« Lunel, c’est la ville de France la mieux représentée au sein de l’Etat islamique ! » Entre 2013 et 2014, la petite ville de Lunel, dans l’Hérault, a vu partir une vingtaine de ses jeunes pour le djihad en Syrie...

Un chiffre impressionnant pour une petite commune, qui s’explique par la présence d’une filière de recrutement très active. Cinq hommes sont jugés ce jeudi 5 avril à Paris dans ce dossier, mais la majorité des « djihadistes » de Lunel ne sont jamais rentrés.

Houssemedine, Alexandra, Raphaël, Abdelkarim… La plupart des protagonistes de cette histoire sont des fantômes. Quinze font toujours l’objet de mandats d’arrêt, présumés morts en Syrie pour au moins huit d’entre eux et toujours en vie là-bas pour les autres. Les premiers à partir avaient quitté Lunel en novembre 2013, puis les départs, entre amis ou en famille, s’étaient échelonnés jusqu’en décembre 2014.

Ces camarades nourris de propagande avaient d’abord rejoint le Jaysh Mohamed (« l’armée de Mahomet »), un groupe armé proche du Front Al-Nosra, alors allié à Al-Qaïda. Puis l’organisation Etat islamique (EI). Au total, une vingtaine de Lunellois s’étaient retrouvés en Syrie : l’une des vagues de départs les plus importantes de France, à l’échelle de cette commune de 26.000 habitants, minée par le chômage.

Un laboratoire du djihadisme

De quoi faire de ce groupe de Lunel – petite ville jusqu’alors davantage connue pour son muscat et ses manades – un laboratoire du djihadisme à la française. Agés de 29 à 47 ans, les cinq hommes jugés à partir de jeudi pour association de malfaiteurs terroriste par le tribunal correctionnel avaient été interpellés fin janvier 2015.

Seuls deux sont accusés d’être partis en Syrie : Adil Barki et Ali Abdoumi. Barki, 39 ans, n’avait passé que quelques semaines au Jaysh Mohamed, où il aurait été cantonné aux tâches ménagères en raison de violentes crises de panique. Abdoumi, qui à 47 ans fait figure d’ancien et se dit non musulman, a nié pendant l’enquête être parti en Syrie.

Les trois autres prévenus, Hamza Mosli, lui aussi détenu, et Jawad S. et Saad B., n’ont pas quitté Lunel. Mosli, dont deux frères ont été tués en Syrie, est considéré par l’accusation comme « un personnage central » dans le groupe, soupçonné d’avoir joué un rôle de relais avec la Syrie. Devant les enquêteurs, il a contesté toute activité de recruteur.

Des « assises religieuses »

Jawad S. est accusé d’avoir incité au djihad en animant des « assises religieuses » en ville. Quant à Saad B., dont le frère Abdelkarim, premier à quitter Lunel, a lui aussi été tué, il est soupçonné d’avoir convoyé sa belle-sœur à l’aéroport et de lui avoir transmis 190 euros – il sera aussi jugé pour financement du terrorisme, comme Mosli. Des poursuites « étriquées », selon son conseil Joseph Hazan.

Les prévenus « portent en eux l’identification de ce qui s’est passé dans cette ville, qui a été l’illustration de la déflagration djihadiste dans des contrées qu’on ne soupçonnait pas », déplore l’avocat.

Il régnait en ville à l’époque « une ambiance un peu djihad », une surenchère entre jeunes, « à celui qui ne parle que de ça », avait rapporté Jawad S. aux enquêteurs.

« Lunel, c’est la ville de France la mieux représentée au sein de l’Etat islamique! », se réjouissait Mosli, placé sur écoute, fin 2014.

Le spectre des « absents »

Une enquête pour des faits passibles de la cour d’assises se poursuit autour de l’un des principaux recruteurs français, Mourad Fares. Trois volets en ont été disjoints, selon une source judiciaire : celui concernant ces cinq Lunellois, et des dossiers strasbourgeois et francilien.

Fares – dont le lien avec Lunel est ténu, par le biais de contacts d’un de ses proches avec Hamza Mosli – est mis en examen et écroué dans cette procédure. Elle ne concerne, à part lui, plus que les absents, ces quinze Lunellois recherchés, selon la source.

Parmi ces absents : Abdelilah Himich, ancien légionnaire, considéré par Washington comme « une figure des opérations extérieures de l’EI ». Mais aussi Yassine S., l’un des derniers à avoir quitté Lunel. Dans un reportage de France 2 diffusé en janvier, détenu par les Kurdes syriens, il disait vouloir « rentrer chez (lui) et oublier ».

(Avec AFP)

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