Israël satisfait de la proposition américaine sur sa frontière maritime avec le Liban
« Atmosphère plus que jamais positive », se félicite pour sa part le vice-président du Parlement libanais.
La proposition du médiateur américain sur la démarcation de la frontière maritime entre le Liban et Israël, Amos Hochstein, « protège » et « renforce » les intérêts de l’État hébreu, a estimé dimanche le Premier ministre israélien, Yaïr Lapid.
Cet optimisme vient s’ajouter à celui qui prévalait la veille au Liban, après que l’émissaire US a remis au Liban officiel une proposition similaire, à l’issue de négociations indirectes intenses au cours des derniers mois entre Beyrouth et Tel-Aviv. Le vice-président du Parlement libanais Élias Bou Saab a de son côté affirmé dimanche que « les modifications que le Liban proposera ne seront pas fondamentales ».
Le Liban et Israël négocient depuis deux ans par l’intermédiaire des États-Unis pour délimiter leur frontière maritime et lever ainsi des obstacles à la prospection et l’exploitation de gisements offshore. La présidence libanaise avait annoncé samedi avoir reçu la dernière proposition du médiateur américain Amos Hochstein. L’arrivée en juin dernier d’une plateforme gazière sur le champ de Karish, au large d’Israël, et les menaces militaires brandies par le Hezbollah suite à cette avancée de l’État hébreu sur le dossier avaient remis les pourparlers sur les rails.
Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah qui domine la vie politique au Liban, a salué samedi « une étape très importante », se félicitant qu’il y ait « désormais un texte écrit et affirmant que « les jours à venir seraient cruciaux ».
Samedi également, le Premier ministre libanais sortant Nagib Mikati a confié à L’Orient-Le Jour que « l’atmosphère est positive » et qu' »un accord devrait être conclu rapidement ». Cela « pourrait avoir lieu avant la fin du mandat du président Aoun », le 31 octobre, a-t-il ajouté. Précisant que la proposition se compose de dix pages A4, il a affirmé que si l’entente est bien conclue, « cela aura des répercussions positives sur d’autres dossiers et notamment sur l’élection présidentielle ».
Première réaction israélienne
Dans sa première réaction à ces développements, Yaïr Lapid a indiqué dimanche avoir aussi reçu la proposition américaine et négocier « les derniers détails ».
« Nous ne pouvons pas encore dire qu’il s’agit d’une affaire conclue, mais nous pouvons dire que, comme nous l’avions demandé dès le début, la proposition protège entièrement les intérêts sécuritaires, diplomatiques et économiques d’Israël », a déclaré M. Lapid lors de la réunion hebdomadaire de son cabinet ministériel. « Depuis plus de dix ans, Israël tente d’arriver à cet accord. La sécurité du nord (du pays) sera renforcée. Le gisement de Karish va entrer en service et produira du gaz naturel (…) Nous ne nous opposons pas au développement d’un gisement de gaz supplémentaire au Liban d’où nous recevrons notre juste part », a ajouté M. Lapid. Selon lui, « un tel stock (d’hydrocarbures) affaiblira la dépendance du Liban à l’Iran, freinera le Hezbollah et favorisera une stabilité régionale ». Yaïr Lapid a aussi noté que « l’offre fait actuellement l’objet d’une révision juridique. « Une fois la révision achevée, nous prendrons une décision avec le ministre de la Défense Benny Gantz et au Premier ministre alternant Naftali Bennett, en coordination avec le conseiller juridique du gouvernement pour discussion et approbation », a-t-il souligné.
Les autorités libanaises et israéliennes n’ont pas dévoilé durant le week-end le texte de la médiation américaine, mais selon des informations exclusives à L’Orient-Le Jour, le gisement de Karish reste dans le giron israélien tandis que le Liban obtiendrait « la totalité du champ gazier de Cana », bien qu’une partie de ce dernier « dépasse » la future ligne de démarcation entre les deux pays en Méditerranée orientale. Les autorités israéliennes ont fait savoir qu’ils voulaient entamer dès que possible la production de gaz sur le gisement de Karish, exploité par le groupe britannique Energean. De son côté, le groupe français Total est pressenti pour prospecter et exploiter le gisement de Cana, ont indiqué à l’AFP de hauts responsables israéliens suivant ce dossier.
Polémique Lapid-Netanyahu
« Lapid donne au Hezbollah un territoire souverain de l’Etat d’Israël comportant un énorme gisement de gaz qui vous appartient, à vous citoyens israéliens », a réagi dimanche l’ex-Premier ministre israélien Benjamin. Netanyahu dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, sans définir les contours de ce « territoire souverain » dans les eaux à la frontière des deux pays. « Lapid n’a aucune légitimité pour donner des territoires qui nous appartiennent à nos ennemis (…) Il l’a fait sans débat à la Knesset (le Parlement) et sans référendum », a-t-il ajouté en menaçant de ne « pas respecter » cet éventuel accord.
