Tous les spécialistes se posent cette question et leur réponse est majoritairement la suivante : en principe, il ne se passera rien avant le 12 mai car c’est ce jour là que le président Trump proclamera sa sortie de l’accord nucléaire avec l’Iran ou, ce qui est très improbable, son maintien des dispositions existantes.

Est ce que la décision du président US n’est pas déjà prise ? Toutes ces déclarations vont dans ce sens et l’écho qu’ont trouvé auprès de lui les révélations israéliennes nous renforcent dans cette opinion.

Il est évident que la décision du président Trump de déchirer cet accord (sic) va gravement affaiblir le pouvoir en place à Téhéran qui doit son élection à sa promesse, non encore tenue, de ramener la prospérité dans le pays, d’écarter toutes les sanctions et de permettre à l’Iran de reprendre sa place parmi les nations de la terre.

Le régime des Mollahs a dû stopper net ses activités en matière de nucléaire militaire ; les documents volés par le Mossad le prouvent. Mais ils ne prouvent pas que le régime iranien n’a pas tenu ses engagements…

Certes, le fait d’avoir stocké tous ces documents montre que les Mollahs n’ont procédé qu’à un repli temporaire, se laissant la possibilité de renouer avec leurs recherches passées à un moment propice. Par ailleurs, le programme de missiles balistiques ressemble, à s’y méprendre, à un contournement des essais interdits

Cet accord avec les nations occidentales, USA en tête, n’a pas que de partisans à Téhéran. Les gardiens de la révolution qui contrôlent à tous les niveaux l’appareil de l’Etat le vomissent et il y a lieu de croire qu’ils en profiteront pour chasser Hassan Rouhani et ses amis de leurs postes, si le président Trump venait à frapper l’accord de caducité.

Car, si cet accord était déclaré nul et non avenu, les sanctions, pas celles de l’ONU, mais celles des USA (encore plus redoutables) reprendraient. Aucun régime iranien ne pourrait y survivre et il est fort probable que cette fois ci, ce sont des centaines de milliers d’Iraniens qui descendraient dans les rues pour réclamer un changement de régime…

Et dans ce cas, ce serait le moment rêvé pour lancer une attaque qui forcera tous les Iraniens à soutenir un régime qui va se parer du costume de défenseur de la patrie en danger ou attaquée.

C’est justement ce scénario catastrophe que redoutent les Occidentaux car l’Iran n’est pas l’Irak, même si la parité militaire ou simplement technologique est loin d’être acquise par les Mollahs de Téhéran.

Leur armée de l’air est vétuste, la défense anti-aérienne tout juste rénovée grâce aux Russes, mais surtout leur situation économique est franchement mauvaise. On se souvient des récriminations de la population contre d’énormes sacrifices financiers au profit de la Syrie, du Yémen et de Gaza au lieu de laisser cet argent agir sur place et au profit du peuple.

Alors, comment réagirait un régime aux abois, attaqué de l’intérieur et de l’extérieur ? Violemment, sauf à perdre toute crédibilité aux yeux de ses partisans et surtout de ses adversaires.

Deux possibilités sont en concurrence : soit activer le Hezbollah qui s’en prendrait à Israël, à ses risques et périls car Tsahal les attend de pied ferme, soit par des attentats à l’étranger contre des cibles juives ou israéliennes.

N’oublions pas qu’en Orient le plus important est de ne pas perdre la face. Or, Israël a maintes fois frappé les Iraniens en Syrie, cela se produit au moins une ou deux fois par mois ; par ailleurs, l’exploit du Mossad qui a opéré au cœur même de Téhéran et qui, au nez et à la barbe des soi disant gardiens de la révolution, a pu, sans se presser, déménager plus d’une demi tonne de documents sans être inquiété…

Certains commentateurs disent même que le drone iranien bourré d’explosif, mais qui fut abattu dès sa pénétration dans l’espace aérien de l’Etat hébreu, se voulait une riposte à ce déménagement des services spéciaux israéliens…

Le fait que Benjamin Netanyahou se soit livré à ce show médiatique, et en anglais, s’il vous plaît, afin que nul n’en ignore l’existence, fut considéré à Téhéran comme une gifle en plein visage : l’Etat hébreu dont Téhéran pronostique la disparition depuis tant de temps, se permettait de ridiculiser ses tourmenteurs dans leur propre capitale..

Les plus attentifs parmi nous ont dû relever que dans un récent discours mettant en cause le régime iranien, le Premier Ministre israélien s’était laissé aller jusqu’à dire à ses persécuteurs : nous avons chez vous des yeux et des oreilles… C’est seulement après le show médiatique qu’on a réalisé à quoi il faisait allusion…

Une autre solution est elle possible ? Je veux dire autre chose que la confrontation armée… Oui, mais il faudrait d’autres interlocuteurs à Téhéran. Même désavoué par les urnes, le régime se maintiendra par la force. Il a tout à perdre. Il ne renoncera jamais à cet axe Téhéran-Damas-Bagdad qui lui permet d’exporter sa révolution et de semer la zizanie un peu partout dans la région.

Et pourtant, la Perse antique n’était pas l’ennemie du judaïsme antique. Il suffit de lire certains prophètes post-exiliques pour s’en convaincre. Alors, d’ici cet hypothétique retour à de meilleurs sentiments, appliquons cet adage du Vatican : Attendons et espérons.

Maurice-Ruben Hayoun

Le professeur Maurice-Ruben Hayoun, né en 1951 à Agadir, est un philosophe, spécialisé dans la philosophie juive, la philosophie allemande et judéo-allemande de Moïse Mendelssohn à Gershom Scholem, un exégète et un historien français. il est également Professeur à  l’université de Genève. Son dernier ouvrage: Emmanuel Lévinas (2018)

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