Nos maîtres de mémoire bénie nous enseignent que les « malédictions » mentionnées dans la paracha ki tavo sont au nombre de 98 … Certes, au premier degré, elles contiennent de terribles prédictions, mais sur un autre plan, elles font allusion à de grandes bénédictions … Je rappellerai ici que 98 correspond à la valeur numérique que na’hem, qui signifie consoler.
Ainsi, au sein même de la profonde obscurité, se cache la lumière de notre propre délivrance, c’est-à-dire notre consolation future.
Voici l’un des versets, dont le sens littéral n’est guère réjouissant … : « Hachem fera s’attacher à toi la peste, jusqu’à ce qu’elle t’ait consumé de sur la terre où tu viens pour en prendre possession » (traduction littérale sefer dévarim, éditions Gallia).
Il est possible de lire ce verset de façon totalement différente … Voici comment :
Yadbèk H’ békha èt hadaver : H’ fera s’attacher à toi hadavar, la parole … Et de quelle manière ? Békha, en toi, c’est-à-dire par les 22 lettres, békha a la valeur numérique de 22. Ainsi, l’attachement de l’homme au Créateur passe par l’adhésion aux lettres de nos prières et de notre étude.
Car les lettres que nous prononçons possèdent une vitalité. De même que le Créateur nous a insufflé la vie, par un souffle qui vient « des profondeurs du divin », de même nous donnons la vie à ce qui sort de nos lèvres … C’est à l’homme qu’incombe la responsabilité d’utiliser le langage pour construire ou pour détruire … En retour nous recevons une certaine vitalité grâce aux paroles de sainteté que nous prononçons. A l’opposé, des paroles négatives nous affaiblissent et minent notre dynamisme. Soit l’homme choisit la construction : hadavar, la parole par excellence, c’est-à-dire la parole de sainteté, soit son contraire, exprimé explicitement dans le verset : hadaver : la peste …
Mais quelle est donc la finalité de cet attachement au Créateur à travers les lettres de notre prière et de notre étude ? La suite du verset nous le dit : ad caloto otkha meal haadama.
Le mot caloto est lié au terme cala comme dans le psaume 84, calta nafchi, mon âme désire … De plus, ce terme, pris dans le sens du verset signifie une destruction, un anéantissement …
En fait, ces deux significations se complètent : quand l’homme s’attache à D. de toutes les fibres de son être, il annule complètement son ego et sa conscience de lui-même. Comme la plupart des mauvais traits de caractère proviennent d’un ego trop marqué (je pense à l’orgueil, à la recherche des honneurs, à la flatterie, à l’hypocrisie, à la colère, la violence …), l’attachement sincère à D. à travers la langue sainte conduit l’homme à caloto otkha, c’est-à-dire à « ton propre anéantissement », autrement dit l’annulation de l’égo.
A partir de cette étape, l’homme transcende sa nature primaire. L’homme est Adam, avec une double nature, l’une qui le pousse à rechercher la spiritualité, l’élévation morale : il est adamé dans le sens de « je ressemblerai » à D.
Mais d’un autre côté, Adam possède aussi un côté adama, la terre dans sa fonction primitive, terrestre, physique et instinctive. L’Adam est tiraillé en permanence entre ces deux aspirations. Si je me dirige vers adama, c’est que j’abandonne mon côté adamé, et inversement. Le verset nous dit ici qu’une fois que l’homme a détruit son égo (kaloto otkha), alors : méal haadama : il s’élève au-dessus (méal) de son humaine condition, celle qui l’attirait vers l’instinct et la pulsion. Il devient plus ange et moins bête …
La fin du verset rappelle que l’homme a été précisément envoyé dans ce monde pour triompher de sa propre nature : acher ata va chama : où tu viens là-bas : il s’agit de l’âme qui est dirigée vers un certain corps dans lequel elle devra demeurer pendant la durée de sa vie terrestre … lérichta : pour en prendre possession : le monde a été créé pour celui qui domine son penchant et ainsi travailler ses midot afin de devenir meilleur.
Et le point de départ de tout cela ??? La force de la parole de sainteté !
Pour résumer (en suivant l’ordre précis des mots du verset) : C’est par la parole de sainteté (à travers les 22 lettres) que l’homme s’attache à D. : en multipliant beaucoup ces paroles : psaumes, étude de la torah, prières du rituel mais aussi prières personnelles, elles constituent une aide remarquable pour parvenir à détruire notre égo et s’élever au-dessus de notre condition : c’était bien pour cela que nous avons été envoyés dans ce monde : conquérir sa propre intériorité.
Un verset du prophète Osée dit : « Prenez avec vous des paroles et revenez à D.ieu ! » Et le midrach de dire : Je ne vous demande que des paroles !!! C’est dire l’importance de la parole sacrée …
Shmouel Darmon

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