Dominique Strauss-Kahn président aurait-il fait mieux que Hollande? Sa crédibilité, son expertise lui auraient probablement valu un état de grâce.

Mais après? L’Express a imaginé les débuts du quinquennat.
Ce 15 mai 2012, Dominique Strauss-Kahn arrive en retard à Berlin. Le Falcon 7X présidentiel, frappé par la foudre, a dû rebrousser chemin. Un autre avion, un Falcon 900, l’a acheminé vers son premier rendez-vous officiel avec Angela Merkel.

Malgré l’incident, le nouvel élu affiche son habituelle décontraction. Il croit en sa bonne étoile, lui dont la maison fut la seule épargnée par le terrible tremblement de terre d’Agadir, le 29 février 1960.

Le coup de foudre avec la chancelière a bien eu lieu, quelques années plus tôt. Dès l’arrivée de DSK à la tête du FMI, en 2007, Angela Merkel fait confiance à ce Français qui parle sa langue et sait s’adapter à son langage.

Lui apprécie cette femme « pas très flamboyante, mais solide ». La visite du 15 mai est presque une formalité, une séance photo pour la presse, celle d’outre-Rhin en particulier, qui salue « le plus allemand des Français ».

Les choses sérieuses ont été négociées et annoncées pendant la campagne. Merkel veut que la France soit plus compétitive, moins dépensière, plus sérieuse? DSK promet, mais en même temps convainc la chancelière qu’il ne faut pas aller trop vite, que la réduction des déficits est peut-être économiquement justifiée, mais politiquement insupportable si elle se fait sur le dos des peuples, qu’il n’est pas obligatoire de parvenir à l’équilibre des finances publiques en 2017.

Pourtant, DSK n’a pas fait campagne contre le traité budgétaire européen, une exigence d’Angela Merkel pour que l’Allemagne prenne sa part au sauvetage de la zone euro.

Mais il en donne son interprétation, d’ailleurs fidèle à l’esprit et à la lettre du texte : il faut juger des déficits hors conjoncture et accepter qu’ils se réduisent moins vite que prévu si l’activité n’est pas au rendez-vous.

Et il fait progresser une idée maîtresse : la nécessité d’un ministre des Finances de la zone euro.

Moitié hausse des impôts, moitié baisse des dépenses

Voilà pour le moyen terme. Dans l’immédiat, le président de la République sait qu’il doit donner des gages : en ce printemps 2012, la zone euro n’est pas tirée d’affaire, la pression sur la France, très surveillée par les marchés financiers, est forte.

La réduction des déficits pour 2013 est impérative, mais elle sera dosée : moitié hausse des impôts, moitié baisse des dépenses.

Aussitôt élu, le chef de l’Etat lance le grand chantier des réformes : fonction publique, retraites, collectivités territoriales, administration de Bercy avec institution d’une retenue à la source, etc.


Avec Angela Merkel. Outre-Rhin, la presse salue le « plus allemand des Français ».
Bundesregierung/S. Kugler/AFP

Et il trace la perspective du quinquennat : les augmentations fiscales seront annulées au fur et à mesure du retour de la croissance et de la diminution des déficits. « Il faut faire partir tous les trains en même temps », dit-on à l’Elysée.

L’été sourit au chef de gare. DSK joue habilement de ses atouts : expertise, force de conviction, confiance en lui. Le Figaro pointe « les fanfaronnades du président », mais Le Monde titre : « La crédibilité de M. Strauss-Kahn convainc les Allemands et Bruxelles. »

Se sachant attendu au tournant, le couple présidentiel vend son superbe ryad de Marrakech et verse le produit de l’opération à la Fondation de France. La droite hurle à la démagogie, mais l’opinion approuve.

Les vacances se limitent à un séjour d’une semaine sur les plages de Berck. « Ici, l’air est vivifiant et me permet de bien préparer la rentrée », affirme Dominique Strauss-Kahn au quotidien régional L’Express du Pas-de-Calais.

Partage des richesses: rectifier le tir

A Matignon, Laurent Fabius retrouve son bureau, vingt-huit ans après. Martine Aubry n’a pas voulu du poste : « Tu comprends, a-t-elle dit à Dominique, je veux me consacrer à Lille, à la culture, à ma famille. »

Ce sera donc le retour de l’ex-« plus jeune Premier ministre ».

