Le gouvernement israélien a décidé de doubler les impôts locaux sur les appartements inhabités, qui seraient au nombre de 46 500 dans le pays.

Tel-Aviv à la tombée de la nuit. Israël compterait près de 50 000 logements inoccupés la majeure partie du temps. © Jack Guez / AFP

C’était il y a trois ans à Mamila, un des quartiers les plus prestigieux de la Jérusalem juive d’aujourd’hui. Y vit, avec sa dame de compagnie, une richissime retraitée russe d’une soixantaine d’années. Trois hommes n’ont aucun mal à pénétrer dans l’immeuble : par l’interphone, ils s’identifient comme des agents de sécurité. Sous la menace d’une arme, ils ordonnent aux deux femmes de prendre quelques affaires pour un séjour prolongé. Ils confisquent leurs téléphones portables, les ordinateurs, volent bijoux et objets de grande valeur.

Peu de temps après, les kidnappeurs, que rien ni personne ne vient déranger, font monter leurs deux otages dans une camionnette et partent en direction d’une ville satellite de Tel-Aviv. Une opération rondement menée parce qu’elle a eu lieu à l’intérieur d’un complexe de grand luxe, où la plupart des logements sont vides. Leurs propriétaires, pour une grande partie des étrangers, ne viennent que pendant les fêtes juives ou pour quelques jours de vacances par an, et ne veulent pas louer leur bien. L’endroit s’est donc transformé en quartier fantôme, avec caméras de sécurité et un gardien à l’entrée. Pour les quelques résidents présents, les journées se déroulent le plus souvent sans qu’ils voient âme qui vive ! La police ne sera informée du kidnapping que par le gestionnaire de fortune de la victime. Il recevra par télécopie, dans son bureau au Luxembourg, une demande de rançon de 3,5 millions de dollars.

Jérusalem compte 10 000 appartements vides

Malgré une issue heureuse – au bout de quelques semaines d’enquête, les deux otages sont libérées et les ravisseurs arrêtés – l’affaire a mis en évidence une nouvelle réalité israélienne : celle des 46 500 logements vides que comptent les grandes villes du pays. Le plus souvent, ils ont été achetés à prix d’or par des étrangers, Français, Américains, Britanniques, Russes, au coeur des grandes villes du pays. Le record va à Jérusalem avec, à ce jour, 10 000 appartements vides la majeure partie de l’année. Pendant ce temps, étudiants, jeunes couples et familles modestes ne trouvent à se loger qu’en périphérie de la ville sainte, dans des cités-dortoirs situées de plus en plus loin de leur lieu d’activités. Face à cette réalité, le maire, Nir Barkat, a essayé, à plusieurs reprises, d’attendrir les propriétaires concernés en leur demandant, sur tous les tons et par courrier, de mettre en location les logements qu’ils n’occupent pas. La démarche est restée vaine.

Le ministre de l’Intérieur a donc décidé de prendre le taureau par les cornes. Il vient de publier un décret doublant le montant des impôts locaux sur les appartements inhabités neuf mois sur douze. Pour le maire, « cette décision est un outil important qui va mettre sur le marché des milliers d’appartements qui iront aux jeunes couples…, des jeunes qui sont l’oxygène de la ville et pour qui nous nous battons afin qu’ils puissent y vivre… » Hypocrisie ! répondent ses adversaires qui rendent Nir Barkat responsable de la transformation du centre de Jérusalem en paradis pour les riches. Et puis il y a ceux qui s’indignent. Comme ce directeur de l’immobilier au sein d’un grand cabinet d’avocats qui voit dans cette mesure une grave atteinte au droit à la propriété : « Le propriétaire d’un bien qui décide de ne pas l’utiliser, quelles que soient ses raisons, n’a pas à être puni ! »

Payer plus d’impôts, ou consommer plus d’eau !

Reste la grande question : ce décret va-t-il effectivement avoir des effets bénéfiques sur l’offre locative en provoquant par contrecoup une baisse des prix des loyers ? « Pas sûr », répondent les experts en immobilier. Car, pour eux, le phénomène des logements vides concerne surtout les habitations de luxe qui, si elles arrivent sur le marché locatif, ne seront pas à la portée de toutes les bourses. Pour en avoir le coeur net, le décret ne s’appliquera que pour deux ans, de 2014 à 2016. Ensuite, les fonctionnaires des différents ministères devront déterminer s’il a porté ses fruits ou non.

En attendant, les Français, qui sont nombreux à avoir investi dans des résidences de vacances à Jérusalem, Tel-Aviv, Netanya, etc., vont devoir choisir : payer deux fois plus d’impôts locaux, ou faire en sorte que les factures d’eau et d’électricité soient suffisamment importantes pour indiquer que le logement est occupé. C’est en effet par ce biais que les municipalités entendent contrôler si tel ou tel appartement est vraiment habité ou non. Un choix qui devrait concerner surtout les propriétaires de résidences plus modestes, pour qui cela pourrait représenter une charge supplémentaire non négligeable. Nul doute qu’ils vont devoir faire leurs calculs.

JÉRUSALEM, DANIÈLE KRIEGEL – Le Point.fr Article original

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LEON

Je pense que les municipalités ont une grande responsabilité dans ce manque de logements, elles auraient du négocier ( ou faire voter une loi) avec les promoteurs de la manière suivante:

En échange du permis de construire pour un programme destinés aux étrangers, les promoteurs se voient obligés de construire un certain nombre (un pourcentage par exemple) de logements à prix modérés destinés aux familles israéliennes en attente.
Ces promoteurs ne pouvaient pas refuser parce qu’ils n’auraient pas eu le choix d’une part et d’autre part ils participaient à une démarche citoyenne et juste.

meller1

ces appartements non habites sont une honte car a Tel-Aviv nos enfants payent une somme incroyable pour ce loger

DANIELLE

Ce grand bureau d’avocats qui annonce : « un propirétaire a le droit d’habiter ou non son appartement, ne peut pas être puni financièrement ».

Mais, cher Maître, nous sommes en Israël, dans le pays des Juifs ou des gens sans domicile fixe galèrent pour avoir un toit et vous trouvez normal qu’un propriétaire laisse vacant un appartement qu’il a acquis juste parce qu’il est riche ?

C’est immoral et inadmissible sur la Terre Sainte !