Vayigach: entre l’intégration et l’assimilation 

« Et la nouvelle fut entendue au palais de Pharaon, disant: « Les frères de Joseph sont venus ». Et cela plu aux yeux de Pharaon et de ses serviteurs.

Pharaon dit à Joseph: « Dis à tes frères: « Faites ceci: « Chargez vos bêtes et allez directement au pays de Canaan. Et prenez votre père et vos maisonnées et venez chez moi (elay). Je vous donnerai le bon du pays d’Egypte (eth tov erets mitsraïm) et vous mangerez le meilleur de la terre (eth h’elev haarets)(Gn, 45, 16, 18) ».

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Les versets précités doivent bien sûr être mis en regard de ceux qui relateront au livre de L’Exode les commencements de la persécution des descendants de Jacob en ce même pays d’Egypte mais par un Pharaon « qui ne connaissait pas Joseph », qui n’en voulait rien savoir.

Dans un pays aussi vaste que cette Egypte là, sur des durées aussi longues, il va de soi que les pharaons se suivent et ne se ressemblent pas toujours. Celui dont il est question dans la présente paracha se caractérise par sa grande intelligence, par son élévation spirituelle, ses intuitions concernant l’avenir, son sens de l’hospitalité.

Ce qui n’en fait pas pour autant le 13eme fils de Jacob! A aucun moment il n’oublie ni qui il est, ni le pays dont il doit assurer le sort.

Les descendants de Jacob ne doivent pas l’oublier non plus, pas plus qu’ils ne doivent perdre de vue qu’ils ne sont en ce pays que de passage, qu’ils ne sont pas destinés à s’y implanter, à devenir des égyptiens hébraïques.

En somme, en ce moment de grande effusion affective et presque de sidération mentale, il convient que chacun garde présent à l’esprit sa propre vocation. Répétons le: celle du Pharaon l’incite à rechercher chaque fois le plus grand bien de l’Egypte, d’où cette invite en direction des frères de Joseph, laquelle procède d’un raisonnement en bonne et due forme.

Si un seul des fils de Jacob s’est trouvé en mesure de si bien travailler à la prospérité puis à la survie de Mitsraïm, tous les espoirs seront permis lorsque toute la fratrie se sera installée là, pour apporter au pays de Pharaon l’excellence de son savoir collectif, avec le suc de la bénédiction divine.

D’ailleurs, ce n’est pas aux marges du pays, dans l’on ne sait quelle province reculée et obscure que les fils de Jacob s’installeront en compagnie de leur père mais comme précise le récit biblique: dans le « bon » (tov) de l’Egypte, de sorte que l’on puisse y consommer le « meilleur » (h’elev) de la terre, et il faut être attentif à cette gradation ascendante.

Seulement, à bon entendeur… C’est bien vers Pharaon, et vers lui seul (elay), que les Hébreux devront se diriger, physiquement et si l’on peut dire culturellement.

La clause migratoire qui les favorise ne saurait leur faire perdre de vue que c’est pour l’Egypte qu’ils devront œuvrer, quels que soient les avantages, réels ou présumés, qu’ils en retireront et c’est pourquoi il ne faut pas dissocier ces versets de ceux du début de L’Exode.

Quant aux fils de Jacob, et à Jacob-Israël lui même à présent, sans doute l’invite de Pharaon est elle inespérée au regard de la famine qui afflige le reste du monde habité.

Joseph est déjà sur place, dans une position de pouvoir qui permet à chacun d’envisager l’avenir avec un fort sentiment de sécurité. Mais une sécurité de quelle nature?

Si les paroles de Pharaon sont accueillantes, certes, elles impliquent nécessairement et à tout le moins une désorientation spirituelle puisque la vocation de Jacob et des siens, en tant que descendants d’Abraham et porteurs de sa promesse, doit les porter au contraire à s’implanter dans le pays de Canaan, initialement dévolu, à Chem, afin de le transformer, de le transvaluer en pays d’Israël.

Pour l’ensemble de cette collectivité affectée à ce projet historique et spirituel, le risque est aussi grand que la tentation.

Quoi que l’on ait à l’esprit pour l’avenir, sur le moment il ne fait aucun doute que vivre dans le meilleur d’un pays, sachant qu’il faudra un jour où l’autre, et sans doute sans préavis, le quitter pour une autre contrée plus austère, moins immédiatement gratifiante, incite à prolonger sa carte de séjour dans le pays de passage, avec, assurément, le risque de s’y dissoudre complètement.

 A la Mémoire de nos chers parents (Abraham et Rose Nabet Z’l)

Débat permanent, pour l’exprimer en termes plus contemporains encore, entre l’intégration et l’assimilation.

Risque d’autant plus réel que cette fois Jacob en personne descend en Egypte qui devient par là même son environnement le plus manifeste. Jacob-Israël, de ce point de vue, n’est plus en position d’extériorité vis à vis de Mitsraïm non plus que de sa propre famille.

Le moment venu, sortir d’Egypte, pour toutes ces raisons, s’avérera infiniment plus difficile que d’y entrer.

Raphaël Draï zatsal

Source

 

 

« Il embrassa TOUS ses frères et pleura à leur cou. Alors seulement ses frères lui parlèrent « . (Genèse 45, 15)

Après une longue attente, après beaucoup de souffrances, Joseph voit enfin se réaliser les rêves qu’il avait faits dans la maison paternelle.

Ses frères viennent se prosterner devant lui, certes; mais au-delà de ce geste de soumission, qui s’adresse en réalité au monarque, Joseph se rend compte que son absence a recréé l’unité entre les frères – entre tous les frères -et qu’il n’y avait plus place dorénavant pour une différenciation entre les enfants des  » servantes  » et les autres. Or c’est bien là ce qu’il avait rêvé à l’époque.

Cette fraternité, il en a été le témoin ému quand il a entendu avec quelle flamme Juda a plaidé devant lui la cause de Benjamin et s’est même proposé de prendre sa place.

Mais il a surtout senti le remords qui brûlait le cœur de ses frères et c’est cet ensemble de faits qui l’a fait éclater en, larmes.

Larmes d’émotion, mais aussi larmes de joie. Dorénavant, il en était certain, l’union régnait vraiment entre ses frères, si différents les uns des autres, mais tous liés intimement l’un à l’autre.

S’il avait été si dur envers eux quand ils se sont retrouvés face à face en. Egypte, s’il avait su maîtriser son cœur et leur parler comme un étranger, c’était pour mieux se persuader que cette unité était établie pour de bon et non pas seulement superficiellement, sous la poussée des événements.

L’épreuve était maintenant achevée. II ne restait plus à Joseph qu’à faire sortir tous les témoins dont la présence pourrait être gênante pour ses. frères, afin que, à son grand bonheur, puisse s’opérer la réconciliation et les retrouvailles de douze frères dorénavant unis par un même amour.

LE RABBIN JEAN SCHWARZ

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