« Fabius s’intéresse au comment, moi au pourquoi, mais il est costaud », commente le président en privé. Juste avant les vacances, Matignon lance la grande conférence sociale promise par DSK, sur le thème : « Comment partager les richesses? »

A l’Elysée, les proches du président déroulent l’argumentaire : le partage de la valeur ajoutée s’est déformé au détriment des salariés et de l’investissement, au profit des actionnaires, il faut donc se donner les moyens de corriger le tir.

Depuis Berck, le président annonce ses intentions en matière d’Europe de l’industrie, son sujet de prédilection : en octobre, il rencontrera Angela Merkel et David Cameron pour un sommet à trois. Avec les Allemands et les Britanniques, il veut construire un grand Meccano industriel en mettant tout sur la table : aéronautique, énergie, santé, etc.

Il faut accepter la réalité, martèle-t-il, l’Europe n’est plus qu’une grande puissance moyenne, car des pays émergents ont pris le relais, mais ce n’est pas grave, tant que nous sommes capables de faire émerger des groupes de taille internationale.

Premier couac: un dîner à 6 000 euros

A Bercy, François Hollande, le ministre de l’Economie et des Finances, travaille sur le budget 2013. Tout sauf une partie de plaisir : le président lui demande de minimiser les hausses d’impôts, mais Hollande ne peut pas faire de miracles et l’addition sera douloureuse…

Pour la faire passer, Arnaud Montebourg, ministre de l’Education, prépare la contre-offensive. Dans un premier temps, le président a songé à lui offrir Bercy, au nom de cette théorie du cornichon qu’il affectionne : tout corps plongé dans un bocal de cornichons devient un cornichon au bout de trois semaines.

Montebourg serait ainsi devenu aussi orthodoxe que ces hauts fonctionnaires de Bercy qu’il fustige.

Un peu risqué, quand même, et DSK a préféré faire de Montebourg le héraut de son socialisme de l’émancipation : il faut traquer les inégalités là où elles se forment, dès le plus jeune âge, pense le président.

La stratégie de diversion réussit : faut-il que les enfants aillent à l’école dès 2 ans, faut-il des classes de 15 élèves dans toutes les zones difficiles ? Le débat fait rage et la potion Hollande passe (presque) inaperçue.

Le 24 septembre, le président part à New York pour l’assemblée générale des Nations unies, encore auréolé de cet état de grâce dont les gouvernants français semblent privés depuis des années.

Derniers moments de sérénité… Le 28 septembre, Le Parisien révèle : « Le dîner à 6000 euros du président ». L’article rapporte qu’à l’issue des réunions de New York DSK a invité son équipe à dîner dans un très célèbre et très coûteux restaurant. Pâtes aux truffes pour tout le monde ! L’Elysée ne dément pas.

Quelques jours plus tard, lors de la première réunion de travail sur le partage des richesses, la CFDT claque la porte : « On nous a bernés, tonne Laurent Berger, son secrétaire général, il n’y a rien à partager ! »

Venant d’un syndicat réputé réformateur, l’affaire fait grand bruit. Et donne des idées à la presse… Sur le thème : la magie DSK ne prend plus, nombre de papiers paraissent.

L’automne est pluvieux, l’hiver s’annonce rude : le 4 décembre, Dominique Strauss-Kahn, au travail dans son bureau présidentiel, savoure une tartelette au citron. Ce pâtissier de l’Elysée, quel génie !

Il reçoit le SMS d’un ami avocat : « Mediapart sort un truc terrible sur Cahuzac : il a un compte en Suisse.

L’enquête a l’air très bordée. » Le président soupire de rage contre son ministre du Budget et lâche : « Quel âne! »

Mode d’emploi

– Les grandes lignes de la politique qu’aurait menée Dominique Strauss-Kahn sont inspirées par ses prises de position publiques et par le témoignage de certains de ses proches, associés à sa précampagne.

– La chronologie et la composition de son gouvernement sont imaginées par L’Express dans un souci de vraisemblance.

– Certains éléments sont puisés dans la réalité (l’avion de François Hollande a été frappé par la foudre) ou en sont détournés, comme le dîner de pâtes aux truffes.

L’Express.fr Article original

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