En 2012 le Consistoire a tenu un Congrès des Communautés juives de France qui a connu une forte audience probablement due à la curiosité d’une part et à une intime conviction de voir abordé les nombreux problèmes sociétaux rencontrés tous les jours, d’autre part.. Mais la plupart des visiteurs ont été déçus, car là où ils attendaient des ébauches de réformes ou au moins des diagnostics objectifs sur la situation du judaïsme, ils n’ont trouvé que les thèmes habituels qui agitent les cénacles juifs, car les « sujets qui fâchent « ont été soigneusement évités.

Un rapport de synthèse préconisant des recommandations et à diffusion strictement interne, été établi dressant un bilan flatteur de l’événement .

Nous sommes bien placés pour affirmer qu’aucune discussion interne , en Conseil ou en Bureau , n’a eu lieu entre les élus pour décider des aménagements à apporter et des éventuelles réformes à conduire pour les années à venir. Impossible donc de dresser un réel bilan de cette manifestation ni d’apprécier son impact , en l’absence de mise en place de réformes.

On peut s’interroger honnêtement sur l’intérêt de rééditer si vite une 2ème manifestation, alors qu’on n’a tiré aucun enseignement valable de la 1ère .

Etait-ce si urgent de refaire un congrès, qui plus est , en année électorale, ce qui ne peut manquer de susciter maintes interrogations sur l’objectif non avoué de cette opération ?

Le contexte économique ambiant, la diminution des offrandes dans les synagogues due aux difficultés croissantes de nombreux coreligionnaires, l’accroissement du nombre de personnes défavorisées, tout cela autorise-t-il à engager de telles dépenses, de surcroit au Palais des Congrès de Paris, dont on connait le niveau des prix pour les locations ?

Dans les synagogues, les fidèles se demandent si c’est là l’usage qui est fait de leurs dons .

Pour eux, l’argent récolté lors des appels en faveur du Consistoire doit servir avant tout à régler les déficits du Talmud Torah, à payer les salaires des rabbins des synagogues en difficulté, ou encore à payer les travaux de maintien ou de sécurité des sites communautaires , et non à financer des opérations de prestige , sans efficacité prouvée.

Même si on nous annonce que de généreux donateurs ( probablement des banques ou des organismes de tourisme !!) vont mettre la main à la poche, pour concrétiser leur contribution à cette manifestation, on peut là encore – quitte à nous répéter – insister sur le fait que cet argent aurait pu être plus valablement employé au service des fidèles !

Mais, oublions un instant ces considérations matérielles pour nous attacher au fond même de ce congrès et aux thématiques qui y seront traitées le 2 juin prochain .

Le programme annonce un ensemble d’ateliers traitant des sempiternels problèmes qui agitent le microcosme communautaire : la jeunesse ,l’antisémitisme, Israël, l’action sociale et les séances plénières aborderont tout ce qui tourne autour de l’identité juive, la liberté religieuse, la laïcité, thèmes surement intéressants mais qui laissent probablement nos coreligionnaires indifférents, tant ces sujets ont été maintes fois rabattus.

Sont-ils concernés par la présence des Présidents des communautés juives d’Allemagne et d’Autriche ?

Ce qui taraude réellement les juifs de France, ce sont des problèmes humains, souvent douloureux, auxquels le Consistoire n’est pas en mesure d’apporter une réponse.

Pour apporter une réelle contribution à cette manifestation et lui retirer son côté de « pure communication sans lendemain», il aurait fallu traiter des grands défis auxquels le judaïsme est confronté dans un monde en pleine mutation .

Nous en avons listé quelques-uns pour fournir une idée de ce qu’aurait pu être un nouveau congrès en 2014 ou en 2015, mûrement pensé et réfléchi pour être véritablement constructif, au lieu d’une manifestation bâtie à la va vite, pour des besoins électoraux.

En voici une liste non exhaustive :

• La crise du leadership communautaire et le renouvellement des cadres communautaires

• Comment motiver des jeunes vers la gestion des communautés ?

• Le mariage pour tous , une souffrance aussi pour les familles juives

• Le divorce et ses cruelles conséquences pour les enfants et les familles recomposées

• Le problème déchirant des « agounot »

• La régularisation des enfants de mariages mixtes

• Le parcours du combattant des candidats à la conversion

• La désaffection de nos synagogues et la formation des rabbins à la modernité

• Comment expliquer le succès des mouvements «Loubavich» tout comme l’engouement pour les autres sensibilités religieuses, aussi bien les plus orthodoxes que les plus libérales au détriment du traditionalisme

• Vers une réelle démocratie dans la gestion communautaire par le biais du Parlement des Communautés, projet malheureusement avorté

• Quelle est l’efficacité réelle des multiples institutions juives qui se télescopent à longueur de temps ?