Yaïr Lapid, qui compte sur l’entrée en production du gisement de Karish afin de doper les livraisons de gaz israélien à l’Europe qui cherche à diversifier ses approvisionnements, a fustigé les propos de son principal rival politique, en campagne électorale pour les législatives du 1er novembre et qui pourraient consacrer le retour de M. Netanyahu. « Netanyahu, tu as échoué pendant dix ans à parvenir à un accord. La moindre des choses serait de ne pas miner les intérêts sécuritaires d’Israël et de ne pas aider le Hezbollah avec tes annonces irresponsables », a rétorqué le Premier ministre.
Selon un sondage commandé par la chaîne publique israélienne Kan et diffusé ce weekend, 43% des Israéliens sont favorables à un accord gazier avec le Liban, 16% défavorables et 41% n’ont pas d’avis sur la question.
Modifications libanaises « non fondamentales »
Commentant ce dossier dimanche également, le vice-président du Parlement libanais Élias Bou Saab a fait état d’une « atmosphère plus que jamais positive ». Il a précisé qu’il attendait une traduction officielle en arabe de l’accord afin que le Liban puisse formuler ses remarques là-dessus. Il a cependant noté qu’il était nécessaire d’apporter « des modifications » à la proposition américaine.
« Les modifications que le Liban proposera ne seront pas fondamentales. L’ambassadrice des États-Unis a affirmé que le texte n’est pas final et peut être modifié », a précisé M. Bou Saab, dans un entretien accordé au journal panarabe al-Chark al-Awsat.
Réunion tripartite lundi à Baabda
Le chef de l’État libanais, Michel Aoun, le Premier ministre Mikati et le président du Parlement Nabih Berry tiendront une réunion tripartite lundi au palais présidentiel de Baabda pour examiner la proposition américaine, selon plusieurs sources citées par notre correspondante Hoda Chédid. Il n’est toujours pas clair si la réunion, programmée à 15 h, débouchera sur une réponse unifiée à la proposition américaine. Elle sera précédée d’une autre rencontre des membres de l’équipe technique du Liban en charge du dossier, qui est composée du vice-président du Parlement Elias Bou Saab, du directeur de la Sûreté générale Abbas Ibrahim, d’un représentant du président du Parlement Ali Hamdane, d’un officier de l’armée spécialiste en hydrographie, d’un représentant de la Direction du Pétrole, ainsi que d’autres experts.
Une source proche du président du Parlement libanais, Nabil Berry affirme que le texte remis aux autorités libanaises prévoit que la zone accordée au Liban soit délimitée par la ligne 23, mais que Beyrouth obtienne également la totalité du champ gazier de Cana, qui dépasse vers le sud la zone que borde la ligne 23. Les blocs de la zone économique exclusive libanaise (ZEE) resteront intacts, sans qu’aucune partie n’en soit accordée à Israël. La zone qui se situe entre la « ligne des bouées » et la ligne 23 devrait, elle, être déclarée zone sûre, mais sous souveraineté libanaise, étant donné qu’elle appartient à la ZEE du Liban. Beyrouth avait déjà fait savoir qu’il ne s’opposait pas à ce que cette zone soit supervisée par la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), dont le mandat devrait alors être amendé. La proposition répond donc en grande majorité aux revendications du Liban. Beyrouth devra seulement trancher, dans sa réponse à la proposition d’Amos Hochstein, la question relative à la supervision onusienne de la zone sûre.
EXCLUSIF Frontière maritime : ce que contient la proposition de Hochstein
La signature de l’accord « pourrait avoir lieu avant la fin du mandat du président Aoun », déclare Nagib Mikati.
Après des semaines de négociations entre Beyrouth, Tel Aviv et Washington, le Liban a reçu samedi la proposition écrite du médiateur américain Amos Hochstein concernant la résolution de son litige frontalier avec Israël. L’arrivée en juin dernier d’une plateforme gazière sur le champ de Karish, au large d’Israël, et les menaces militaires brandies par le Hezbollah suite à cette avancée de l’Etat hébreu sur le dossier avaient remis les pourparlers sur les rails. Ces derniers jours, l’optimisme semblait prévaloir quant à l’issue des pourparlers et c’est dans ce cadre que les autorités libanaises ont appris, vendredi à 18h, que la proposition écrite de Hochstein était parvenue à l’ambassade des États-Unis à Beyrouth. Rendez-vous fut donc pris sans tarder entre l’ambassadrice américaine Dorothy Shea et les responsables libanais, afin de leur remettre en main propre le texte.
La diplomate a ainsi été reçue samedi tour à tour par le président Michel Aoun, à Baabda, le Premier ministre sortant Nagib Mikati, à son domicile, et le chef du Parlement, Nabih Berry, à Aïn el-Tiné, afin de leur remettre le texte. « L’atmosphère est positive, et un accord devrait être conclu rapidement », a déclaré M. Mikati à L’Orient-Le Jour. La signature de cet accord « pourrait avoir lieu avant la fin du mandat du président Aoun », le 31 octobre, a-t-il ajouté. Précisant que la proposition se compose de dix pages A4, il a affirmé que si l’entente est bien conclue, « cela aura des répercussions positives sur d’autres dossiers et notamment sur l’élection présidentielle ». A sa sortie de Aïn el-Tiné, Mme Shea a également exprimé son optimisme et évoqué une situation « très positive ».
