La nouvelle route de la soie chinoise, un désastre  environnemental

C’était un projet monstre imaginé par la Chine, à même de bouleverser les marchés des matières premières dans les années à venir. Surnommée « La Ceinture et la Route » (« One Belt, One Road »), cette initiative, présentée par le président Xi Jinping fin 2013 et lancée officiellement en mars, voulait favoriser les connexions entre les continents asiatique, européen et africain, et les mers et océans voisins, en redynamisant d’anciennes routes commerciales terrestres et maritimes. Elle signe la renaissance des routes de la soie, façon XXIe siècle.
Mais près d’une décennie plus tard les dommages que le Parti communiste chinois cause à l’environnement au fur et à mesure que son initiative « La Nouvelle route de la Soie » (Belt and Road Initiative, BRI ) se développe, sont incommensurables. Le professeur William Laurance de l’Université James Cook de Cairns (Australie), affirme que :

« Partout dans le monde, sur presque tous les continents, la Chine s’est lancée dans une variété vertigineuse de projets miniers, énergétiques, agricoles et d’infrastructure – routes, chemins de fer, barrages hydroélectriques, mines – qui causent des dommages sans précédent aux écosystèmes et à la biodiversité »,

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Le dernier désastre écologique lié à la BRI se situe en Afrique de l’Ouest. Le gouvernement de la Sierra Leone vient de vendre à la Chine communiste 102 hectares de forêt tropicale protégée et de plages, un lieu d’écotourisme doté d’espèces marines rares et menacées. Selon la Sierra Leone, la Chine envisage d’y construire un port de pêche. Les opposants au projet hurlent à la « catastrophe humaine et écologique ». Et nombreux sont ceux qui ne croient pas au projet portuaire et affirment qu’à la place surgira une usine de farine de poisson. Les militants écologistes s’emploient à stopper le projet.
Les raisons de s’inquiéter ne manquent pas : en 2016, en Gambie, un pays voisin de la Sierra Leone, la société Golden Lead, propriété du Parti communiste chinois, a construit, dans le cadre de la BRI, une usine de farine de poisson dans la ville côtière de Gunjur. La farine de poisson est du poisson moulu très fin pour nourrir les poissons d’élevage. La pisciculture représente un chiffre d’affaires mondial de plusieurs centaines de milliard de dollars et fournit la moitié de la consommation mondiale de poisson. Peu de temps après la mise en service de l’usine de farine de poisson, la faune du lagon Bolong Fenyo, une réserve naturelle locale, a commencé à dépérir en raison des déchets toxiques déversés illégalement par l’usine. En dépit des protestations, la Gambie, qui dépend des investissements étrangers, n’aurait pas levé le petit doigt pour empêcher les déchets de continuer à se déverser dans le lagon.

« L’industrie de la farine de poisson ravage l’environnement, l’emploi local, la sécurité alimentaire et l’économie du tourisme, ont averti des scientifiques, des militants gambiens et des habitants » a écrit le Guardian en mars 2019.

« Ce que nous voyons n’est pas du développement », a déclaré le biologiste gambien Ahmed Manjang. « C’est de l’exploitation ».

Outre les usines de farine de poisson, la flotte chinoise de pêche hauturière épuise les stocks de poissons d’Afrique de l’Ouest, ce qui ajoute à la pression sur l’offre.
Un rappel de la portée géographique de la BRI permet de comprendre le défi planétaire que l’initiative « La Nouvelle route de la Soie » pose à l’environnement : le président chinois Xi Jinping a lancé la BRI en 2013 pour construire une « route économique terrestre de la soie, » et une « route maritime de la soie du XXIe siècle ». Le plan était – et demeure – de construire un énorme réseau de routes, de voies ferrées, de tunnels, de barrages, d’aéroports, de ports, de pipelines gaziers et pétroliers, de centrales électriques, de réseaux de télécommunications, etc. qui relieront la Chine à l’Asie centrale et au Sud-est asiatique, mais aussi au Moyen-Orient et à l’Europe. La BRI maritime institue de grandes voies navales qui relieront la Chine à l’Asie du Sud-Est, au Moyen-Orient, à l’Afrique, à l’Europe et même à l’Amérique latine. Cette BRI maritime inclut maintenant ce que la Chine appelle sa « Route de la soie polaire », soit de nouvelles routes maritimes reliant l’Asie à l’Europe via l’Arctique.
Pour donner une idée de l’énorme portée géographique de l’initiative, précisons que 139 pays au moins sont, à un degré ou à un autre, reliés à la BRI.
Les dommages environnementaux ne se sont donc pas limités à l’Afrique de l’Ouest.
En Indonésie, par exemple, Sinohydro, la plus grande entreprise de construction hydroélectrique de Chine, construit un énorme barrage hydroélectrique dans la forêt tropicale de Batang Toru à Sumatra. Le barrage menace de détruire l’existence du singe le plus rare au monde, l’orang-outan Tapanuli, dont il ne reste que 800 spécimens à l’état sauvage. La forêt de Batang Toru abrite également le tigre de Sumatra et le pangolin de la Sonde, deux espèces en voie d’extinction.
Les tigres, espèces rares, sont menacés par la BRI ailleurs qu’en Indonésie. En Asie, « près de 24 000 km de nouvelles routes seront construites dans les Réserves de préservation des Tigres (Tiger Conservation Landscapes, TCL) d’ici 2050, stimulées par de grands projets d’investissement dont beaucoup sont liés à l’initiative chinoise « La Nouvelle route de la Soie », indique une étude publiée en avril 2020, par la revue Science Advances.
En 2019, une étude du World Wildlife Fund (WWF) a recensé les changements et dommages causés à divers écosystèmes fragiles d’Asie du Sud-Est par les projets d’infrastructure de la BRI :

