EXCLUSIF. La police a recueilli les confidences du cerveau des attentats du 13 novembre à travers les auditions de ceux qui l’ont côtoyé durant son périple.

Abdelhamid Abaaoud, cerveau présumé des attentats du 13 novembre, à Paris.

Il est 21 h 30, le 17 novembre, lorsque Hasna Aït Boulahcen, 26 ans, récupère son cousin, Abdelhamid Abaaoud, caché dans un buisson rue des Bergeries à Aubervilliers. Ce soir-là, elle est accompagnée d’une amie. Les deux femmes se sont connues un mois plus tôt alors que Hasna rentrait d’un séjour de plusieurs mois au Maroc, le pays de ses parents. Là-bas, a-t-elle confié à son amie, elle a rencontré un salafiste qui lui a promis la Syrie en guise de voyage de noces.

Mais ce 17 novembre, quatre jours après les attentats de Paris et Saint-Denis, l’heure n’est plus aux bavardages. Avec les 750 euros qu’elle a reçus de Bruxelles via Western Union, Hasna, qui a décidé de sauver Abdelhamid Abaaoud, avec lequel elle a repris contact en avril via Facebook, « réquisitionne » un taxi clandestin durant plusieurs heures. Sa mission : le « cacher pendant 48 heures », le temps qu’il s’organise pour « repasser à l’action ».

Pour retrouver le djihadiste, planqué avec un complice aux abords d’une casse automobile, Hasna, pendue au téléphone, est guidée par un complice de l’organisation État islamique qui réside en Belgique. Quand Abaaoud sort du bois avec un acolyte non identifié, il « ressemble à un Roumain ». Le terroriste porte un bob de couleur crème et des baskets orange. Sous son blouson gonflé apparaît du matériel qui pourrait être des armes ou des gilets explosifs.

Une centaine d’autres « frères » prêts à passer à l’action en France

Dans la voiture, Abaaoud se laisse aller à quelques confidences devant sa cousine : il est bien l’organisateur des attentats, et s’est lui-même déplacé pour coordonner les attaques contre les bars parisiens et le Bataclan. Quant aux autres attentats, qu’il qualifie de « loupés » – sans doute ceux du Stade de France, supervisés par le fugitif Salah Abdeslam –, il n’était pas présent, prétend-il. D’humeur loquace, il confit également que d’autres « frères » se trouvent en France et sont prêts à passer à l’action. Il va jusqu’à préciser leur nombre : ils seraient 90 disséminés dans toute l’Ile-de-France, décidés à frapper « les transports, les écoles et les quartiers juifs » pendant les fêtes.

Abaaoud lui-même compte repasser très vite à l’acte. Le 19 novembre, il prévoit de faire exploser une bombe au centre commercial de La Défense, près de Paris, et de viser un commissariat de police, annonce-t-il. Mais dans l’immédiat, il a besoin d’un point de chute et de se fondre dans la population. Il donne 4 000 euros à sa cousine afin qu’elle lui achète deux costumes, deux paires de chaussures et des couvertures. Grâce à Mouss, son dealer, Hasna la paumée a trouvé un « petit » appartement à Saint-Denis « sans eau ni électricité ». Un squat qui « appartient » à Jawad Bendaoud, délinquant multirécidiviste en cheville avec Mouss, et que la jeune femme a visité un peu plus tôt dans la journée. C’est là qu’Abaaoud et son complice s’installeront avec armes et bagages.

Hasna confie à l’une de ses amies que dans cet appartement, elle a « joué avec la kalach ». Elle a également raconté que des voisins voulaient sympathiser avec les nouveaux « locataires », mais qu’ils ont été éconduits, car ces derniers « préparaient leurs bombes et ne voulaient pas être dérangés ».

Témoin en danger de mort

Un autre témoignage recueilli par l’intermédiaire du numéro vert mis en place par la police judiciaire laissait entendre qu’Abaaoud et son complice s’étaient rendus dans l’appartement de Saint-Denis équipés de ceintures d’explosifs. Des informations capitales pour préparer l’assaut du Raid, lancé deux jours plus tard contre la cache des terroristes, et qui expliquent sans doute la tactique de sursaturation de tirs employée par le corps d’élite de la police nationale.

Quelques jours après les attentats, Le Point était allé frapper à la porte du témoin décisif qui a permis la localisation, puis la mise hors d’état de nuire de l’organisateur du plus meurtrier des attentats – 130 morts, 600 blessés – commis en France. Aucune mesure de protection n’avait été mise en place sur les lieux par la police ni par la justice, alors que le parquet comme le cabinet du ministre de l’Intérieur décrivaient ce témoin en danger de mort, dissuadant les journalistes de l’approcher. C’est grâce à lui qu’Abaaoud a été neutralisé et non pas en raison du travail des services de renseignements.

Le Point.fr

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