Espoir et grandes attentes

Le rassemblement organisé, samedi 17 janvier, à la mémoire de Yoav Hattab Za’l, fils du grand Rabbin de Tunis, a réuni environ 150 personnes dont plusieurs de ses amis et des membres de sa famille, devant la grande Synagogue de Tunis (Avenue de liberté).

Jeunes de différentes religions se sont également réunis pour condamner ensemble le terrorisme. «C’est lamentable, la mort de Yoav nous a causé beaucoup de peine», nous a affirmé Arij Boudief, étudiante de confession musulmane, âgée de 23 ans.

Pour sa part, Hanène Ben Choaib, musulmane d’origines juives, a également condamné les attentats produits à Porte de Vincennes, à Paris. «Nous sommes tous ici pour faire face à la menace terroriste. Le terrorisme ne fait pas de distinction», a affirmé l’étudiante à l’Ecole nationale d’architecture et d’urbanisme (ENAU).

Plusieurs sites d’information ont publié les témoignages d’acteurs associatifs condamnant le silence des autorités tunisiennes face à la mort de Yoav Hattab. Certains Tunisiens de confession juive avaient également exprimé leur étonnement quant à cette position, sur la toile. Par ailleurs, lors du rassemblement, les participants, notamment les journalistes, s’attendaient à ce que ces derniers critiquent les autorités. Chose qui n’a pas été faite.

 Une vingtaine d’étudiants portaient des T-shirts R.I.P Yoav Hattab et plusieurs autres, amis de son frère ainé Avishaï, portaient des T-shirts où était écrit Yoavi en nous (suite à ma proposition)! Juifs, Musulmans, Chrétiens et athées, Tunisiens et non Tunisiens se sont rassemblés pour rendre hommage à Yoav  Za’l et s’unir contre le terrorisme. Un seul point les a divisés au sujet de la position des autorités tunisiennes.

 Chaimae BOUAZZAOUI- Synagogue de Tunis

 Synagogue de Tunis – Chaïmae BOUAZZAOUI

 

Reconnaissance

Contacté par téléphone, un membre de la famille de Yoav Za’l, en Israël au moment du rassemblement, nous a affirmé que les autorités tunisiennes leur avaient présenté leurs condoléances. La famille était relativement consolée par la participation, quoique timide, des compatriotes au rassemblement pour rendre hommage à Yoav Za’l. «Je suis fier de cette solidarité. Tout le monde est là pour appeler de la coexistence. Cela m’a fait plaisir de voir des journalistes venir de Tunisie et d’ailleurs pour exprimer leur solidarité avant d’entamer leur couverture médiatique», a affirmé le cousin de Yoav, Mikael Rakkah, avant d’enchainer «même si les autorités n’ont pas assisté à l’événement, leurs représentants ont présenté leurs condoléances à la famille Hattab. Nous les remercions pour cela».

Juste avant la fin de Shabbat, certains Tunisiens se sont posé des questions sur l’envergure que pouvait prendre l’événement. Et les hypothèses furent confirmées. Le rassemblement a réuni environ 500 personnes au lieu de 4000 contrairement à ce qui fut dit sur la page Facebook «Je suis Yoav Hattab». Pour des raisons sécuritaires, personnelles ou d’autres, relatives à la polémique déclenchée autour de la personne de Yoav, certaines personnes n’étaient pas au rendez-vous. «Sur les réseaux sociaux, les gens voulaient juste créer la zizanie en disant que Yoav était soldat israélien, s’il l’avait été réellement, il aurait su comment manier l’arme et tuer le terroriste», a affirmé Joseph Crief, qui vit entre la Suisse et la Tunisie. De son coté, le britannique de confession chrétienne Chris Neil a levé une pancarte sur laquelle ont été écrits des mots en hébreu pour rendre hommage à Yoav. Je suis juif, je suis Yoav, insistait-il. «La discussion sur la mort de Yoav ne doit pas dévier. Elle ne doit pas être politisée pour être réduite au sujet Israël/Palestine», a affirmé Neil qui travaille pour des organisations culturelles en Tunisie depuis 8 mois. Les gens qui ne comprennent pas n’arriveront jamais à comprendre, vaut mieux un nombre réduit de personnes sincères que des milliers d’hypocrites.

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«La réunion est totalement privée. Elle est de ce fait apolitique. Et la présence des éléments du gouvernement politisera l’événement, mais leur présence n’aurait pas fait de mal», estime Crief, «l’enfant de Bourguiba» qui se dit satisfait de voir 300 juifs (d’après son estimation) entouré de plusieurs personnes dont les voilées ont été «les plus touchées».

Pour sa part, Daniel Rakkah qui assiste à l’événement en tant que Tunisien de confession juive se dit aussi très fier de la solidarité entre Juifs et Musulmans tunisiens. «A travers cet événement, j’ai pu voir l’étincelle de la démocratie tunisienne, c’est une surprise… je remercie les autorités tunisiennes, ils nous ont permis d’organiser l’événement. C’est déjà pas mal», a-t-il souligné souhaitant une prochaine réunion dans des conditions plus joyeuses.

 «Nous remercions les autorités tunisiennes d’avoir rendu hommage à Yoav. La présence de la sécurité nous a réconfortés et rassurés. Hamdullah !», s’est exclamé Eliav Cohen, ami du regretté.

 Cousin de Yoav

«Tout va bien», mais…

 Les Tunisiens de confession juive ont été globalement satisfaits. Mais d’autres participants se sont montrés septiques. «Pour la présence, ce n’était pas fameux; La foule se compose essentiellement de la famille, des amis et des journalistes. Personnellement je m’attendais à ce qu’il y ait plus de présence à l’image de l’événement qui fut organisé suite à l’enterrement de la chanteuse juive Hbiba Msika dans les années 30», a expliqué  Baltagi Kais, avocat et ami du grand Rabbin de Tunis, Battou Hattab, comparant les «fous de Yoav» à la foule de Chokri Belaid.

 «Les autorités tunisiennes ont été absentes et n’ont pas émis de communiqué», a-t-il déploré.

 «On n’a pas fait d’hommage officiel au compatriote. Pour cela, on a essayé de palier au vide parce qu’on aime Avishaï et Yoav. Nous avons parlé avec certains officiels et nous attendons encore leur réaction», a affirmé Olfa Laagili, militante dans la société civile, coorganisatrice de l’événement.

 Une grande émotion a été exprimée ce samedi après le shabbat devant la grande synagogue de Tunis. La tolérance n’a ni de nationalité ni d’idéologie. «Ce sont des êtres humains qui sont morts parce qu’ils sont juifs. C’est la haine qui les a tués et nous en sommes tous des victimes», s’est exclamé Yamina Thabet, présidente de l’Association tunisienne de soutien aux minorités (ATSM), condamnant le silence criard du gouvernement.

 Chaïmae BOUAZZAOUI – Journaliste marocaine

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