Il n’est pas indifférent de souligner que les Juifs ont été , pour reprendre le titre d’un ouvrage célèbre, qualifiés de « bâtisseurs du temps » .

Cette appellation n’est pas là uniquement pour signifier que le temps rythme la vie juive dans chacune de ses phases. Pour l’Ecclésiaste, il y a effectivement un temps pour chaque chose : il est un temps pour rire et un temps pour pleurer, un temps pour travailler, un temps pour étudier, et ainsi de suite..

Du reste, le premier chapitre de la Genèse montre bien que D . créa le temps avant toute chose .La vie n’est pas une suite incohérente de moments indistincts. Bien au contraire, le temps permet de ponctuer chaque instant de notre vie.

Au temps considéré comme profane succède le temps qualifié de
«sacré» : le temps de l’accomplissement des mizvot, le temps du Chabbat, le temps des fêtes, le temps du mariage, le temps du deuil. Le temps («zemane» en hébreu) balise de la sorte notre existence et lui donne la plénitude de son sens.

Supprimer la notion de temps équivaut à introduire une sorte de tohu -bohu dans notre vie où chacun de nous perdrait la boussole.

Partant de ce principe directeur, il est clair que le temps considéré comme une règle de précision nous impose pour chacun de nos actes et de nos gestes, le respect de la ponctualité, de la rectitude, de l’exactitude, de la minutie et de la rigueur.

En ce sens, cette philosophie du temps qui doit nous gouverner, nous conduit à la stricte observance de nos engagements dans tous les domaines, qu’il s’agisse de nos obligations religieuses ou tout simplement de nos promesses ou contrats dans la vie civile. Parce que le judaïsme instaure une hiérarchie de nos actes personnels dans le temps, il implique par là même, que toutes les époques, les périodes ne sont pas semblables.

Vous devez probablement vous demander la portée de cette introduction, dans le contexte actuel des élections du Consistoire de Paris.

En voici la raison : d’après les décisions véritablement surprenantes communiquées par la Commission Electorale de l’ACIP dans son procès-verbal du 28 octobre, il apparait que cette dernière a validé plusieurs candidats, qui n’ont pas effectué leur dépôt de candidature dans les temps et en remplissant une seule des formalités nécessaires et largement communiquées dans la presse juive.

Ces candidats n’ont donc pas respecté les règles de temps imparti pour leur dépôt de candidature. Valider ces candidatures arrivées, après l’échéance fixée et connue de tous, constituerait une grave entorse au règlement, quand bien même ces candidats auraient un mérite particulier.

Car faire une exception dans ces cas-là créerait une distorsion entre les candidats, qui ne seraient plus dès lors, placés en position égalitaire.

Imaginez que le Consistoire reçoive, après les délais officiels, deux candidatures célèbres, par exemple celles de Simone Veil et de Robert Badinter.

Faudrait-il, parce que nous serions flattés par de telles candidatures illustres, déroger à la règle ? Sûrement pas.

Faire des exceptions à la règle suscite à chaque fois des polémiques bien compréhensibles, mais comme je l’ai souligné dès le début de cet article, le Judaïsme lie de manière très forte, le fond et la forme, surtout en matière de temps et d’espace. Est-ce la même chose si nous allumons les bougies de Chabbat, quelques minutes avant ou après le début du Chabbat ?

Bien sûr que non : avant l’heure, nous sommes respectueux du Chabbat, après l’heure, nous le profanerions ! Pour préciser à quel point la date du paiement est aussi importante que le paiement lui-même, reportons nous à la Paracha Ki Tetse :

« Le jour même, tu lui donneras son salaire (au salarié) avant que le soleil ne se couche » ( Deutéronome XXIV-15 ).

Dans cette affaire, deux principes doivent l’emporter sur toute autre considération :

Celui de l’équité par rapport aux quelques 40 candidats qui ont acquitté leur participation à la date requise (« le jour même , avant que le soleil ne se couche » )

Celui de l’exemplarité : un dirigeant communautaire, et à plus forte raison celui qui préside aux destinées de deux institutions religieuses, doit montrer l’exemple en agissant dans le strict respect des statuts et règlements qui s’imposent à tous, sans exception.

Quelle que soit la valeur des candidats, ayant passé outre les délais, le fait qu’ils aient agi de la sorte les disqualifie et la Commission Electorale ne peut faire du repêchage, tout comme pour ce malheureux élève se présentant avec deux jours de retard aux épreuves du Bac. Il n’avait qu’à mieux lire sa convocation aux examens et… se préparer à se présenter à la prochaine session !

Moïse Cohen

Président d’Honneur du Consistoire de Paris

TAGS : consistoire ACIP Elections 2013 Temps Règles

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Rail

bien oui les règles sont les mêmes pour tous , c’est logique et c’est du bon sens !