On pouvait s’y attendre : grand tollé de combat de l’Occident contre la volonté de la Knesset de renforcer le caractère juif de l’Etat d’Israël, et, de là, soupçonner qu’Israël déroge à son caractère démocratique, ce que semble suggérer les propos du Département d’Etat américain qui a déclaré lundi soir qu’il attendait d’Israël qu’il reste fidèle à « ses principes démocratiques » .

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Faux problèmes

Et en quoi Israël n’y serait plus fidèle ? Parce que, nous dit-on, si l’Etat est Juif, les Arabes ne seraient pas égaux. Réponse : si un Arabe israélien a exactement les mêmes droits qu’un Juif israélien, la démocratie est évidemment totale ! Qu’importe que l’un soit Juif et l’autre Arabe s’ils ont les mêmes droits ? Un Français arabe n’a-t-il pas les mêmes droits qu’un Français chrétien ? Un Américain noir et un Américain blanc n’ont-ils pas les mêmes droits ?

En réalité, on tente ainsi d’imposer l’idée qu’en Israël il y aurait deux peuples : un peuple juif et un peuple palestinien.

Et c’est là qu’il faut parler clairement. S’il y a deux peuples, alors les Arabes palestiniens seraient une minorité nationale. L’idée de minorité nationale est parfaitement compatible avec la démocratie, la preuve en est que la Constitution européenne le prévoit et l’applique !

Dans ce cas, il faudrait modifier les lois israéliennes pour y introduire un correctif sur les minorités nationales. Il y aurait aussi des Druzes, des Bédouins, des Ethiopiens, des Arabes, etc.

Mais les lois israéliennes ne sont pas dans ce cas de figure. En effet, toutes ces minorités sont civilement et pleinement des citoyens israéliens. Personne ne peut le contester. En vérité, ce n’est pas Israël qui discrimine les Arabes palestiniens puisqu’ils sont pleinement citoyens. Ce sont bien les Arabes qui se discriminent eux-mêmes en se définissant comme Palestiniens . Dans ce cas, il faudrait les définir comme une minorité nationale et il faudrait changer la loi israélienne.

Or, il est très clair qu’une grande partie des Arabes d’Israël veut rester israélienne et bénéficier pleinement de ce statut. Ils refusent toute citoyenneté palestino-cisjordanienne ou palestino-gazaouie.

Ceux qui voudraient un jour avoir la citoyenneté palestinienne ne pourraient vivre en Israël que comme résidents privilégiés et devront respecter les lois israéliennes ou aller vivre dans la future Palestine.

Mais, inversement, si demain l’Etat de Palestine était reconnu par Israël, il pourrait y avoir des Israéliens résidents privilégiés en Palestine ou des Juifs de citoyenneté palestinienne.

Rappelons cependant, non sans ironie, que Abbas a déclaré qu’il veut une Palestine judenrein ! Il faudra alors que nous aussi exigions un Israël arabrein ! On mesure bien ainsi à quel point notre vision démocratique est loin de celle des Palestiniens du Fatah, sans parler des Palestiniens de Gaza !

Ainsi donc, il est absolument faux qu’Israël, Etat du peuple juif, ne serait plus tout à fait démocratique.

Le vrai problème

En revanche il y a un vrai problème et c’est ce que cette nouvelle loi veut résoudre.

C’est que l’opinion publique occidentale, et hélas, nombre de politiciens passablement ignorants, sont persuadés que le critère fondamental de la démocratie est la règle de la majorité la moitié plus un : c’est une grossière erreur. Hitler et Mussolini détenaient une incontestable très large majorité dans leur pays. C’était aussi le cas de Khomeiny. Ces régimes ne sont en rien des régimes démocratiques parce que la démocratie se manifeste par la majorité ET l’adoption de règles et de valeurs qui sont le socle de la démocratie . Quand il y a parti unique, quand la minorité ne dispose pas des libertés, quand seule la propagande est diffusée et l’opposition muselée, quand elle est opprimée etc. le régime n’est nullement démocratique.

C’est pour cela que dans la majorité des cas, il y a un préambule avant l’énoncé de la Constitution. En France, il y a en préambule la déclaration des droits de l’homme, dans l’Europe, il y a un préambule et un exposé des principes etc.

Or les lois fondamentales de l’Etat d’Israël ne sont pas assez explicites dans leur préambule. Exemple : une simple majorité pourrait décider que la circoncision est interdite, ce que certains veulent ajouter dans la Constitution européenne. Ou encore voter une loi abolissant le samedi chômé, ou l’interdiction de l’abattage par jugulation, ou l’interdiction d’un carré juif dans les cimetières etc. etc. Il est évident que ces dispositions, seraient-elles majoritaires, sont incompatibles avec les valeurs fondamentales du peuple juif. C’est pourquoi il est indispensable et impératif de compléter le préambule qui sert de socle aux lois israéliennes.

C’est pourquoi il est prévu que lorsque de nouvelles lois seront promulguées, elles ne pourront être validées si elles ne sont pas compatibles avec les valeurs et l’histoire du peuple juif.

