Affaire des écoutes: condamné en appel, Nicolas Sarkozy se pourvoit en cassation

Par Stéphane Durand-Souffland

Nicolas Sarkozy, mercredi à la sortie du tribunal de Paris, après la confirmation de sa condamanation.

Nicolas Sarkozy, mercredi à la sortie du tribunal de Paris, après la confirmation de sa condamanation. Stephane Lemouton/Bestimage

L’ancien président de la République s’est vu infliger une peine de trois ans de prison, dont un ferme.

La cour d’appel de Paris a condamné, mercredi, Nicolas Sarkozy, Thierry Herzog et Gilbert Azibert dans l’affaire dite des écoutes «Bismuth». La formation de jugement présidée par Sophie Clément est allée au-delà des réquisitions du parquet général, infligeant aux trois prévenus une peine de trois ans de prison, dont un ferme, alors que le ministère public suggérait un sursis intégral. La partie ferme sera exécutée sous la forme d’une détention à domicile sous surveillance électronique.

L’ex-président de la République se voit au surplus infliger, comme l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert, trois ans de privation des droits civiques. Me Herzog, lui, est interdit d’exercer la profession d’avocat pendant la même durée. Les intéressés ayant immédiatement formé un pourvoi en cassation, l’exécution de la sentence est suspendue en attendant l’analyse de la juridiction suprême. Celle-ci ne se prononcera pas sur le fond mais sur la forme.

Pour la cour d’appel, les délits de corruption active et trafic d’influence sont constitués. L’arrêt valide le scénario selon lequel MM. Sarkozy et Herzog auraient missionné M. Azibert, ami du second en poste à la Cour de cassation, afin qu’il se renseigne sur l’avancée d’un pourvoi en marge de l’affaire Bettencourt – ou qu’il s’emploie à faire pencher la balance en faveur de M. Sarkozy. En échange de quoi, l’ancien chef de l’État, fort de ses relations, se serait engagé à donner un «coup de pouce» à sa nomination à un poste honorifique à Monaco.

«Certes, les actes entrepris n’ont pas eu la réussite escomptée», mais «cette affaire n’en demeure pas moins d’une gravité certaine en termes d’atteintes à nos institutions», relève la cour. Une simple intention suffisait à caractériser les délits visés : pour les juges, la volonté de contourner la loi est établie.

«Atteinte à la confiance»

Comme le tribunal, la cour fait litière des arguments de la défense. Était-il normal d’écouter la ligne «Bismuth», c’est-à-dire des conversations entre un client et son avocat ? Oui – la Cour de cassation avait validé ces opérations par un arrêt éphémère, en rupture totale avec sa propre jurisprudence rétablie trois mois plus tard dans un autre arrêt qui, aurait pu croire un béotien, s’appliquait au cas d’espèce. Était-il normal que le parquet national financier (PNF) mène secrètement une enquête préliminaire, saisissant au petit bonheur la chance les factures détaillées de dizaines d’avocats afin de confondre une taupe présumée (jamais identifiée) qui aurait prévenu les deux hommes de ce qu’ils étaient sur écoutes ? Aucun souci, là non plus. Les écoutes prouvent-elles l’existence d’une machination ? Assurément : «Elles sont parfaitement explicites, nonobstant des précautions oratoires», et «leur chronologie est calquée sur celle de la procédure judiciaire», lit-on dans la motivation de l’arrêt.

Un ancien président de la République a le devoir d’être un citoyen respectueux de la loi. Or, il a promis une gratification à un magistrat qui a servi son intérêt personnel

Il en résulte «une grave atteinte à la confiance» du public dans la justice, en laissant penser que sont possibles des «arrangements occultes pour satisfaire des intérêts privés». Faute d’autant plus grave pour un ancien président de la République qui, en échange de «certains avantages – mise à disposition de collaborateurs, appartement de fonction, frais de réception et de déplacement, siège de droit au Conseil constitutionnel», a plus que tout autre le «devoir d’être un citoyen respectueux de la loi. Or, il a promis une gratification à un magistrat qui a servi son intérêt personnel».

«Stupéfiante, inique et injuste»

M. Azibert, lui, a «jeté le discrédit sur une profession dont la mission est essentielle pour le bon fonctionnement de la démocratie, trahi la confiance de ses collègues(…)au service des intérêts d’un clan». Quant à Me Herzog, «avocat célèbre», il a «tout mis en œuvre» pour la commission de délits. «Loin de protéger son client, il a dressé un pont entre deux amitiés, au mépris de la justice.»

Immédiatement après la lecture de la motivation, accueillie dans un silence de plomb, Me Jacqueline Laffont, avocate de Nicolas Sarkozy, a dénoncé une décision « stupéfiante, inique et injuste».

D’autres échéances judiciaires attendent l’ex-chef de l’État. À l’automne, il doit comparaître en appel dans l’affaire Bygmalion (financement­ illégal de sa seconde campagne présidentielle), qui lui a valu en première instance une peine­ – également supérieure aux réquisitions du parquet – d’un an ferme sous la forme d’une assignation à domicile avec bracelet électronique­.

La semaine dernière, le PNF a requis son renvoi, en compagnie de treize autres personnalités, dans le cadre du dossier du «financement libyen» de ses deux campagnes pour l’Élysée. Les magistrats instructeurs n’ont pas encore rendu leur ordonnance.

Par Stéphane Durand-Souffland  www.lefigaro.fr

 

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Asher Cohen

Et dire que cet individu, quand il était président de la République, était censé garantir l’indépendance de la Justice et la moralité des institutions de ce pays, d’autant plus qu’il s’entourait de voyous, dont beaucoup sont déjà passés par la case prison. Quel grand niveau d’évaluation de l’importance de la morale ! Et en prime, il fait partie des ‘sages’, donneurs de leçons, du Conseil Constitutionnel. La France est clairement un pays de ratés, pervers et corrompus, destructeurs et lâches. Je me demande vraiment ce que les Juifs, sensés vénérer la Loi et la Justice à la synagogue, peuvent bien attendre de ce pays où les politicaillons se prennent pour Dieu, alors que le Monde ne manque pas de pays où les descendants des Judéens peuvent vivre en toute tranquillité.