Il est soupçonné d’avoir armé Coulibaly : Claude Hermant, le facho qui vendait des armes aux islamos

Un couple suspecté d’avoir fourni des armes à Amedy Coulibaly, le tueur de la porte de Montrouge et de l’hyper casher, a été placé en garde à vue ce 15 décembre. Il s’agit de Claude Hermant et de sa compagne. Claude Hermant, un militant d’extrême droite, déjà en détention provisoire dans une enquête pour trafic d’armes, sur lequel Marianne avait enquêté en mai dernier. Nous republions en intégralité ce portrait de Claude Hermant ainsi que le droit de réponse qu’il nous avait demandé.
Claude Hermant – BAZIZ CHIBANE/SIPA

>> Cet article a été publié dans Marianne le 15 mai 2015.

 

«Les armes font partie de la culture de l’extrême droite. C’est dans l’éducation des militants.» Celui qui s’exprime ainsi est un connaisseur, lui qui a longtemps fricoté avec toutes les sortes de barbouzes que la France a engendrées depuis l’Occupation. Des hommes que leur engagement idéologique n’a jamais gênés à l’heure d’endosser le costume du gangster ou de faire commerce d’armes longues ou courtes. Des hommes qui se sont régalés avec la «Carlingue», la Gestapo française, avant de se lancer dans le combat de l’OAS pour l’Algérie française, puis d’intégrer la petite armée de l’ombre de Bob Denard, un chef de guerre qui se disait «de gauche», mais travaillait pour Jacques Foccart, le patron de la Françafrique dans l’ombre du général de Gaulle.

C’est dans cette lignée que s’inscrit Claude Hermant, 51 ans, chantre de (sa version de) l’identité française, extrême droite tendance nazillonne, qui dort sous les verrous parce qu’il aimait trop les armes et qui se retrouve soupçonné d’en avoir vendu à divers voyous, parmi lesquels Amedy Coulibaly, auteur de la tuerie de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, le 9 janvier dernier, .

Ce militant d’extrême droite prompt à faire le coup de poing contre les homos, pilier de la Maison du peuple flamand, à Lambersart (Nord), figure vénérée des crânes rasés d’Amiens à Bruxelles, fournisseur en armes à feu d’un petit caïd versé dans l’islam radical ? Vous ne rêvez pas. D’ailleurs, en cherchant bien, on leur trouverait sans doute quelques affinités – les connaisseurs se souviennent du jour où Bob Denard, qui avait épousé une juive marocaine, avait subi les critiques de ses hommes, pour avoir refusé de s’opposer à des intérêts israéliens… N’allons pourtant pas trop vite. Les policiers de la sous-direction antiterroriste sont convaincus que l’une des armes utilisées par Coulibaly est passée entre les mains de Claude Hermant. Il ne la lui aurait pas achetée directement, mais par le biais d’un intermédiaire d’origine maghrébine connecté avec un garage de Charleroi, en Belgique, qui faisait office d’armurerie clandestine. Un garage peu regardant, tenu par un homme connu pour des affaires de stupéfiants et d’armes qui a racheté à Coulibaly, pour la modique somme de 5 000 €, une Mini Cooper immatriculée au nom de sa compagne.

De la frite au trafic

Les armes n’ont pas de couleur politique, c’est bien connu, mais pour Claude Hermant, c’était plus qu’un moyen de se faire un peu d’argent et de compléter la recette de la friterie (« La frite rit ») qu’il avait ouverte à Lille. C’était une véritable passion, au point qu’il était passé maître dans l’art de remilitariser des armes neutralisées. Profitant à plein d’une faille de la législation européenne qui fait que l’on ne démilitarise pas avec autant de soin les armes en Belgique, en Allemagne, en Autriche et au Portugal qu’en France, le chef de file nordiste du Bloc identitaire, groupuscule fascisant situé à la droite du Front national, importait des armes «inoffensives» qu’il remettait d’«aplomb». Il se fournissait auprès d’une société slovène, AFG, spécialisée dans la commercialisation d’armes à destination du cinéma. Des armes plus vraies que nature, mais impropres à la guerre, qu’il réparait avant de les écouler chez des collectionneurs, mais aussi auprès de clients qui ne comptaient pas les accrocher au mur de leur salon. Parmi eux, un douanier, un policier et un nombre important de caïds de cité soucieux de montrer leur puissance de feu, et pourquoi pas d’allumer leurs rivaux.

Barbouze au Congo

Comme bien d’autres avant lui, à l’instar de ce CRS qui profitait de ses missions au Liban pour ramener à Marseille des cantines bourrées d’armes et de munitions, entre 1985 et 1990, Claude Hermant a toujours mélangé canons et engagement politique. L’homme a fait ses classes dans les rangs du DPS (pour Département protection sécurité), sorte de milice poussée à l’ombre du Front national, alors dirigée par un certain Bernard Courcelle. Il y aurait servi pendant six ans, avant de se retrouver embarqué dans une mauvaise histoire barbouzarde au Congo pour laquelle, lâché par ses commanditaires, il fit un séjour en prison. Déçu donc, au point de se confier, en 2001, au journal Libération, auquel il raconte (voir marianne.net) comment le patron du DPS a monté une cellule composée de 30 à 60 hommes de main rompus aux actions clandestines, des crânes rasés capables de jouer aux espions, aux trublions, voire de partir en Afrique en mode Pieds Nickelés pour tenter de renverser un chef d’Etat… De là à la défense de la culture flamande, il n’y a qu’un pas, que notre homme a franchi bien entendu les armes à la main.