Enfin et surtout,

Détail capital : « Etat-nation du peuple juif » est la bonne formulation car le même mot, « juif », désigne le peuple juif et la religion juive tandis que « Arabe » désigne un peuple (il y a 10% d’Arabes chrétiens !) et « musulman», la religion. Cette confusion est à l’origine de nombre de malentendus. La Nation juive est née avec Jacob, la religion juive est née ave Moïse près de trois siècles après ! Un Juif qui ne croit pas en dieu et ne pratique pas reste un Juif : il fait partie de ce peuple. Une personne qui croirait en dieu et pratiquerait la halakha ne sera en rien un Juif.

Il n’y a absolument pas exclusion ni apartheid des musulmans ou des chrétiens. L’Etat-nation juif n’est donc pas confessionnel.

Il est consternant de voir des analystes, des journalistes, et même des juristes, complètement déformés par la maladie politicienne qui consiste à ne voir dans la politique qu’un combat entre factions où hommes agissant au nom de leurs intérêts : ainsi, Nahum Barnéa, célèbre journaliste du Yediot Aharonot, prétend que le but de Natanyahu est politicien : gagner sur les deux tableaux avec cette loi soit pour faire pencher la coalition à droite pour la maintenir, soit grignoter des voix à ses adversaires lors d’élections anticipées si sa coalition fait naufrage. C’est voir le monde à travers le petit bout de la lorgnette. Et quand Tzippi Livni ou Yossi Lapid critiquent cette loi, ils font exactement de même. ■

par Nessim Robert Cohen-Tanugi

Le Lien Israël-Diaspora : Lettre du 26/11/14

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Richard

Cher André, vous oubliez « God save the Queen »….

Ruth

En plus du déni et du mépris historique, s’ajoutent maintenant un mépris sur la connaissance des valeurs suprêmes de l’Etat d’ISRAEL. Ce principe avait été clairement mentionné dans la déclaration de 1947. Aujourd’hui, il est simplement de nouveau repris à part entière! La démocratie israélienne a toujours fonctionné sur ce pilier dont désormais elle prend enfin la mesure!
Il était plus que temps!

André

Il est parfaitement exact de faire remarquer comme le fait l’auteur que le judaïsme n’est pas seulement une religion mais aussi un peuple, une nation. Et ça n’a rien de racial puisque l’on peut se convertir et rejoindre ainsi le peuple juif, même si ça peut être aussi héréditaire (mais cela est valable pour tous les juifs qu’ils soient blancs, noirs ou jaune).
Bref, c’est une singularité certes, mais c’est comme ça et c’est réel.

Alors pourquoi les occidentaux et spécialement les européens refusent de l’accepter ? {{parce qu’ils se veulent les seuls dépositaires du fait national comme inventeurs du concept et de son application. Les seuls aptes à définir et donc à décider qui est une nation et qui ne l’est pas…}}

André

{Ce sont bien les Arabes qui se discriminent eux-mêmes en se définissant comme Palestiniens . Dans ce cas, il faudrait les définir comme une minorité nationale et il faudrait changer la loi israélienne.}
En fait les « palestiniens » se définissent eux-même non pas de nationalité palestinienne mais arabe.

Artice 1 de la « constitution » de l’OLP et de l’Autorité Palestinienne, du 7 juillet 2002 :

– La Palestine fait partie du monde arabe et{{ le peuple palestinien fait partie de la nation arabe.}} L’unité arabe est un objectif que le peuple palestinien s’efforce de réaliser.

André

{On pouvait s’y attendre : grand tollé de combat de l’Occident contre la volonté de la Knesset de renforcer le caractère juif de l’Etat d’Israël, et, de là, soupçonner qu’Israël déroge à son caractère démocratique, ce que semble suggérer les propos du Département d’Etat américain qui a déclaré lundi soir qu’il attendait d’Israël qu’il reste fidèle à « ses principes démocratiques »} .
Et c’est le gouvernement d’un pays, démocratique, dont le président jure sur une Bible le jour de son investiture qui vous le dit !

Richard

Il y a aussi une volonté perversive de vouloir réduire le peuple d’Israël à une seule « religion », quand on sait ce que les guerres de certaines religions ont fait et font encore comme dégât. L’heure est à son comble pour tenter de réduire Israël (Daesh oblige…..) à, si ce n’est avec peu de succès a un état facsiste, à une théocratie religieuse du genre Iran. Iran qui soit dit en passant à réussit à gagner les 2 titres! Quoi de plus surprenant quand on sait qu’elle était la position du grand Mufti pendant la 2ème guerre mondiale. Quelques soient les motivations de toutes ces tentatives d’accabler Israël, ne font qu’attiser les flammes et jeter de l’huile sur le feu. Mais elle discrédite complètement l’Europe et l’Occident dans le monde arabo-musulman. Elles discréditent les peuples occidentaux dans leur propres définitions et les retours de manivelles risquent d’être bien plus violentes que ce que l’on veut bien croire.