La Turquie, membre de l’OTAN, a envoyé des centaines d’extrémistes d’extrême droite recrutés sous la bannière de « l’armée nationale syrienne » pour combattre en Syrie. Elle les a utilisés à la fois comme troupes de choc et comme chair à canon pour combattre principalement les forces kurdes le long de la frontière, mais depuis le début du cessez-le-feu la semaine dernière, ces unités se sont mises à piller des civils et à mutiler des cadavres, selon des vidéos publiées en ligne. Les États-Unis affirment que des violations des droits de l’homme pourraient se produire. Des activistes kurdes se demandent pourquoi l’OTAN se tient derrière des extrémistes religieux dont les déclarations semblent à peine différentes de celles de l’Etat islamique.

Les premières vidéos de jihadistes envoyées pour combattre les Kurdes sous la bannière de « groupes de rebelles syriens » ont été publiées dans la perspective de l’offensive turque du 9 octobre. Des vidéos ont montré des hommes agitant l’épée et scandant qu’il faut « tuer les kuffar » ou « infidèles », terminologie souvent utilisée par Daesh. Le 12 octobre, une vidéo montrant un groupe exécutant deux détenus kurdes au bord d’une route en Syrie est apparue. Selon certaines informations, il aurait eu lieu près de l’autoroute M4 en Syrie.

Un autre groupe de rebelles syriens soutenus par la Turquie a arrêté un convoi de voitures comprenant la chef du parti Futur de la Syrie, Hevrin Khalaf. Elle a été tirée de la voiture par les cheveux, a reçu des balles et son corps a été piétiné. Des membres d’Ahrar al-Sharqiya, l’un des nombreux groupes de l’ANS, ont été accusés de l’attaque. La vidéo montrait les voitures arrêtées et les séquelles sur son corps sans vie recouvert de terre, tandis que les djihadistes louaient Dieu de l’avoir aidé à assassiner une femme sans arme. Selon les premières informations, elle aurait été «lapidée à mort», mais l’autopsie a révélé qu’elle avait été frappée à la tête, à la jambe, «tirée par les ses cheveux, au point de lui décoller le cuir chevelu de la tête». Turquie , un « allié de l’OTAN », selon les Etats-Unis, a affirmé que le meurtre était une « neutralisation » de la femme, « une opération réussie« , selon le principal quotidien de droite du gouvernement fascho-islamiste turc, Yeni Safak.

Le 16 octobre, de nouveaux extrémistes ont été filmés dans un bus en train de chanter « mort aux infidèles » avant d’arriver en Syrie. Le 19 octobre, une autre vidéo aurait montré l’exécution de civils près du village de Suluk. Une vidéo du même jour montre une unité de combattants arabes soutenue par la Turquie qui dit qu’ils vont « décapiter » les infidèles qu’ils rencontrent. Les hommes, à la barbe courte et aux cheveux longs, disent « dans quelques heures, nous allons vous montrer la tête (décollée du corps). » Une vidéo qui circulait à cette époque montrait des hommes en treillis décapitant des personnes, mais on ne savait pas d’où ça venait. cela semblait être récent et se dérouler en Syrie. Cette vidéo était si graphique que les comptes des réseaux sociaux l’ont bloquée.

Une photo du 20 octobre montre des éléments de Jabha al-Shamiya à Tel Abyad, ainsi que des membres d’autres groupes tels que Liwa al-Salam, Faylaq al-Majd de la «Troisième Légion» qui peignent des graffitis sur des maisons appartenant à des Arméniens et à des chrétiens syriaques, en les revendiquant pour eux-mêmes, à l’instar de ce qu’a fait l’Etat islamique à Mossoul en juillet 2014. Une autre photo des mêmes jours montre des civils exécutés à Sere Kaniye et des membres du groupe de Sultan Murad posant avec les corps.

Le 21 octobre, une vidéo d’un groupe appelé Jaish Islam appelle ses membres à traiter les chrétiens comme des citoyens de seconde zone dans les régions conquises et à leur faire payer des impôts spéciaux conformément aux lois religieuses discriminatoires. Le 22 octobre, d’autres récits ont révélé qu’un homme avec une barbe et ses amis avaient célébré le meurtre de ce qu’ils appellent «des cadavres de porcs». Ils prétendent appartenir aux «moudjahidines de Faylaq al-Majd». Il désigne cadavre d’une femme et dit: «C’est l’une de vos putains que vous nous avez envoyée. Cette putain est sous nos pieds. »Une autre vidéo du même jour montre un membre d’Ahrar al-Sharqiya frapper un civil et l’appeler « cochon ».

Une vidéo du 24 octobre montre que davantage d’extrémistes soutenus par la Turquie crient et retiennent une femme prisonnière. Ils prétendent être des combattants du «régiment de Dar Izza» et prétendent que la femme est une «membre du PKK».

La tendance des vidéos émergentes tend à montrer des incidents et une rhétorique similaires. Les jeunes hommes chantent et dansent, célèbrent les meurtres et se vantent de vouloir assassiner des personnes qui ne sont pas membres de leur groupe religieux extrémiste. Ils semblent avoir été laissés en toute liberté de faire ce qu’ils veulent dans la zone que la Turquie appelle une «zone de sécurité» dans le nord de la Syrie, une zone autrefois pacifique, d’où des milliers de civils kurdes et arabes ont maintenant fui. Par exemple, une vidéo du 20 octobre montre des hommes en train de piller des magasins dans une communauté frontalière. Un jour plus tard, une vidéo montre un membre de l’armée nationale syrienne, le sigle coordinateur, qui dit aux hommes de ne pas piller les maisons, mais uniquement les bureaux des partis politiques.

Les diplomates américains ont refusé de dire s’il s’agissait de violations des droits de l’homme commises par l’allié américain de l’OTAN. L’OTAN a seulement appelé la Turquie à faire preuve de retenue.

Selon de nombreux militants kurdes, une armée soutenue par l’Occident aurait recours à des extrémistes, exprimant pour la plupart des points de vue semblables à ceux de Daesh, alors même que les gouvernements occidentaux avaient demandé aux FDS de continuer à se battre contre l’EI. Des législateurs américains tels que le sénateur Chris Van Hollen ont exprimé leur indignation en affirmant que «la Turquie et d’autres ont été autorisés à massacrer» les alliés kurdes de l’Amérique, selon une déclaration qu’il a faite le 23 octobre.

Le comportement des groupes soutenus par la Turquie et le refus de la Turquie de les maîtriser, de les surveiller ou même d’assumer la responsabilité de leurs actes semblent indiquer que ces groupes rebelles syriens ont été autorisés à faire ce qu’ils veulent du côté syrien de la frontière, transformer des villes pacifiques en centres de pillage alors que les hommes se glorifient en mutilant des cadavres et en qualifiant de « putes » les femmes et les hommes kurdes de « cochons ». Peu de choses séparent ces groupes des vidéos et de la rhétorique de l’Etat islamique, lorsqu’il contrôlait cette même région en 2014 avant sa reprsie par les SDF, seuls capables de vaincre ISIS dans l’est de la Syrie. La haine des femmes, la haine des non-musulmans et le fait d’appeler les minorités ethniques des «cochons», ainsi que des orgies de violence masculine et de mutilations de corps toxiques, sont toutes des qualités semblables à celles de Daesh.