Israël et Liz Truss, première ministre Britannique.
À chaque changement de gouvernance dans un pays occidental, il est coutume d’analyser les répercussions politiques sur Israël. Le Parti conservateur britannique vient de désigner Liz Truss comme nouvelle dirigeante et prochaine Première ministre du Royaume uni. Le changement est significatif après le départ du contesté et contestable Boris Johnson. Liz Truss a eu un parcours politique sinueux puisqu’elle a commencé à gauche en criant «à bas la monarchie» , pour se déporter ensuite à droite en tant que Brexiteer intransigeante.
Truss a occupé six postes ministériels sous trois Premiers ministres, dont 11 mois en tant que ministre des Affaires étrangères. Pourtant, malgré ses années de service public, de nombreux Britanniques ne la connaissaient vraiment pas autant qu’ils connaissaient Boris Johnson, ancien maire de Londres et chroniqueur de journal. Certains la qualifient de métamorphe, un être ayant la capacité de modifier son apparence physique. Elle a changé ses opinions en fonction du moment. Elle s’était battue pour que la Grande-Bretagne reste dans l’Union européenne puis a évolué en devenant partisane du Brexit, donnant l’impression d’être une girouette au gré du vent.
Il ne fait aucun doute qu’elle est très ambitieuse, impopulaire à Moscou et à Bruxelles. Truss est une alliée fiable de l’OTAN et une partisane de l’Ukraine, qui n’hésite pas à parler durement à la Russie et à Vladimir Poutine. Elle a été à la pointe du combat pour des sanctions contre les oligarques russes dont beaucoup vivent à Londres. Mais dans sa lancée, elle était allée jusqu’à conseiller aux Britanniques d’aller se battre en Ukraine. Cela a été mal perçu par le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov.
Impopulaire à Moscou, Truss n’est pas non plus très populaire à Bruxelles car elle est perçue comme une agitatrice, une opportuniste anti-européenne capable de ternir les relations entre la Grande-Bretagne et les 27 nations de l’UE. En direct à la télévision, elle a été incapable de qualifier Emmanuel Macron «d’ami ou ennemi», à quoi il avait répondu : «Si les Français et les Britanniques ne sont pas capables de dire si nous sommes amis ou ennemis, le terme n’est pas neutre, nous allons avoir un problème».
Elle n’arrive pas au pouvoir dans une période facile. Elle hérite d’une crise intérieure du coût de la vie, alimentée par la montée en flèche de l’inflation et des prix de l’énergie. Sur le plan des affaires étrangères, elle a déjà précisé les pistes qu’elle suivrait. Lors du conflit avec Gaza en août 2022, elle avait été claire et sans ambiguïté : «Le Royaume-Uni soutient Israël et son droit à se défendre». Elle a déjà annoncé qu’elle interdirait le BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) en empêchant les organismes publics et les fonds de pension de boycotter les investissements en Israël.
Elle ne cache pas son soutien indéfectible au Premier ministre israélien après avoir annoncé qu’elle avait «nettoyé» le ministère des Affaires étrangères de certains bureaucrates sachant que l’ONU disposait «franchement de forts éléments d’antisémitisme». Elle faisait allusion aux deux résolutions du CDH «affirmant le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et condamnant les colonies israéliennes illégales dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem-Est, et les hauteurs occupées du Golan». Le Royaume-Uni avait voté contre.
Sa démarche est allée jusqu’à annoncer qu’elle relocaliserait vers Jérusalem son ambassade en Israël : «J’ai eu de nombreuses conversations avec mon bon ami Yair Lapid sur ce sujet. Reconnaissant cela, je vais examiner une décision pour m’assurer que nous opérons sur les bases les plus solides en Israël». Son ministère avait déjà engagé des négociations pour un accord de libre-échange avec Israël.
Sur la question urgente de l’accord sur le nucléaire iranien, Truss a adopté une position plus dure : «J’ai été claire sur le fait que les progrès sur le plan d’action global conjoint n’avancent pas assez vite, et je vous assure que si le JCPOA s’effondre, toutes les options sont sur la table», position qui fait bien sûr plaisir à Israël.
Il est certain cependant que si son attention serait portée sur la situation économique difficile et les problèmes intérieurs, Truss gèrerait les crises internationales en fonction de ses propres intérêts et privilégierait la sécurité et la stabilité par rapport à toute autre question. Dans l’état actuel de ses déclarations, Truss sera un bon allié d’Israël mais reste à savoir si d’autres facteurs internationaux ou locaux n’infléchiraient pas sa politique pour la rendre plus pragmatique. Beaucoup d’autres dirigeants, qui arrivaient au pouvoir, avaient fait preuve de beaucoup de bonne volonté à l’égard d’Israël mais ils ont été confrontés à la realpolitik face à leur Parlement et à leur opposition. À suivre…
Source : benillouche.blogspot.com