Les dessous des voyages d’Alexandre Benalla en Israël et en Afrique

 

Alexandre Benalla s’est notamment rendu au Tchad début décembre. © AFP

Philippe Hababou Solomon, employeur d’Alexandre Benalla à l’occasion d’une série de déplacements pour des activités de consulting, assure notamment que le ministère des Affaires étrangères a été informé à chaque fois que l’ancien garde du corps d’Emmanuel Macron a utilisé ses passeports diplomatiques.

Le parquet de Paris a ouvert samedi une enquête préliminaire pour « abus de confiance » visant Alexandre Benalla, soupçonné d’avoir utilisé deux passeports diplomatiques après avoir quitté son poste à l’Élysée suite à l’affaire du 1er-Mai.

L’ancien garde du corps a effectué ces derniers mois une série de voyages sur le continent africain, et notamment au Tchad, où il a pu rencontrer le président Idriss Déby, quelques jours seulement avant la visite d’Emmanuel Macron. Interrogé par L’Express, Philippe Hababou Solomon, l’homme qui a accompagné Alexandre Benalla au cours de ces différent déplacements, lève le voile sur les coulisses des allées et venues de l’ancien chargé de mission de l’Elysée.

Un travail d' »assistant ». Présenté par l’hebdomadaire comme « un vieux routier des sentiers africains », proche notamment des ex-présidents de Centrafrique François Bozizé et d’Afrique du sud Jacob Zuma, Philippe Hababou Solomon, 63 ans, explique avoir été présenté à l’ancien protégé d’Emmanuel Macron par « un ami commun ». Depuis son limogeage, Alexandre Benalla chercherait en effet à se reconvertir dans le consulting. « Je n’avais pas besoin de lui pour m’ouvrir des portes, mais plutôt d’un ‘assistant’ à qui je pouvais déléguer le suivi des affaires en cours, notamment dans un certain nombre de pays », explique cet homme d’affaire franco-israélien.

Deux tournées et des vacances aux Bahamas. Ensemble, les deux hommes auraient effectué deux tournées, à l’automne. La première, mi-novembre, en Turquie et en Israël, en compagnie d’une délégation indonésienne, pour parler cybersecurité. Et la seconde, début décembre, cette fois avec une délégation turque, sur le continent africain, au Cameroun, au Congo et au Tchad. « À N’Djamena, nous avons rencontré le président Idriss Déby et son frère, qui gère les approvisionnements en équipement militaire. L’objet des discussions, c’était le textile, les uniformes, l’électricité », détaille Philippe Hababou Solomon. Concernant ce dernier séjour, l’entourage d’Alexandre Benalla a pourtant nié, également dans les colonnes de L’Express, toute rencontre avec le frère du président tchadien.

L’équipée s’est achevée par trois jours de détente aux Bahamas : « Un séjour de tourisme en somme ; Alexandre a fait du jet-ski. Mais là, c’est moi qui ai payé la facture ».

« Personne n’a protesté quand Alexandre a utilisé ses passeports diplomatiques ». Concernant l’utilisation de passeports diplomatiques pendant ces différents déplacements,  Philippe Hababou Solomon, lui-même détenteur d’un passeport diplomatique de Guinée-Bissau, précise : « À chaque fois qu’un passeport de ce type passe une frontière, les autorités sont informées. L’information remonte directement au Quai d’Orsay. Personne n’a protesté quand Alexandre a utilisé ses passeports diplomatiques, en Israël comme en Afrique… »

Contacts élyséens. Par ailleurs, dans un courrier adressé à Patrick Strzoda, le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron qui lui a demandé de s’expliquer sur ses « missions personnelles et privées », Alexandre Benalla a concédé continuer à entretenir des « échanges réguliers » avec certains membres de la présidence. « Oui, il parle avec les jeunes qui sont en poste aux côtés d’Emmanuel Macron, ceux de sa génération », abonde Philippe Hababou Solomon, toujours auprès de L’Express. « Je crois aussi qu’Alexandre continue d’échanger des textos avec le président », glisse-t-il, tout en indiquant que le jeune homme ne s’est jamais targué, lors de ces différents déplacements, d’être en mission pour l’Elysée.

Des « petits rapports ». L’homme d’affaires laisse toutefois entendre qu’Alexandre Benalla pourrait bien jouer les ambassadeurs de l’ombre. « Alexandre faisait des petits rapports, après qu’untel nous a dit qu’il n’appréciait pas le ‘monsieur Afrique’ de l’Élysée, ou après qu’un autre nous a confié son incompréhension à propos du rôle de la France sur tel ou tel dossier. Je ne sais pas précisément à qui étaient destinés ces rapports », conclut-il.

, modifié à 

europe1.fr


Alexandre Benalla: les coulisses de ses voyages en Afrique

Alexandre Benalla, encore salarié de l'Elysée, le 16 juillet 2018 à Roissy.

Alexandre Benalla, encore salarié de l’Elysée, le 16 juillet 2018 à Roissy.

afp.com/Thomas SAMSON

L’homme avec qui l’ancien garde du corps de Macron s’est rendu au Tchad se confie. Interview.

A 63 ans, Philippe Hababou Solomon (photo ci-dessous, en compagne d’un élu japonais en octobre 2016) est un vieux routier des sentiers africains, des réseaux de la Françafrique, des affaires et des négociations discrètes. Il a été proche de Bernard Tapie, de l’ancien patron d’Elf Loïk Le Floch-Prigent, des ex-présidents de Centrafrique François Bozizé et d’Afrique du Sud Jacob Zuma, dont il est toujours le conseiller. Après avoir tourné la page de quelques soucis judiciaires, il fréquente désormais les allées du pouvoir et du business, au Qatar comme ailleurs.

