Goldnadel : «Pourquoi le débat autour du conflit israélo-palestinien est biaisé»
Par Gilles William Goldnadel
FIGAROVOX/CHRONIQUE – Pour l’avocat, certains médias manquent de sens critique en refusant de considérer le Hamas comme une organisation terroriste et en utilisant le vocable de «colons» pour désigner les juifs assassinés après une fusillade près d’une synagogue de Jérusalem, le 26 janvier.
Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour FigaroVox.
L’attentat terroriste commis en plein sabbat devant une synagogue de Jérusalem, ce 26 janvier, le jour même de la commémoration de la Shoah, servira de triste prétexte à une réflexion sur mes indignations quotidiennes.
Je ne cesse en effet depuis longtemps d’attirer l’attention de mon lecteur sur ce sens critique à sens unique qui caractérise le regard médiatique majoritaire sur le conflit opposant les Israéliens aux Arabes de Palestine.
Je l’explique bien davantage comme l’une des conséquences de l’anti-occidentalisme gauchisant – pour ne pas parler d’un racisme anti-blanc – plutôt que comme un antisémitisme subsidiaire.
Je n’ai jamais dissimulé mon engagement subjectif dans le camp d’un Israël toujours menacé mais me suis pour autant toujours essayé à l’honnêteté. Mais force est de constater objectivement une partialité idéologique qui non seulement fausse le regard public mais encourage et exalte les extrémismes.
Les derniers événements dramatiques serviront de témoins à mes accusations.
Que n’a-t-on vu en effet ? Un personnel médiatique mettant en équivalence victimaire neuf membres du jihad islamique exécutés à Jenine par l’armée israélienne armes en mains avec sept juifs désarmés assassinés devant la synagogue où ils allaient prier .
Même équivalence révoltante quand le journal Le Monde présente avec euphémisme le jihad islamique – organisation classée terroriste par tous les pays démocratiques – comme une «formation militaire». À noter la répugnance journalistique à user du vocable terroriste dès qu’il s’agit de l’accoler au mot palestinien.
Il semble en effet acquis au débat médiatique que ce serait le refus israélien d’un état pour les Arabes de Palestine qui expliquerait leur rage désespérée. Gilles-William Goldnadel
Quant aux juifs assassinés, le même journal leur affuble le vocable peu enviable de «colons». Bien que l’attentat ait eu lieu à Jérusalem – Est, au statut controversé depuis toujours, il est choquant de considérer comme des «colons», ces juifs qui ont fait l’objet d’une épuration ethnique en 1948, dans cette vieille cité de David, où ils incarnaient la religion majoritaire.
Bien sûr, nombre d’observateurs se prétendant objectifs expliquent que l’actuel gouvernement israélien – qui n’a jamais été aussi à droite – est composé en partie d’extrémistes et de religieux de stricte orthodoxie. Et ils n’ont, hélas, pas tort. Je mentirais en disant que la récente composition de celui-ci – conséquence d’un système électoral à la proportionnelle intégrale démentiel – me plonge dans un abîme de béatitude. Il abîme en tout état de cause l’image d’un pays à qui déjà rien n’est pardonné et offre en cela un merveilleux cadeau à ses adversaires.
Mais ces observateurs critiques au regard acéré seraient autrement plus crédibles s’ils ne regardaient la partie adverse avec des lunettes opaques.
Tandis qu’ils usent du vocable «suprémaciste» pour qualifier certains ministres israéliens, ils n’ont jamais évoqué le fait que le chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas était l’auteur d’une thèse négationniste sur la Shoah qui présentait les juifs comme complices d’Hitler et collectionnait depuis les déclarations antisémites.
Quant au Hamas, judéophobe jusque dans sa charte, il n’est – bien que lui aussi classé officiellement terroriste – jamais qualifié comme tel , lesdits observateurs décidément très économes du mot en cette circonstance, préférant le qualifier plus sobrement de «mouvement islamiste». Ce vocabulaire indulgent n’a rien d’innocent.
Reste le cœur du conflit. Il expliquerait, sinon justifierait, le recours à ce terrorisme considéré finalement comme inévitable alors qu’il fait partie intégrante de la culture historique du radicalisme islamo-palestinien exalté qui se transmet de parents à enfants.
Il semble en effet acquis au débat médiatique que ce serait le refus israélien d’un état pour les Arabes de Palestine qui expliquerait leur rage désespérée.
Or il s’agit d’un mensonge patenté. J’affirme bien au contraire qu’il existerait depuis vingt ans un État pour ces Arabes palestiniens qui n’ont cessé de gâcher l’excellent dossier qu’ils sont en droit de faire valoir, si l’appareil politique qui les représente avait accepté les propositions de Rabin et Pères, refusées par Arafat après qu’une pré-structure étatique leur a été accordée. Bill Clinton en a attesté. Depuis, Barak et Olmert ont renouvelé des propositions toujours rejetées par un nationalisme palestinien irrédentiste , divisé , travaillé par le terrorisme islamiste et finalement n’ayant jamais renoncé à voir un jour prochain ou lointain une Palestine arabe et musulmane de la mer jusqu’au Jourdain.
Il fut un temps où 90% des Israéliens étaient favorables à un compromis territorial douloureux mais conditionné à une paix définitive. Nous n’en sommes hélas plus là. Et la médiocrité du personnel politique israélien comme le développement des implantations n’arrangent rien.
Ils n’en demeurent pas moins que ce sens critique à sens inique constitue non seulement une nouvelle et très périlleuse injustice commise contre le peuple juif mais encore un encouragement à ses farouches ennemis.
Par Gilles william Goldnadel www.lefigaro.fr/
Gilles-William Goldnadel. JOEL SAGET/AFP