socialisant et rétrograde, ainsi que ses positions irréfléchies sur l’euro. Ce programme est l’œuvre de Florian Philippot.

Il ampute le FN, dans les seconds tours de scrutin, des voix d’un électorat des classes moyennes travaillant dans le secteur marchand, commerçant ou libéral privé. De plus, il crée au sein du FN lui-même un risque de crise et d’explosion qui lui serait fatal.

Marine Le Pen sous influence ?

Au cours d’un récent séminaire interne des cadres du FN qui fut très tendu, on a pu voir une opposition entre la ligne socio-économique défendue par Marine Le Pen et son mentor ”subordonné”, Florian Philippot, et celle d’autres cadres du parti, plutôt majoritaires. Mais ces derniers ont décidé de ne pas créer de conflit, pour éviter le scénario de scission, qui avait été vécu avec le MNR. Néanmoins, tout le monde a saisi que Florian Philippot avait imposé sa ligne.

Avant ce séminaire interne de mise au point, Louis Aliot avait déclaré au Figaro (20/01/2016) qu’il souhaitait « que le Front national [en] sorte avec un changement important, visible de la population », autrement dit qu’il amende son programme socio–économique. Visiblement, il n’a pas été entendu. La ligne ”libérale”, pro–entreprises, pro–emplois, défendue par Louis Aliot et Marion Maréchal–Le Pen, a dû s’incliner devant le programme socialo–étatiste imposé par M. Philippot. Sous sa force apparente, autoritaire et décidée, la présidente du Front national est-elle sous l’influence de son second ? Elle a précisé qu’il n’en était rien, que c’est elle qui décidait du programme. CQFD.

Le syndrome Diafoirus : le dogme d’abord, le réel ensuite

À la suite de l’annonce par le gouvernement du plan – assez timide, très insuffisant et qui sera évidemment édulcoré – de simplification du Code du Travail présenté par la nouvelle ministre Myriam El Komri, Florian Philippot, a déclaré : « on détricote le pacte social français et on demande à une jeune ministre un peu innocente de porter un projet beaucoup moins innocent qui nous ramène, sous certains aspects, au XIXe siècle ». Ces propos auraient parfaitement pu être tenus par Mélenchon, Montebourg, le PC ou l’aile gauche frondeuse du PS. Et d’ailleurs, ils le sont.

Mais ce ”pacte social français”, machine à chômage, à matraquage fiscal, à décompétitivité, à fuite des investisseurs et des forces vives, à déficits abyssaux, catastrophe sociale et économique, c’est précisemment lui qui est inspiré par l’idéologie socialiste issue du XIXe siècle abandonnée dans toute l’Europe. Sauf par la France et le gouvernement grec – dont MLP a fait l’éloge – avec les brillants résultats que l’on sait.

Rappelons que le ”modèle social français” (socialiste, en réalité) a multiplié le chômage par 15 depuis 1974. Record mondial. Mais M. Philippot, adepte des anciens dogmes idéologiques qui ne fonctionnent pas, déteste le ”libéralisme”, sans comprendre et sans savoir ce que ce terme signifie. Sa formation d’énarque n’y est pas pour rien.
Florian Philippot se réclame devant tous les médias du ”gaullisme”, de manière d’ailleurs un peu trop voyante pour être sincère. Il ignore sans doute que le programme économique de De Gaulle, inspiré par Rueff, n’avait rigoureusement rien à voir avec ce qu’il préconise.

Les trois hypothèses concernant M. Philippot

Une première hypothèse est que M. Philippot est un agent du système, en service commandé, téléguidé pour neutraliser le FN, le gauchiser, le normaliser, le neutraliser, l’affadir, de sorte qu’il ne représente plus une puissance de séduction révolutionnaire. En échange de récompenses. C’est l’opinion de plusieurs cadres du FN que j’ai rencontrés.

La seconde hypothèse est que M. Philippot veut faire une carrière en utilisant un FN à sa botte, banalisé, comme une sorte de parti acceptable par le système, à l’étiquette floue, vaguement ”gaulliste”, vaguement ”patriote”, vaguement ”social”.

La troisième hypothèse est que Florian Philippot croit vraiment à ce qu’il raconte, c’est-à-dire à l’idéologie du Ceres, ce cercle de réflexion socialiste créé jadis par Jean–Pierre Chevènement, homme politique dont il fut proche mais qu’il a quitté parce que le mini-parti de ce dernier était sans perspective pour un jeune politicien ambitieux.

De ces trois hypothèses, la première (théorie du complot) semble peu crédible et les deux autres beaucoup plus ; Marine Le Pen serait alors une victime, à la personnalité certes très forte mais manipulée par un machiavélien qui la fascine et a su la convaincre.

Une stratégie perdante

Les thèmes centraux de l’invasion migratoire, de l’islamisation ne sont pas très présents dans les discours de M. Philippot. Pourtant très porteurs électoralement, ils ne correspondent pas nécessairement à ses idées profondes. De même, la communication du FN se porte principalement sur une violente critique de l’Union européenne et de Bruxelles. Fort bien. Les arguments sont souvent très pertinents. Mais des axes, autrement plus porteurs et proches des préoccupations de l’électorat, comme le laxisme judiciaire, la criminalité, la dégradation de l’enseignement public, passent au second plan et sont mis en sourdine. C’est un mauvais calcul.

Alors que la ”dédiabolisation” du FN par Marine Le Pen avait parfaitement réussi en débarrassant ce parti de références inacceptables pour l’électorat, voilà que M. Philippot lui donne une orientation socialo–étatiste au moment même où cette dernière est de plus en plus rejetée par l’opinion.

Le discours actuel du FN, imposé par M. Philippot, sur l’euro, les retraites, les finances publiques, l’étatisme, etc tient à distance les électeurs des Républicains, qui sont la réserve de voix du FN. D’où un affaiblissement stratégique : car il sera facile au candidat des Républicains de muscler son discours sur l’immigration, qui est la ligne de force de communication du FN.

Le problème est que M. Philippot se révèle être à la fois un excellent tacticien d’appareil au sein du FN, qu’il a réussi à contrôler, mais un stratège amateur pour une conquête du pouvoir. Il ne suffit pas de faire le malin pour l’être…La ligne programmatique socialo-étatiste qu’il a choisie, conjuguée avec un discours de sortie de l’euro mal ficelé, risque d’assécher la base électorale du FN.

Sans compter le risque d’une scission au sein de ce parti, (pour ou contre la ligne Philippot) qui n’est pas à écarter et qui lui serait fatal. M. Florian Philippot n’est pas forcément la bonne carte à jouer pour le Front national. La politique, c’est comme le poker : il faut abattre le bon jeu.

Blog de Guillaume Faye

 

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