Cette paracha Michpatim  suit celle intitulée « Yitro » qui contenait notamment l’exposé des dix Paroles du Décalogue.

De nombreux commentaires se sont attachés au cours des siècles à discerner leur logique interne et leur structure profonde.

Il n’en va pas de même pour les michpatim, pour les règles de droit positif qui correspondent également à des normes de comportements, à des règles de conduites compatibles avec l’existence et le développement d’un peuple libre.

On a tenté ailleurs (La traversée du désert, Fayard, 1988) de discerner également la logique d’exposition et la structure interne de cette série de michpatim qui donnent parfois l’impression d’un simple et fort long catalogue.

En réalité cette logique et cette structure sont à découvrir dés leur toute première séquence. Deux points, entre autres, attirent l’attention.

Le premier de ces michpatim concerne le sort réservé au travailleur ou au servant qui au bout de six années de son office refuse de recouvrer la condition et le statut juridique de l’être libre.

De ce refus, il doit désormais porter la marque. Pourquoi est-ce cette situation et son issue qui inaugurent cette paracha intensément juridique?

L’on peut estimer qu’il s’agit d’un principe vraiment essentiel. Comment assumer sa vie intersubjective et sa vie sociale si l’on refuse cette forme de liberté qui n’est pas une liberté « sauvage », comme diraient les psychanalystes, mais une liberté impliquant lucidité, capacité de jugement et finalement plein exercice de sa responsabilité? Tous les autres michpatim en découlent.

Mais il ne s’agit pas non plus d’une simple construction logique. Si la série des michpatim commence par celui là, c’est au regard des premiers pas, des premiers expériences des Bnei Israël comme peuple libéré physiquement de l’esclavage.

Bien des épisodes difficiles (Mara, les cailles, les émeutes contre Moïse et Aharon etc..) démontrent qu’il ne suffit pas de proclamer la liberté pour qu’elles devienne une donnée intime du jugement et du comportement.

L’esclavage ne se réduit pas à l’oppression des corps. Lorsqu’il dure trop longtemps et qu’il se proroge de génération en génération, il devient une véritable addiction, de laquelle il est difficile de se défaire et qui peut même se transformer en amour inavouable de la servitude.

C’est pourquoi il faut sans tarder y couper court. Telle semble être la première préoccupation de cette série de prescriptions, pour ainsi dire son Préambule, homologue à la première des dix Paroles.

L’autre concerne la primauté de la Loi qui interdit désormais le passage à l’acte, toutes les formes de violence, et bien sûr les coups et blessures, sans parler du meurtre (Ex, 21, 14).

Il ne faut plus se tromper sur la hiérarchie des normes qui doit prévaloir pour un peuple à la fois libre et responsable.

En cas de meurtre commis par préméditation, rien ne servirait de se réfugier au sein du Sanctuaire et de s’agripper à un coin de l’Autel.

Il appartient à présent aux instances légitimes de ce peuple, et notamment à ses juges dont il faut souligner qu’ils sont institués avant même le don de la Thora, d’en connaître.

Si l’homme est responsable devant Dieu, il l’est aussi, du fait même de la Parole divine, d’abord et avant tout devant la loi régissant ses rapports avec son prochain. Si le mot de révolution a jamais eu un sens, il trouve dans cette prescription l’un de ceux qui ne doivent plus s’effacer de la conscience humaine.

Raphaël Draï, zal, 11 fevrier 2013

 

 

 

 » Ouvre largement ta main à ton frère pauvre « 

« Si tu prêtes de l’argent à quelqu’un de mon peuple, – au pauvre qui vit avec toi – ne te conduis pas envers lui comme un créancier, n’exige point de lui des intérêts ». (Exode, 22, 24)

Parmi les très nombreux commandements contenues dans cette section, nous allons relever celle concernant le pauvre et nous pencher un peu sur son contenu.

Dieu nous demande de prêter de l’argent à celui qui est dans le besoin afin de lui permettre de retrouver son équilibre financier et de gagner convenablement sa vie dorénavant.

Notre aide ne doit pas avoir pour but d’assurer simplement la nourriture du pauvre au jour le jour, mais doit se fixer un objectif bien plus large et bien plus ambitieux, celui de relancer le malheureux dans le circuit du travail afin qu’il assure son existence par lui-même.

C’est la seule façon de remédier à son état d’une manière durable et d’éviter qu’il ne continue à tendre la main.

C’est la seule manière de lui faire retrouver par le travail sa dignité d’homme.

D’une manière passagère, bien entendu, il est de notre devoir de l’assister en attendant qu’il ait retrouvé son gagne-pain, de l’aider à vivre jusqu’à ce qu’il assure lui – même la subsistance des siens.

C’est ce que nous demande ce texte de la Torah (Deutéronome, 15, I I):  » Ouvre largement ta main à ton frère pauvre « .

Cette obligation envers les pauvres, il nous est facile de l’observer si nous pensons que si nous avons réussi dans la vie, nous le devons en grande partie à l’aide que Dieu nous a apportée.

Or, puisque Dieu nous a donné son soutien, puisqu’il a été si l’on peut dire, notre  » associé  » dans notre réussite, il a droit normalement à une partie de nos bénéfices.

Mais comme l’Éternel n’en a guère besoin, il nous demande de verser sa  » part  » à ses enfants qui sont dans la misère.

Ne pas le faire serait commettre une malhonnêteté : ce serait accaparer pour nous des richesses qui ne sont pas les nôtres.

N’oublions pas, par ailleurs, que la totalité des biens de ce monde appartient à l’ensemble des enfants de Dieu. Tous les frères que sont les êtres humains doivent également en profiter.

La part du pauvre se trouve provisoirement auprès de son frère plus aisé. Mais celui-ci n’en est pas le propriétaire pour autant; il n’en est que le dépositaire et le gérant qui a le devoir de la remettre au plus tôt à celui qui est dans le besoin.

A la Mémoire de Lucien Israël Bar Miriam CACOUB Z’l

www.lamed.fr

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