Depuis plus de deux semaines, les actualités rapportent par bribes plus ou moins vérifiables, les circonstances de la mort de Jamal Ahmed KHASHOGGI dans un consulat saoudien en Turquie.
Deux versions nous sont généralement présentées :
  • La chronique parle de l’assassinat d’un journaliste opposant politique au Royaume saoudien, sans connaître le commanditaire. A-t-il été ordonné par le prince héritier ou par ses opposants politiques, dans un souci de le déstabiliser ?
  • Néanmoins la divulgation progressive des faits s’apparente aussi à un règlement de comptes entre services secrets, compte tenu du fait qu’il semblait travailler pour un ou plusieurs pays.
Au-delà du crime politique perpétré en territoire étranger, des péripéties tragiques, cette affaire est significative pour au moins quatre raisons :
  • Les différentes versions données par les Saoudiens interpellent sur la situation du pouvoir au Royaume wahhabite. Ce n’est pas la première fois qu’une opération de barbouzes se solde en fiasco ; mais, généralement, les autorités, quel que soit le degré de responsabilité, donnent rapidement une version officielle, et s’en tiennent. Rien de tel dans ce cas de figure ; de nombreuses explications ont été présentées par les autorités saoudiennes avant de reconnaître leur responsabilité.
Début juillet, je vous ai entretenu de la marche saoudienne vers la « normalité » ; en mettant des guillemets, je voulais signifier les limites des évolutions sociétales et de la mise en place d’un nouveau modèle de développement libéré du pétrole, intitulé « Vision 2030 ».
Cette affaire démontre qu’il y a loin de la coupe aux lèvres, et qu’une dictature n’évolue pas en peu de temps. Je vous indiquais que « la marche vers la « normalité » n’est pas un processus consensuel et crée de nombreux remous dans la famille royale ; le 21 avril dernier, le palais royal aurait été attaqué et le prince héritier sévèrement blessé au point de ne pouvoir apparaître en public durant près de quarante jours. ». Cette affaire KHASHOGGI peut être une nouvelle facette de la lutte pour le pouvoir à Ryad.
  • La chronique a été alimentée, entretenue, par la Turquie qui se sert de cette affaire pour ternir l’image de la Royauté saoudienne, et marquer des points dans son opposition aux Saoudiens pour le contrôle du monde musulman non chiite.
La confrontation est religieuse entre le wahhabisme saoudien et les frères musulmans turcs ; accessoirement, KHASHOGGI était frère musulman.
Enfin, n’oublions pas que les deux pays s’opposent en Syrie. Ce contexte laisse présager des révélations régulièrement distillées…
  • Cette affaire a donné lieu à une nouvelle manifestation des divisions européennes. Comme dans le dossier des migrants et l’accord avec les Turcs sur ce sujet, Mme Angela MERKEL a décidé sans concertation de sanctionner les Saoudiens en annonçant l’arrêt des ventes d’armes. C’est une décision facile à prendre puisque le volume en cause est très réduit. Cela permet de soigner son image de marque, et accessoirement de jeter une pierre dans le jardin français.
Avec l’affaire KHASSOGGI, le monde semble découvrir la réalité de la dictature saoudienne. Certains vont jusqu’à dire ou écrire « rien de nouveau sous le soleil ». Le réalisme semble reprendre progressivement le dessus. Et certains n’hésitent pas à rappeler la phrase du Général de Gaulle « Un Etat n’a pas d’amis, il n’a que des intérêts ».
  • Les Américains l’ont bien compris. Après certaines initiatives de membres du Congrès et des déclarations du Président TRUMP, la realpolitik a conduit à ne pas compromettre la montagne de contrats rapportés, il n’y a pas si longtemps de Ryad par le Président américain.
Sans compter l’annonce par les Saoudiens d’une rapide augmentation de leurs ventes de pétrole. Cela permettrait d’atténuer les effets attendus de la prochaine application, à compter du 4 novembre, des sanctions devant empêcher l’Iran de vendre son pétrole.
Cela pourrait orienter le prix du brut à la baisse, ou au moins contenir son orientation haussière, et ce serait, à ce jour, la véritable conséquence de cette affaire qu’on pourrait qualifier de rocambolesque, s’il n’y avait eu mort d’homme, assassinat politique.
Dov ZERAH
Je vous invite à me retrouver le mardi matin à 7h05 sur Radio J 94.8 FM pour ma chronique économique et financière. De plus toute personne intéressée par l’information économique sur l’Afrique, je vous invite à aller consulter le site. Merci Dov ZERAH

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