UKRAINE – Tout était faux. Le journaliste russe Arkadi Babtchenko, annoncé mort mardi 29 mai à Kiev, est apparu ce mercredi face à la presse pour expliquer qu’il s’agissait d’une « opération spéciale » destinée à interpeller la ou les personne(s) prévoyant de le tuer. La police de Kiev a expliqué avoir mis en scène sa fausse mort pour déjouer un assassinat commandité par la Russie.

« Grâce à cette opération, nous avons réussi à déjouer une provocation cynique et à documenter les préparatifs de ce crime par les services spéciaux russes », a déclaré le chef des services ukrainiens de sécurité (SBU) Vassyl Grytsak, aux côtés du journaliste, précisant que cette « provocation » consistait à assassiner Arkadi Babtchenko.

L’apparition de Babtchenko en conférence de presse, visible dans la vidéo ci-dessus, a été accueillie par des applaudissements et des exclamations incrédules de ses confrères.

Un homme arrêté

La police de Kiev avait annoncé mardi au soir que l’homme avait été tué à son domicile de Kiev, où il s’était exilé. Il se disait menacé après avoir dénoncé le rôle de la Russie dans le conflit dans l’est de l’Ukraine. Quelques minutes avant l’annonce du subterfuge mercredi, Vassyl Grytsak accusait directement « les services spéciaux russes » d’avoir « commandité » le meurtre du journaliste, commis par un Ukrainien.

 

« Arkadi Babtchenko est en fait vivant, l’annonce de sa mort était en fait une opération spéciale pour attraper ceux qui voulaient le tuer, dit-il en conférence de presse. Wow. Seulement en Ukraine »

 

« La vidéo du moment où le journaliste russe Arkadi Babtchenko ‘revient d’entre les morts' »

Babchenko a indiqué que l’opération avait été préparée pendant deux mois, et qu’il avait été mis au courant il y a un mois. Il a remercié les services secrets ukrainiens et a tenu à s’excuser auprès de ses amis, de sa famille et de sa femme, évoquant « l’enfer » dans lequel il les a plongés après l’annonce de sa (fausse) mort. « J’ai enterré plusieurs amis et collègues et je connais ce sentiment écoeurant. Je suis désolé que vous ayez eu à le vivre, mais nous n’avions pas d’autre choix », a-t-il dit.

 

 

« SA FEMME NE SAVAIT MÊME PAS QU’IL ÉTAIT TOUJOURS VIVANT!!! Il s’est excusé. »

Les forces de sécurité ukrainiennes ont cependant assuré que sa famille était au courant de l’opération.

Lors de cette conférence de presse surréaliste, les services secrets de Kiev ont aussi annoncé l’arrestation d’un homme soupçonné d’être « l’organisateur » de la tentative d’assassinat du journaliste. Ils ont diffusé une vidéo de cette arrestation. « Nous avons interpellé l’organisateur de ce crime il y a trois heures à Kiev », a déclaré Vassyl Grytsak, selon lequel cet homme avait reçu 40.000 dollars de la part des « services spéciaux russes » pour préparer l’assassinat du journaliste.

 

 

Moscou parlait de « provocation »

Le secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), Christophe Deloire, a condamné mercredi auprès de l’AFP une simulation « navrante ». Si la réapparition du journaliste est « un grand soulagement », « il est navrant et regrettable que les services ukrainiens aient joué avec la vérité, que qu’en soit le motif », a-t-il dit.

L’annonce de la mort d’Arkadi Babtchenko a provoqué un choc dans la profession en Russie, en Ukraine et partout dans le monde. Le 20 juillet 2016, son collègue, le journaliste russo-bélarusse Pavel Cheremet, contestant la politique du gouvernement russe et habitant dans la capitale ukrainienne, avait péri dans l’explosion de la bombe placée sous la voiture qu’il conduisait en plein centre de Kiev. L’affaire n’est toujours pas élucidée.

Dès l’annonce de la mort de Babtchenko, le Premier ministre ukrainien Volodymyr Groïsman a aussitôt mis en cause « la machine totalitaire russe », déclenchant des démentis de Moscou. Le directeur des services de sécurité russes (FSB), Alexandre Bortnikov, avait qualifié les accusations ukrainiennes d' »absurdité » et de « provocation ». Le Kremlin a « fermement condamné » le meurtre et dit « espérer une véritable enquête ». L’Union européenne avait appelé à une « enquête rapide et transparente » pour en punir les responsables.

Ancien soldat russe devenu reporter de guerre, Arkadi Babtchenko a participé en Russie aux deux guerres en Tchétchénie en tant que militaire avant de devenir un journaliste extrêmement critique vis-à-vis du Kremlin. Il avait raconté les guerres dans cette république russe du Caucase dans un livre édité en France par Gallimard sous le nom de La couleur de la guerre. Arkadi Babtchenko a fait des reportages dans l’est de l’Ukraine, où le conflit entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses a fait plus de 10.000 morts en quatre ans.

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