Eliezer Sherbativ, le juif qui jouait près d’Auschwitz.

La vie du hockeyeur Eliezer Sherbatov n’a rien de normal, entre immigration, handicap et guerre, et c’est justement pourquoi il a eu envie de raconter son parcours dans un livre.

Le Québécois d’origine russe et israélienne a collaboré avec l’autrice torontoise Anna Rosner, qui avait déjà signé la biographe de l’ancien de la Ligue nationale Jamie Leach.

Sherbatov raconte dans cet ouvrage tous les sacrifices que ses parents ont dû faire pour finalement s’établir Québec. Venant d’une famille juive d’Union soviétique, il est né en Israël. Il a dû fuir le pays en raison de la guerre et s’est retrouvé au Canada, comme s’il avait été destiné à jouer au hockey.

«C’est un livre avec tellement de péripéties, tellement d’obstacles, mais pas juste pour moi. C’est pour ma famille aussi», a-t-il expliqué au balado «La Dose», sur QUB radio.

Un futur Guy Lafleur? 

L’un de ces obstacles était d’ailleurs le passage aux douanes. Ses parents ne parlaient ni anglais ni français, mais son père a fait comprendre aux agents frontaliers par le biais d’un traducteur que sa famille et lui désiraient devenir des Canadiens.

«Mon père a dit : “parce que je veux que mon fils, mon plus jeune, joue comme le numéro 10 du Canadien de Montréal.” Comme mon père me l’a expliqué, le douanier, qui était un Québécois, a été ému», a raconté Sherbatov.

Recevant de l’aide de la communauté juive à leur arrivée dans l’arrondissement de LaSalle, les nouveaux venus ont rapidement mis le jeune Eliezer sur patins.

«Au début, quand je suis monté sur la glace, mon père n’était pas très content. Je n’étais pas le Guy Lafleur qu’il avait imaginé», a-t-il poursuivi en riant.

Sa mère, qui donnait des cours gratuits de patinage artistique à des Russes, a transformé son garçon en patineur élite, elle qui en a plus tard fait sa carrière.

«Mes parents n’ont jamais vraiment discuté avec moi de la guerre, de l’immigration, comment ç’a été difficile pour eux. Ce sont des personnes tellement humbles. Ils l’ont fait parce qu’ils devaient le faire. Ils avaient une famille et ils n’avaient pas d’autre choix», a-t-il soutenu, heureux d’en avoir appris davantage sur eux au cours de la vingtaine d’entretiens avec Anna Rosner.

Une saison émotive en Pologne

Après avoir trimballé ses valises au Kazhakstan, en Slovaquie et en Lettonie, Sherbatov signe un contrat d’une saison en Pologne en 2020-2021, avec l’Unia de Oswiecim, ville de 41 000 habitants, située à moins de deux kilomètres du camp de concentration d’Auschwitz.

«J’habitais juste en haut de la petite rivière [Soła] et je voyais le camp de concentration. Ça tellement créé un gros buzz, que le capitaine de l’équipe nationale Israélienne joue à Oswiecim. J’ai eu beaucoup d’acclamation, mais aussi beaucoup de critiques».

«Il y a des rabbins haut placés qui disaient que j’étais un traître et moi au contraire, je suis un fier juif», a expliqué le Québécois. Malgré les vives critiques, Sherbatov est toutefois convaincu qu’il a fait le bon choix d’aller s’intaller en Pologne pour une saison.

Le dernier chapitre 

Impossible de passer sous silence le plus récent chapitre de l’épopée de Sherbatov, qui a fui l’Ukraine en pleins bouleversements plus tôt cette année. De Marioupol à la Pologne, il a surmonté les dangers de la route pour rentrer à la maison auprès de ses proches.

«Je n’avais jamais rencontré mon garçon, qui était né en novembre. […] Jouer avec un handicap, c’est vraiment “tough”, mais ne pas voir mon fils et peut-être ne pas survivre à une guerre après avoir commencé une saison de hockey, ça, c’est inhumain», s’est-il souvenu.

«Le voyagement, c’est fini. J’ai décidé qu’avec le traumatisme, je dois “focuser” sur moi-même. Je vois des professionnels pour passer à travers ces moments. J’ai beaucoup de hauts et de bas, et j’ai besoin de mes proches», a reconnu celui qui évolue désormais avec le Marquis de Jonquière, dans la Ligue nord-américaine de hockey (LNAH).

Un handicap à surmonter

Si cet ouvrage se nomme en français «Sherbatov. Le garçon qui voulait jouer au hockey», son titre en anglais «My Left Skate» (Mon patin gauche) fait une référence directe au handicap avec lequel Eliezer doit composer depuis son enfance.

À la suite d’un accident de patins à roues alignées, il a été diagnostiqué d’un pied tombant, ce qui veut dire qu’il n’a plus de sensations sous le genou.

«Je n’ai aucun muscle pour retenir mon pied, c’est pour ça que je porte une prothèse. C’est pour garder mon pied à 90 degrés. C’est aussi la raison pourquoi on a créé ce livre; parce que je joue sur une jambe depuis l’âge de 17 ans», a-t-il mentionné.

Disons que ce n’est pas l’idéal pour poursuivre une carrière de hockeyeur, mais il a appris à patiner différemment grâce à sa mère.

L’homme de 31 ans avait dû faire une pause de trois ans avant d’arriver au midget AAA pour quasiment réapprendre à jouer, mais ça ne l’a pas empêché de finalement atteindre la Ligue de hockey junior majeur du Québec en 2009. Il a ensuite fait carrière un peu partout de l’autre côté de l’Atlantique, dont en France, au Kazakhstan, en Slovaquie et en Ukraine.

-«Sherbatov. Le garçon qui voulait jouer au hockey» a été publié mercredi aux Éditions Hurtubise.

Source : tvasports.ca

 

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