François Fillon, le drapier des lanciers?

Au Moyen Age il y avait une troupe de danseurs qui effectuaient un curieux mouvement de danse : un pas en avant et trois pas en arrière. Et cette expression est devenue l’emblème de ce que les journalistes incultes ou presque nomment : rétropédalage !

De quoi s’agit-il ? Du programme économique de François Fillon, ou plus exactement d’un point très précis qui semble constituer une insurmontable difficulté aux yeux de l’opinion : les dépenses de santé et leur éventuel déremboursement sélectif. L’ancien premier ministre, grand vainqueur des primaires de la droite et du centre, a peut-être commis une double erreur : d’abord avoir touché à un point hyper sensible aux yeux des Français ou ensuite avoir tardé à réagir. Il fallait éteindre l’incendie bien plus vite. Or, après avoir laissé traîner les choses, le candidat a mandaté Eric Woerth dont j’ai suivi la prestation à la télévision : il n’a dissipé ni les doutes ni les malentendus pour la bonne raison que la copie originelle de François Fillon manquait de netteté.

Faut-il en faire reproche au candidat qui a remporté une victoire si nette et qui semble épouser la forme politique que nos compatriotes souhaitent voir s’installer à l’Elysée ? Non point. François Fillon est conscient de la situation financière critique du pays ; on se souvient de sa déclaration qui avait choqué quand il parlait d’état en faillite… Il était donc en accord avec lui-même lorsqu’il a donné à comprendre qu’il fallait assainir les comptes de la nation , et notamment ceux de la sécurité sociale dont le déficit cumulé atteint des centaines de milliards… Pour François Fillon, les choses sont claires : on ne peut plus continuer  ainsi ! Et il a raison.

Personne ne conteste ce diagnostic, alors pourquoi cette imposante levée de boucliers, y compris dans le propre camp du candidat de la droite ? Pour la bonne raison que le logiciel mental des Français est viscéralement attaché à cette institution de la fin de la seconde guerre mondiale, la sécurité sociale sous toutes ses formes. Mais il y a un décalage depuis des décennies : les dépenses vont croissant tandis que les déficits se creusent. Ou on réduit ou alors, au train où vont les choses, la sécurité sociale disparaîtra. C’est le fond de la pensée de Fillon sur ce point névralgique et il a raison. Mais il a très mal expliqué son point de vue. Et il a nettement sous-estimé les réactions de la population et de la classe politique.

Je me souviens d’un dictum du ministre communiste de la santé lors du premier septennat de François Mitterrand : la santé n’a pas de prix mais elle a un coût ! Paroles de sagesse. Quand on a séjourné quelques jours seulement dans un hôpital, on voit les choses différemment. Mais il faut bien reconnaître que la multiplication des analyses et des radiographies (quand vous passez d’un établissement à un autre) obère les coûts et n’a littéralement pas de sens.

Au Fond, Fr. Fillon a raison mais il n’a pas su doser les déclarations. Il fallait expliquer aux Français qu’on n’est plus en 1945, qu’on n’est plus dans les trente glorieuses, que la société française ne ressemblera plus à ce qu’on connaissait déjà, bref qu’on ne peut plus vivre au-dessus de ses moyens indéfiniment. L’enjeu du débat est le suivant : pouvons nous encore offrir une telle protection sociale au niveau de la santé, du travail et de la retraite ?

Même nos voisins et amis allemands ont pris la mesure exacte de ce dilemme : un ambassadeur allemand en poste à Paris me confiait un jour la remarque suivante : on ne peut pas travailler moins, partir de plus en plus en vacances, partir à soixante ans à la retraite et revendiquer une assurance maladie de plus en plus étendue…

S’il veut redresser la barre et surtout clarifier ses intentions, le candidat de la droite et du centre doit réagir vite et rassurer . Quitte à appliquer la politique qu’il faut, une fois qu’il est au pouvoir. Après tout, tous les hommes politiques le font. Et je le répète : en France, personne n’enfreint ce tabou qu’est la sanctuarisation des dépenses sociales. Si, d’aventure, quelqu’un le faisait, il doit s’attendre à en payer le prix. Et celui-ci sera très élevé.

C’est affligeant mais c’est ainsi.

Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève du 13 décembre 2016

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BRAMI Gilbert

Fillon : un pas en avant, trois pas en arrière

Je pense que certains médias devraient cesser d’hurler avec la meute contre certains personnages.

Cela ne peut que porter préjudice à long terme aux Judaïsme en général et aux Juifs en particulier. A moins que les médias Israéliens cherchent à paniquer la Diaspora !