« Plaqué au sol, le kamikaze tentait d’actionner sa ceinture d’explosifs »

ATTENTAT DÉJOUÉ À HAMRA

Omar Assi, qui a fait partie des supporteurs du prédicateur radical sunnite Ahmad el-Assir, aurait rallié les rangs de Daech et reçu de la part de l’organisation État islamique l’ordre de se faire exploser.

Samedi soir, les services de renseignements de l’armée et des Forces de sécurité intérieure ont réussi à déjouer un attentat-suicide qui visait le café Costa à Hamra, après avoir surveillé le kamikaze présumé depuis son déplacement depuis sa ville natale, Saïda, jusqu’à Beyrouth. Une opération musclée qui a permis d’éviter le pire dans cette partie très fréquentée de Beyrouth.

L’auteur de l’attaque déjouée est un jeune Libanais originaire de Saïda, Omar Hassan Assi. Il portait sur lui sa carte d’identité au moment des faits. Un expert de l’armée, qui a examiné sa ceinture d’explosifs, a indiqué que celle-ci comportait une charge de 8 kilos ainsi que des billes de fer, dans le but d’occasionner le maximum de dégâts. Peu après l’arrestation de Assi, l’armée a mené samedi soir une perquisition dans l’immeuble où ce dernier vit avec sa famille dans le quartier de Charhabil, à Saïda, et arrêté ses deux frères, ainsi qu’une personne de la famille Boukhari et une autre de la famille Halabi. La chaîne LBCI rapporte que l’ordinateur et le téléphone portable de Assi ont été saisis.

Une source bien informée du déroulement de l’enquête a confié que Omar Assi a reçu une balle à l’épaule lors de son arrestation. Il a ensuite été transporté à l’hôpital de l’Université américaine de Beyrouth puis à l’hôpital militaire afin d’y être soigné. La source rapporte que Assi a avoué être membre de Daech, après avoir fait partie des supporteurs du prédicateur radical sunnite Ahmad el-Assir (arrêté en août 2015 pour avoir combattu l’armée à Abra en juin 2013).

Assi serait venu vendredi à Beyrouth, accompagné de deux personnes, à bord d’une voiture de type Nissan, afin de faire des repérages et avait trouvé que le café Costa était le plus fréquenté. Le jeune homme, qui avait caché la ceinture d’explosifs sous le siège de sa voiture, a passé la nuit du vendredi dans le camp palestinien de Bourj Brajneh. Le samedi soir, il a enfilé sa ceinture piégée et s’est rendu à Hamra, sans savoir qu’il était suivi par trois voitures des renseignements de l’armée et des FSI. Sept membres des services de sécurité attendaient également en civil sur le trottoir, alors que quatre membres des renseignements de l’armée étaient attablés à l’extérieur du café.

Assi a avoué ne pas penser qu’il pouvait être surveillé à ce point. Il a précisé avoir reçu l’ordre de se faire exploser par Daech, accompagné d’une fatwa émise par un cheikh de Aïn el-Héloué. Il a donné à l’armée les noms de ses amis membres de Daech à Saïda ainsi que les noms des deux personnes qui l’ont accompagné à Beyrouth et qui ont abandonné leur voiture et disparu à Bourj Brajneh.
Il convient par ailleurs de noter que l’armée a indiqué hier avoir trouvé une roquette de type RPG à Kobeyate, ainsi que plusieurs roquettes jetées au bord de l’autoroute menant vers la Békaa, au niveau de Bhamdoun.

« Le kamikaze a demandé l’heure à laquelle il y a le plus de monde »
Interviewés par L’Orient-Le Jour, des employés du café Costa racontent que le kamikaze s’était bel et bien installé à l’intérieur de l’établissement, après avoir acheté un café et un chocolat. « Le kamikaze a demandé à la serveuse qui tenait la caisse l’heure à laquelle il y avait le plus de monde dans l’établissement. Nous pensons qu’il voulait attendre que le café soit plein avant de se faire exploser. Puis il a reçu un appel téléphonique et il est sorti pour répondre. Lorsqu’il est rentré, les forces de sécurité se sont jetées sur lui et l’ont assommé avec leurs pistolets », explique Mohammad, un des gérants de l’établissement. Bondé en ce samedi soir, le Costa est situé à une dizaine de mètres du siège du ministère de l’Intérieur, ainsi que de celui de la Banque du Liban.

Raëd, manager au Costa, confie avoir remarqué « quatre hommes assis dehors, qui semblaient nerveux ». « On voyait qu’ils attendaient quelqu’un et j’ai pensé qu’ils cherchaient querelle. J’ai compris plus tard que ces hommes faisaient partie des services de renseignements. Lorsqu’ils ont plaqué le kamikaze au sol, ce dernier a quand même tenté d’actionner sa ceinture d’explosifs. J’ai entendu l’un des membres des SR crier « Attention à la ceinture » », confie Raëd. « Il y avait une quarantaine de personnes dans le café. Dès que les clients ont compris ce qui se passait, certains se sont réfugiés au sous-sol et d’autres ont réussi à s’échapper vers l’extérieur du café », ajoute-t-il.

Au lendemain de l’attaque déjouée, les habitués du Costa et les habitants de la région se sont rués vers le café, refusant de se laisser intimider. « Le café n’a pas désempli depuis le matin (dimanche). Les habitués nous ont appelés pour nous demander d’ouvrir », déclare Mohammad.
Attablé hier après-midi à la terrasse du Costa avec ses amis, Fawzi, la vingtaine, affirme être venu au café « pour montrer à ceux qui ont peur qu’il n’y a rien ». « Je salue le travail de l’armée dans le cadre de cette affaire, sinon ça aurait été un désastre. J’ai de plus en plus confiance dans les services de sécurité après cet attentat déjoué », confie-t-il. « Pourquoi le Hezbollah est-il toujours en Syrie ? Il dit qu’il y est pour protéger les Libanais, mais soit ce n’est pas vrai, soit il a échoué dans sa mission », souligne Fawzi.

Abdel Latif, qui possède plusieurs commerces à Hamra, parle d’un regain d’activité depuis que Michel Aoun a été élu chef de l’État. « On espère que cette tentative d’attentat ne va pas faire reculer la situation économique », dit-il. Mohammad, lui, est venu par curiosité et parce qu’il aime les « sensations fortes ». « Pourquoi a-t-on laissé le kamikaze entrer au café si on savait dès le départ qui il était, et pour quelles raisons avait-il sa carte d’identité sur lui ? » se demande le jeune homme, sceptique.

Hajjé Mona, originaire du Liban-Sud, a pris un café au Costa samedi dans l’après-midi. Elle est convaincue que Assi faisait du repérage à partir de l’établissement, mais qu’il comptait se faire exploser ailleurs. « Nous, les gens du Sud, ils disent que nous sommes des terroristes, mais regardez ce qui s’est passé ici-même », lance-t-elle.

Houria, originaire du Maroc, et Badih, son mari de nationalité syrienne, ont choisi de prendre un café au Costa hier après-midi, malgré la tentative d’attentat qui y a eu lieu la veille. Ils vivent en Turquie et sont arrivés d’Istanbul samedi soir. « Je n’ai pas peur de venir ici. Il y a plus de sécurité au Liban qu’à Istanbul », souligne Houria. « Si l’on doit mourir, cela va arriver, qu’on le veuille ou non », déclare de son côté Badih.

23/01/2017

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