Israël face à un défi de sécurité alimentaire : Un plan stratégique pour l’avenir
Plus de 250 experts provenant de divers secteurs, y compris de la nutrition, de l’agriculture et de la planification, se sont réunis en ligne dimanche pour discuter de la création d’un programme de sécurité alimentaire pour Israël. Cette initiative ambitieuse, coordonnée par le ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire, avec le soutien d’autres ministères, vise à établir un plan stratégique pour assurer la sécurité alimentaire du pays jusqu’en 2050. Le projet doit être soumis au gouvernement d’ici la fin avril. Cependant, des incertitudes planent sur sa mise en œuvre en raison de réductions budgétaires importantes et d’une diminution des effectifs au sein du ministère de l’Agriculture.
Les responsables du ministère ont exprimé leurs préoccupations devant la commission économique de la Knesset, soulignant que ces coupes budgétaires, nécessaires pour financer la guerre contre les groupes terroristes du Hamas et du Hezbollah, risquaient de paralyser les efforts en matière de recherche et d’innovation agricole. En particulier, le ministère de l’Agriculture prévoit de réduire de 25 % ses effectifs cette année et l’année suivante, tandis que les budgets de recherche et d’investissement sont diminués de 360 millions de shekels, ce qui pourrait mettre en péril la capacité d’Israël à maintenir son rôle de leader mondial en matière d’innovation agricole.
Ce programme de sécurité alimentaire, lancé il y a presque deux ans à l’initiative de Victor Weiss, conseiller climatique du Conseil national de sécurité, a été accéléré par la guerre contre Gaza, qui a mis en lumière les vulnérabilités liées à la dépendance d’Israël vis-à-vis des importations alimentaires. L’un des exemples frappants de cette fragilité a été la suspension, en mai dernier, des exportations alimentaires de la Turquie vers Israël, ce qui a affecté des produits de base comme les tomates. Bien que l’Azerbaïdjan ait partiellement compensé cette perte, les subventions du ministère ont permis aux agriculteurs israéliens d’augmenter leur production.
Yuval Lipkin, directeur de l’administration de la sécurité alimentaire au ministère de l’Agriculture, a souligné qu’Israël n’avait jamais mis en place de programme formel de sécurité alimentaire. Il a attribué la baisse de la production locale à la concurrence des importations, en citant l’exemple de l’ail chinois qui a détrôné l’ail israélien. Le changement climatique et les crises géopolitiques ont aggravé ces dépendances extérieures. Lipkin a averti que la population israélienne devrait doubler d’ici 2050, mais la stagnation de la productivité agricole et la diminution des cultures locales rendent la situation préoccupante.
Afin d’améliorer la sécurité alimentaire du pays, Lipkin plaide pour un soutien accru aux agriculteurs locaux, notamment en réduisant le coût de l’eau pour l’agriculture et en assurant la pérennité des terres agricoles. Il a également insisté sur la nécessité de maintenir les financements pour la recherche, essentiels pour développer des solutions innovantes.
Le programme de sécurité alimentaire s’articule autour de plusieurs axes de réflexion, dont la production alimentaire locale, l’efficacité des chaînes d’approvisionnement, et la manière dont l’agriculture pourrait devenir plus durable grâce à l’innovation. Les groupes de travail, composés de représentants des ministères, d’organisations publiques et d’ONG, sont actuellement engagés dans des discussions approfondies. L’une des propositions phares de ces discussions est l’idée de renforcer la production locale tout en équilibrant les importations, en prenant en compte les impératifs de santé publique et d’environnement.
L’une des principales préoccupations est d’encourager une alimentation saine et durable. Le ministère de la Santé, par l’intermédiaire de Moran Blaychfeld Magnazi, met en avant les bienfaits du régime méditerranéen, tout en incitant à réduire la consommation de viande rouge, en particulier le bœuf, et à privilégier des alternatives comme les légumineuses, le poisson et les algues. Cette approche vise non seulement à améliorer la santé des Israéliens, mais aussi à réduire l’empreinte environnementale du pays.
Les groupes de travail ont également abordé les défis liés à l’agriculture locale, en particulier le coût élevé de l’eau, la pénurie de main-d’œuvre et les effets du changement climatique. Ces problématiques sont exacerbées par des événements tragiques, comme l’attaque du Hamas le 7 octobre, qui a entraîné un exode massif de travailleurs étrangers, notamment thaïlandais, affectant gravement l’agriculture israélienne.
Afin de favoriser une agriculture plus durable et responsable, des solutions pratiques sont proposées, telles que le soutien à l’agriculture biologique et des incitations pour les jeunes à s’impliquer dans ce secteur. Cependant, des obstacles réglementaires, plus que financiers, demeurent un frein à l’innovation et à la transformation du secteur.
Le travail des groupes de travail se poursuivra avec l’élaboration de plans d’action et d’indicateurs de performance, avant un deuxième webinaire prévu pour le 3 mars et une conférence finale le 27 avril, au cours de laquelle les propositions seront présentées au public. Ce programme pourrait bien marquer un tournant dans l’approvisionnement alimentaire d’Israël, en renforçant la résilience du pays face aux crises alimentaires mondiales tout en assurant la durabilité de son agriculture.
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