La présidence a annoncé que M. Aoun a appelé M. Mikati et M. Berry pour les consulter sur « la manière de donner une réponse libanaise dès que possible ». Selon une source du Hezbollah, le parti chiite a lui aussi été informé du contenu de la proposition, et Baabda a contacté le siège du parti chiite afin d’en discuter. Dans un discours samedi soir, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a salué « une étape très importante », se félicitant qu’il y ait « désormais un texte écrit ». « Les jours à venir seront décisifs », a-t-il ajouté.
Ligne 23, Cana et ligne des bouées
Une source proche de Nabih Berry affirme que le texte remis aux autorités prévoit que la zone accordée au Liban soit délimitée par la ligne 23, mais que Beyrouth obtienne également la totalité du champ gazier de Cana, qui dépasse vers le sud la zone que borde la ligne 23. Les blocs de la zone économique exclusive libanaise (ZEE) resteront intacts, sans qu’aucune partie n’en soit accordée à Israël. La zone qui se situe entre la « ligne des bouées » et la ligne 23 devrait, elle, être déclarée zone sûre, mais sous souveraineté libanaise, étant donné qu’elle appartient à la ZEE du Liban. Beyrouth avait déjà fait savoir qu’il ne s’opposait à ce que cette zone soit supervisée par la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), dont le mandat devrait alors être amendé. La proposition répond donc en grande majorité aux revendications du Liban. Beyrouth devra encore toutefois trancher, dans sa réponse à la proposition d’Amos Hochstein, la question relative à la supervision onusienne de la zone sûre.
La « ligne des bouées », qui s’étend sur 6 kilomètres à partir de Ras Naqoura, avait été mise en place par Israël après son retrait du Liban-Sud en 2000. Avec l’adoption de la ligne 23 comme frontière maritime officielle, cette ligne se retrouve du côté libanais, ce qui avait poussé Israël à demander une déviation de la ligne 23 prenant en compte les bouées.
Aucun lien avec la frontière terrestre
Avant de remettre officiellement sa proposition, Amos Hochstein s’est entretenu avec le vice-président du Parlement, Elias Bou Saab, et le directeur général de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, afin d’en finaliser le contenu. Les deux responsables libanais lui ont réitéré le refus du Liban que le choix du point de départ de la frontière maritime n’affecte le tracé terrestre.
Selon la proposition présentée par M. Hochstein, le tracé maritime partirait du point 31 israélien, qui est plus au nord que le point B1, réclamé par les Libanais. Le point 31 marquant également le départ de la « ligne des bouées », le tracé de la frontière maritime suivra donc cette ligne sur ses six kilomètres de long, avant de rejoindre la ligne 23. Il est toutefois explicitement mentionné dans le texte que le tracé maritime ne sera en aucun lien lié à la future démarcation de la frontière terrestre. En effet, pour cette dernière, les autorités libanaises ne semblent pas prêtes à lâcher le point B1. C’est l’espace situé entre la ligne des bouées, qui démarre au point 31 avant de rejoindre la ligne 23, et la ligne 23 elle-même, qui démarre au point B1, qui devrait donc être placée sous contrôle de l’ONU, tout en restant sous souveraineté libanaise.
Dernières étapes
Maintenant que la proposition américaine est entre les mains des autorités libanaises, que reste-t-il à faire avant de parvenir à un accord ? Il faut tout d’abord que le Liban rédige une réponse unique, en coordination entre Baabda, Aïn el-Tiné, le Grand Sérail et le Hezbollah, dans laquelle le pays marque son approbation de la proposition. La réponse libanaise devrait être prête d’ici lundi après une réunion entre les trois présidents. Le gouvernement restreint israélien devra ensuite se réunir pour avaliser la réponse libanaise. Une séance de pourparlers indirects entre toutes les parties devra alors être fixée au siège de la Finul, à Naqoura, afin de revoir les derniers détails techniques, cartes à l’appui, et préparer une version définitive de l’accord.
Des sources officielles affirment que Beyrouth acceptera la proposition de Hochstein, tant qu’elle n’impacte pas la démarcation terrestre. L’accord pourra être alors signé, sur des feuillets séparés, par le Liban et Israël. Des représentants de l’ONU et de Washington devront également apposer leur signature sur les documents. Au niveau libanais, le président de la République, le Premier ministre et les ministres des Travaux publics, de la Défense parapheront le document, qui sera envoyé à l’ONU, sous forme d’un nouveau décret de délimitation de la frontière maritime, en remplacement du texte actuel, le décret 6433/2011.
L’exploitation de la ZEE libanaise devrait alors pouvoir commencer, alors que, selon nos informations, le géant gazier Total a fait savoir qu’il ne commencera pas ses opérations d’exploration et d’exploitation tant que l’accord n’est pas signé entre le Liban et Israël et tant que des points de contentieux persistent.
AFP – JForum.fr
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