• La fonction du Grand Rabbin de Paris face à la crispation identitaire

• La revendication des femmes et leur place dans la Communauté religieuse

• La Bat mitsvah, une majorité religieuse aussi pour les filles et non une fête mineure

• Le nécessaire dialogue inter-religieux

• La politisation de la Communauté juive

Voilà, nous semble-t-il ,quelques-uns des défis actuels que nous devons affronter ensemble pour que nous vivions notre judaïsme de manière harmonieuse au sein de la Communauté nationale , grâce à un Consistoire davantage soucieux du bien – être des fidèles que d’une communication qui, en définitive, n’est que de la poudre aux yeux.

Janine RIVELINE Odonnatrice adjointe des dépenses Consistoire de Paris

André BENAYOUN Vice-Président Consistoire de Paris

Moïse COHEN Président d’Honneur Consistoire de Paris

TAGS : Consistoire Paris France Congrès Communauté Juive

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poid lourd

Bonjour, hier au palais des congrès de Paris cela avait lieu au troisième étage, j’y suis allé pour me faire ma propre opinion et aussi pour ne pas rester dans mon coin, après avoir écouter les intervenants de la table ronde à laquelle je m’était inscrit dont l’intitulé était: « djihadisme et antisémitisme » et pendant laquelle nous avons eu droit à notre clown de la journée se présentant comme le « Machiach » , je n’avais rien appris de plus que ce que je savais déjà, recevant mes informations par voie électronique je suis au courant de l’aggravation de la situation, ceux qui importent le conflit du moyen Orient sont hélas en train de marquer des points. Chaque membre de la communauté subi la crise entre précarité et baisse réelle du pouvoir d’achat et vous avez raison d’être mécontent que l’argent des dons soit « gaspillé ». En ces temps d’épreuves où il ne fait pas bon être juif dans certains quartiers la communauté ne doit pas se diviser. Cordialement.

david

Les congrès du consistoire ne nous concernent pas en effet. C’est pour ça qu’on n’y va plus. C’est bien de le souligner ! 🙂

C’est bien mais ce n’est pas suffisant. Je ne vois pas non plus l’intérêt de la plupart des thèmes que vous aimeriez voir abordés…

Prenons le cas d’un type normal, moi 🙂 En ma qualité de non pratiquant je m’inscris dans une fraction de… oh allez 90 % des juifs de Paris !

Non pratiquant donc non intéressé par les querelles de clochers, le recrutement des cadres communautaires, le mode de vie proposé par les loubavitch, la formation des rabbins à la modernité, le parlement des communautés…

Non marié donc non divorcé. Et donc non concerné par les problèmes des agounot, de l’après divorce et des familles recomposées.

Dans la liste de préoccupations que vous avez dressée, qu’est ce qu’il reste ? Qu’est ce qui là dedans peut intéresser l’énorme majorité de ceux qui vivent leur judaisme comme un « plus » et non comme une profession ?

Qu’est ce qui là dedans peut intéresser l’énorme fraction des célibataires ? Vous êtes vous déjà posé la question ? Je vous réponds : rien 🙂 Absolument rien ! D’ailleurs, comme il n’y a pas moyen de rencontrer une juive, on sort avec une non juive. C’est un problème ça non ? 🙂

Et les pratiques tarifaires chez les Juifs ? C’est pas un problème ? Tu veux aller faire du krav maga ? 600 euros l’année. De la boxe française ? 270 euros dans le même gymnase. Et attention, pour le krav, y a seulement 25 cours… Ah oui, y a les fêtes juives aussi ! 🙂

Prenons un autre exemple : les vacances. Deux semaines en Thailande, hotel 5 étoiles, 1200 euros. Deux semaines dans un bouiboui à Tel Aviv : 2200 euros.

Prenons un troisième exemple, quand on sort visiter le Louvre, écouter Adler, regarder un film, manger une pizza, participer à un speed dating avec la communauté juive, quand on entre dans une synagogue, ça coute 30 euros.

C’est peut être pour tout ça que la communauté se disloque ! Alors la crise du Parlement des Communautés et les crispations de cravates au consistoire… comment dire… 🙂