« Les barrages hydroélectriques promus par la Chine le long du fleuve Mékong – qui traverse le Cambodge, le Laos, le Myanmar, la Thaïlande et le Vietnam – ont fait varier le débit du fleuve et ont bloqué la migration des poissons, causant ainsi la destruction des moyens de subsistance des communautés qui vivent de la rivière. Les stocks de poissons ont diminué ces dernières années en raison des barrages hydroélectriques construits en amont au Cambodge et dans les pays voisins…

« Outre les dommages causés à la flore et à la faune, la déforestation surgit à l’occasion de projets autoroutiers comme la Pan Borneo – qui traverse la Malaisie, l’Indonésie et le Brunei – provoquant des glissements de terrain, des inondations et d’autres problèmes liés à l’atténuation des catastrophes ».

Le WWF a répertorié plus de 1 700 sites menacés dans leur biodiversité et 265 espèces mises en danger par la BRI.
Le Parti communiste chinois est le fer de lance mondial de la déforestation. Déjà en 2012, avant le lancement officiel de la BRI, la Chine était le premier importateur mondial de bois illégal, selon l’Environmental Investigation Agency (EIA) basée à Londres. Selon l’ONG FairPlanet, les commerçants chinois ont épuisé le bois de rose au Bénin et en Gambie avant de s’installer au Nigeria. Là, l’EIA a révélé en 2017, qu’1,4 million de grumes de bois de rose, d’une valeur marchande de 300 millions de dollars, ont été récoltées illégalement. Des pots-de-vin distribués aux politiques et hauts fonctionnaires nigérians ont ensuite permis d’acheminer ces grumes en direction du marché chinois.
Selon un récent article du Financial Times, les banques chinoises sont les deuxièmes plus grands financiers du commerce des matières premières impliqués dans la déforestation tropicale :

« La Banque industrielle et commerciale de Chine, un établissement public, est le plus gros distributeur de prêts et services de souscription dans la base de données, avec un portefeuille de crédits d’une valeur totale de 2,2 milliards de dollars. Sinochem, un groupe chimique chinois appartenant à l’État, a été le principal bénéficiaire, collectant pour son activité de caoutchouc une gamme de crédits dont la somme atteint 4,6 milliards de dollars. »

La BRI ne menace pas seulement les forêts et les espèces animales. Les écologistes considèrent que la BRI a des conséquences potentiellement négatives sur le climat : le Parti communiste chinois « perpétue l’utilisation du charbon et d’autres combustibles fossiles – à peu près partout où la BRI met le pied… Et cela signifie une augmentation notable des émissions de gaz à effet de serre ».
Selon Jennifer Hillman et Alex Tippett, rapporteurs en mars 2021 pour le Council on Foreign Relations :

« Depuis la création de « La Nouvelle route de la Soie » (BRI), des capitaux chinois ont financé à hauteur de plusieurs milliards de dollars des projets de combustibles fossiles dans le monde entier. Ces investissements vont à coup sûr rendre l’atténuation du changement climatique beaucoup plus difficile…

« À ce jour, l’énergie et les transports ont été au centre des activités de la BRI, l’énergie captant à elle seule (selon les estimations) 44 % de l’ensemble des investissements.

« La majeure partie du financement énergétique de la Chine va à des sources non renouvelables. Entre 2014 et 2017, 91 % des prêts du secteur de l’énergie accordés par six grandes banques chinoises aux pays de la BRI étaient destinés à des projets liés à l’utilisation de combustibles fossiles. En 2018, 40 % des prêts du secteur de l’énergie sont allés au charbon. En 2016, la Chine était impliquée dans 240 centrales au charbon dans les pays BRI, un nombre qui a probablement augmenté.

Judith Bergman, chroniqueuse, avocate et analyste politique, est Distinguished Senior Fellow du Gatestone Institute.

par Judith Bergman

Traduction du texte original: Communist China’s Belt and Road Initiative Trashing the Environment

Photo : la plage de Tokeh en Sierra Leone, près du Parc national de la péninsule de Western Area, dont une partie a été vendue à la Chine Les critiques qualifiant cette décision de « désastre humain et écologique ». (Photo par Issouf Sanogo/AFP/Getty Images)

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galil308

Alternative thérapeutique : RU 486.

Alain

Autrement plus dangereux que le CO2 pour la planète, non ?

yacotito

ne vous en faites pas : Macron va rééquilibrer cela vu que la France pollue majoritairement (1%) !