Les réactions du monde arabe et musulman à la déclaration du président Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël ne sont pas étonnantes, pas plus que celle de la France, qui a toujours été en pointe dans ce que l’amiral Michel Darmon avait coutume d’appeler la « croisade contre Jérusalem ».

Un autre discours sur Jérusalem et les Juifs est pourtant possible et se fait parfois entendre, encore timidement, dans le concert des menaces et des appels à la haine et à la violence. Ce discours n’est pas seulement celui des chrétiens évangélistes, mais aussi celui de représentants d’une autre voix musulmane, à l’instar de l’historien pakistanais Mobarak Haidar qui soutient la décision américaine *.

Un tel discours ne repose pas seulement sur des considérations géopolitiques ; il peut également trouver dans l’islam même les fondements d’une autre relation avec les Juifs et Israël.

Comme le christianisme en effet, l’islam a partie liée, dès son origine, avec les Juifs et l’histoire de sa relation avec le peuple Juif est celle d’un amour déçu, qui s’est transformé en haine meurtrière.

Les traces de cette relation ambivalente, et de l’estime que l’islam originel vouait aux Juifs, sont encore présentes dans les textes et dans la tradition musulmane **. Mais elles sont enfouies sous les épaisses strates de l’histoire et de la politique, qui en ont fait un secret bien gardé et presque inaudible aujourd’hui.

Comment les musulmans désignent-ils aujourd’hui Jérusalem ? Le nom le plus courant est celui de Al-Quds qui signifie la Sainte. Mais de quelle sainteté s’agit-il et d’où tire-t-elle sa source ?

La réponse à cette question nous est donnée par l’autre nom de Jérusalem, Bayit al-Maqdis. On le traduit souvent par “Maison du Sanctuaire”, “Noble Sanctuaire” ou par d’autres expressions équivalentes, traductions qui sont en réalité impropres, car elles n’expriment pas la signification authentique de cette expression. Au sens premier et littéral, en effet, Bayit al-Maqdis désigne le Temple, l’expression arabe étant tout simplement le calque de l’hébreu Beit  ha-Mikdash.

Le Coran lui-même relate dans plusieurs Sourates la construction du Temple par Salomon et la prière musulmane fut, au tout début de l’islam, tournée vers Jérusalem, lieu du Temple, avant que n’intervienne le changement de la Qibla (direction de la prière) et son orientation vers La Mecque. Le fait que Jérusalem est le site du Temple de Salomon est ainsi acté et ancré dans le Coran, dans la langue arabe et dans l’histoire de l’islam, de manière irréfutable. Cette vérité indéniable apparaît parfois de manière explicite dans le discours de certains dirigeants arabes contemporains, à l’instar de Sari Nuseibeh, intellectuel palestinien qui a déclaré en 1995 que “la mosquée (de Jérusalem) est la revivification de l’ancien Temple juif” ***.

Le discours dominant de l’islam contemporain prétend toutefois que le Bayit al-Maqdis n’a jamais désigné le temple de Salomon, mais uniquement la mosquée d’Omar. Mahmoud Abbas, suivant l’exemple de son prédécesseur Yasser Arafat, va encore plus loin dans cette attitude négationniste et affirme que le Temple n’a jamais existé. Cette négation actuelle de l’existence même du Temple de Salomon, dans la bouche des dirigeants palestiniens ou des représentants de mouvements islamistes, s’inscrit en faux contre l’histoire de l’islam. La réécriture de l’histoire, caractéristique de la réappropriation par l’Islam des symboles religieux appartenant à la période pré-islamique, ne peut cacher l’évidence : Jérusalem est bien la ville du Temple de Salomon et la capitale du roi David. La décision du président Trump de reconnaître l’évidence peut certes embraser la rue arabe, mais elle peut aussi encourager les musulmans progressistes à envisager une autre relation avec les Juifs et Israël

Pierre Lurçat   avocat, écrivain et traducteur.

*

https://www.memri.org/reports/after-trumps-recognition-jerusalem-israels-capital-pakistani-historian-mobarak-haidar-writes

** Sur les relations ambivalentes entre l’islam, Jérusalem et les Juifs, voir notamment cette conférence d’Eliezer Cherki,

http://lys-dor.com/2011/04/25/la-nostalgie-de-jerusalem-chez-les-musulmans-un-bilan-par-eliezer-cherki/

Voir aussi, https://www.fichier-pdf.fr/2015/12/23/jerusalem-dans-l-islam/preview/page/1/

*** Cité par Martin Kramer,

http://martinkramer.org/sandbox/reader/archives/the-temples-of-jerusalem-in-islam/

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

4 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Eliezer

Salaud de Trump! Il a coupé l’herbe sous les pieds de l’organisation des Niais Unis qui s’apprêter à voter le statut de Jérusalem dans leur mascarade. Ils nous ont déjà montré de quoi ils sont capables quand ils votent. En plus, tout le monde sait que les palestiniens ne revendiquent Jérusalem que pour embêter les juifs. En réalité ils s’en foutent totalement de leur IIIè lieu saint. Ils en ont un premier et second. Ils rêvaient de faire comme avec Palmyre et tout ce qu’ils ne comprennent (pour autant qu’ils comprennent de temps à autre). J’attend de voir la Turquie construire son ambassade sans permis de bâtir à Jérusalem… Trêve de conneries! Nous, nous respecterons le statu quo, ce qui n’est pas le cas en face. Merci pour ton courage Donald

lior

sur aval31, il y a aussi « la palestine aux israelites », un livre de 1933 expliquant tout cela en détail.
http://aval31.free.fr/palestisreal/web/index.htm

Ratfucker

L’Islam a redécouvert Jérusalem cinquante ans après la mort de Muhammad. En 682 de notre ère, Abd allah ibn al-Zubayr se révolta contre les souverains islamiques de Damas, conquit La Mecque et empêcha les pèlerins de parvenir à La Mecque pour le Hajj. Abd al-Malik, le Calife ‘Umayyade, avait besoin d’un lieu saint alternatif pour le pèlerinage et décida que ce serait Jérusalem, qui était sous son contrôle. Lorsque le califat passa entre les mains des Abbassides de Bagdad, Jérusalem retomba dans l’oubli jusqu’aux Croisades.

La Charte nationale palestinienne de 1964, ne mentionne pas Jérusalem. Cette indifférence prit fin brusquement après juin 1967, lorsque la ville sainte passa sous contrôle israélien. L’OLP rattrapa son omission de 1964 en mentionnant expressément Jérusalem dans sa constitution de 1968 comme étant «le siège de l’Organisation de libération de la Palestine».

Elie de Paris

Les dictatures, quelles qu’elles soient, ont toujours pris soin de réécrire l’histoire, mêmes sur les hiéroglyphes sur les bas-reliefs, au burin…
Ne lit-on pas, aujourd’hui, le retrait des livres de Camus et autre auteur dans les bibliothèques turques, faute de les brûler, tout comme, en Allemagne, avant la Shoah…
Effacer la vérité,… ou le peuple.