En octobre 2018, alors qu’il est de passage à Paris, un « ami commun » lui présente Alexandre Benalla. Ils vont ensemble se rendre dans plusieurs capitales étrangères à la rencontre de potentats locaux. Interview.

L’EXPRESS : Le ministre des Affaires étrangères a saisi le parquet de Paris pour qu’il examine les conditions dans lesquelles Alexandre Benalla a utilisé des passeports diplomatiques après avoir quitté l’Elysée, alors que leur restitution lui avait été réclamée. Avez-vous vu l’ancien garde du corps d’Emmanuel Macron utiliser ces documents lorsque vous avez voyagé ensemble ?

Philippe Hababou Solomon : Tout cela est un faux débat. Quand on arrive dans un pays dont nous allons rencontrer les dirigeants, les services du protocole viennent nous chercher à l’aéroport et s’occupent de tout. Visa, pas visa, c’est pareil. Moi aussi j’ai un passeport diplomatique, de Guinée-Bissau. En tout cas, à chaque fois qu’un passeport de ce type passe une frontière, les autorités sont informées. L’information remonte directement au Quai d’Orsay. Personne n’a protesté quand Alexandre a utilisé ses passeports diplomatiques, en Israël comme en Afrique…

En Israël pour de la cybersécurité

Comment avez-vous rencontré l’ancien chef de cabinet adjoint d’Emmanuel Macron ?

Un ami commun nous a présentés. Alexandre Benalla se cherchait une nouvelle voie. Il présentait bien, c’est un garçon brillant. Je n’avais pas besoin de lui pour m’ouvrir des portes, mais plutôt d’un « assistant » à qui je pouvais déléguer le suivi des affaires en cours, notamment dans un certain nombre de pays. Mais il ne connaît rien au monde des affaires, c’est évident. Lors des réunions de business que nous avons pu avoir avec les uns ou les autres, il restait dans son coin, et ne disait pas un mot. Si on lui fiche la paix, il sera intéressant de travailler avec lui.

Quel a été le programme de vos tournées ?

Nous avons fait un premier voyage, à la mi-novembre, en Turquie et en Israël, avec une délégation d’Indonésie. Il s’agissait de cybersécurité : monter des académies cyber, afin de former les autorités locales sur le sujet. Je lui ai promis que si l’affaire se faisait avec les Indonésiens, il serait intéressé financièrement. La deuxième tournée, début décembre, c’était avec une délégation turque, les sociétés Sur International [filiale d’Istanbul d’une société basée au Soudan] et Barer Holding, une joint-venture entre le Qatar et la Turquie. Au Cameroun, nous avons rencontré le directeur de cabinet du président et le chef d’Etat-Major des armées pour des discussions sur une fourniture d’uniformes militaires notamment. Puis nous sommes allés au Congo et au Tchad. A N’Djamena, nous avons rencontré le président Idriss Déby et son frère, qui gère les approvisionnements en équipements militaires. L’objet des discussions, c’était le textile, les uniformes, l’électricité. Nous avons d’ailleurs décroché aussi un rendez-vous avec le ministre de l’Energie. A Brazzaville, avec le président Sassou, ce fut rapide, car les possibilités y sont réduites. La délégation turque a tout payé.

Jet-ski aux Bahamas, textos au président

Ce furent les seules visites que vous avez faites ensemble ?

Entre ces deux tournées, il était prévu que nous allions rencontrer le nouveau chef de l’Etat brésilien, Jair Bolsonaro, chez qui j’ai une introduction. Cela ne s’est pas fait. Nous avons donc passé trois jours aux Bahamas, un séjour de tourisme en somme ; Alexandre a fait du jet-ski. Mais là c’est moi qui ai payé la facture.

LIRE AUSSI >> Les réponses de Benalla sur l’affaire des passeports

Alexandre Benalla informait-il l’Elysée, selon vous, de ses visites chez des dirigeants étrangers ? Il vient d’écrire à la présidence en soulignant qu’il entretenait toujours des contacts avec certains de ses membres…

Oui, il parle avec les jeunes qui sont en poste aux côtés d’Emmanuel Macron, ceux de sa génération. Je crois aussi qu’Alexandre continue d’échanger des textos avec le président. Mais il n’a jamais été, quand il était à mes côtés, en mission pour l’Elysée, et ne s’est jamais présenté comme appartenant encore à l’Elysée. Par contre, quand nous avons eu des discussions d’ordre général avec des chefs d’Etat, je suis certain que la présidence en a toujours été informée. Alexandre faisait des petits rapports, après qu’untel nous a dit qu’il n’appréciait pas le « monsieur Afrique » de l’Elysée, ou après qu’un autre nous a confié son incompréhension à propos du rôle de la France sur tel ou tel dossier. Je ne sais pas précisément à qui étaient destinés ses rapports.

Alexandre Benalla vous a-t-il présenté son nouvel ami Alexandre Djouhri [mis en cause dans l’affaire du présumé financement libyen de Nicolas Sarkozy en 2007]?

Lorsqu’un jour nous déjeunions à Londres, Alexandre Djouhri nous a rejoints au café, c’est tout. Benalla est surtout ami de son fils. L’Elysée lui a dit un jour d’éviter de fréquenter Djouhri.

Par Laurent Léger, publié le , mis à jour à 

lexpress.fr

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Bonaparte

Ce n’est qu’une question de fric .

Tous les moyens sont bons et certains s’en mettent plein les poches .

Habibi

La barbouzerie aux « pieds qui puent » dans tous ses Etats !