Rêve-t-il de faire la police, ce solide gaillard que son avocat présente comme un «combattant n’ayant jamais travaillé contre les intérêts de son pays» ? Toujours est-il qu’il se rapproche des gendarmes pour leur proposer ses services. Lesquels font de lui un indicateur dûment répertorié, avec les avantages que cela peut procurer. Le «tonton» donnera quelques affaires aux pandores, moyennant quoi ils lui assurent une forme d’impunité. Comme cela se pratique dans le cadre de la lutte contre le trafic de stupéfiants, sauf qu’il s’agit ici de commerce illégal d’armes. Et que Claude Hermant semble donner à ses officiers traitants bien moins qu’il n’en fait lui-même, comme un dealer balancerait ses vendeurs de barrettes de shit pour pouvoir écouler la cocaïne au kilo. Au point que l’on se demande qui, dans le couple traitant-traité, tirait vraiment les ficelles.

Que l’un des terroristes du mois de janvier se soit procuré une partie de son matériel auprès d’un militant d’extrême droite plus ou moins couvert par la gendarmerie nationale fait assez mauvais genre. Ce n’est cependant pas la première fois que les armes zigzaguent. Nombre de mercenaires, une fois démobilisés, se sont retrouvés sur le carreau avec pour seule ressource la vente d’armes sur le marché noir, quitte à frayer avec des voyous, voire des terroristes. L’histoire du milieu à la française regorge de personnages à la lisière entre le paramilitaire et les armes, à l’instar d’un Jacques Mesrine, qui avant de tirer dans les pattes d’un journaliste de l’hebdo d’extrême droite Minute, avait penché en Algérie du côté de la torture et du maintien de ce pays dans le giron français. Ou comme ces anciens militaires qui montaient au braquage avec le gang des Lyonnais, carte d’état-major sous les yeux pour préparer leurs itinéraires bis par les routes départementales et les chemins forestiers, en cas de besoin.


 

 >> Voici le droit de réponse de l’avocat de Claude Hermant, publié dans Marianne le 21 août.

« L’avocat de M. Claude Hermant nous écrit : Dans le cadre d’un article intitulé «Le facho vendait des armes aux islamos», vous mettez en cause mon client, M. Claude Hermant, le contraignant à user de son droit de réponse, par mon entremise, dans le respect du secret de l’instruction.

Contrairement à ce que vous indiquez, mon client n’a jamais été le chef de file du «Bloc identitaire», ni le «pilier» de ce mouvement, pas plus qu’il ne s’inscrit dans la «lignée [d’une] extrême droite tendance nazillonne».

En effet, si les quelques lignes octroyées par la législation, dans le cadre d’un droit de réponse, ne permettent pas une exégèse de ses idées et opinions politiques, mon client n’a jamais été membre du Bloc identitaire et ses attaches familiales démontrent, à elles seules, qu’il n’a aucune «tendance nazillonne».

Il n’est ni «un truand», ni «prompt à faire le coup de poing contre les homos» : son casier judiciaire est vierge et il n’a aucunement pris parti, ni manifesté, contre le mariage homosexuel. Mon client n’est pas, non plus, «passé maître dans l’art» de la réactivation d’armes neutralisées, avec les conséquences que vous évoquez, ni n’a jamais bénéficié d’une quelconque «impunité» des divers services de l’Etat (DGSI, DCPJ, DIPJ-Lille, DNRED, CCPD, gendarmerie, etc.).

Au surplus, il est édifiant que «des policiers de la sous-direction antiterroriste» livrent, semble-t-il, leurs impressions sur une enquête en cours en alléguant d’un éventuel lien entre mon client et Amedy Coulibaly, au point que la simple lecture du titre de votre article laisse entendre que cette information serait avérée.

Pour autant, vouloir répondre précisément à l’ensemble de ces rumeurs induirait une remise en cause du secret de l’instruction et aurait, peut-être, des conséquences néfastes sur les investigations en lien avec Amedy Coulibaly.

En tout état de cause, mon client, outre le fait qu’il bénéficie du droit à la présomption d’innocence, n’entend pas devenir un nouveau «Marc Fievet», comme il l’a déjà indiqué dans les couloirs du palais de justice de Lille.

M. Hermant entend donc laver son honneur et s’emploiera, le moment venu et selon les moyens de preuve qu’il choisira, à donner leur juste portée aux faits qui lui sont reprochés, comme il a déjà pu le faire par le passé. »


 

>> Et voici la réponse à ce droit de réponse :

« M. Hermant est en droit de ne pas assumer ses choix politiques et même de contester tous liens entre Bloc identitaire et extrême droite. Pour le reste, comptons, comme son avocat, sur la police antiterroriste pour déterminer dans quelles conditions une arme passée entre ses mains se serait retrouvée entre celles du terroriste Amedy Coulibaly. Quant à «Marc Fievet», la comparaison surprend. Cet aviseur des douanes, lâché par l’administration, s’est retrouvé en prison pour trafic de drogue. »

marianne.net

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